Selon le ministère des Affaires étrangères, de la Migration et des Tunisiens à l’étranger, la Mission diplomatique tunisienne à Riyad et le Consulat général de Tunisie à Jeddah coordonnent avec les autorités saoudiennes compétentes et les familles des pèlerins décédés en vue de «finaliser les procédures liées à l’enterrement».
Le ministre des Affaires religieuses n’a rien laissé au hasard pour assurer le déroulement du grand pèlerinage dans les meilleures conditions pour la saison actuelle de l’année 1445 de l’Hégire/2024. Le département avait passé au peigne fin les préparatifs en vue de leur garantir les meilleurs services et conditions d’hébergement. Le nombre de pèlerins n’a pas changé pour les deux années 2023/2024. Il est de 10 982 contre seulement 4.972 en 2022, alors que le nombre total des pèlerins a été fixé par les autorités saoudiennes à seulement 1 million en raison de la pandémie de Covid. 217.331 individus se sont portés candidats lors du grand pèlerinage de cette année.
Pour cette année encore, la moyenne d’âge des pèlerins a chuté à 56 ans. La doyenne est âgée de 104 ans. Elle est originaire de la ville de Remada (Tataouine) alors que la plus jeune des pèlerins n’a que 25 ans. Elle est originaire de Sfax. En 2017, la moyenne d’âge enregistrée s’élevait à 61 ans et le pèlerin le plus âgé avait 98 ans, alors qu’en 2010, la moyenne d’âge avait atteint 64 ans. Il fut un temps où pèlerinage et troisième âge faisaient bon ménage, alors que ces dernières années, cette tradition semble s’estomper. Les Tunisiens ne veulent plus accomplir les rituels du hajj à un âge très avancé.
Les pèlerins tunisiens se portent majoritairement bien
En vue de garantir les meilleures conditions d’hébergement, de transport, de soins, d’orientation et d’encadrement, une équipe constituée de 520 personnes, comprenant en particulier une délégation médicale et paramédicale et des cadres religieux, avait été mise en place pour assister les pèlerins tunisiens, avait précisé dans une déclaration le ministre Brahim Chebbi. Et d’ajouter que pour cette année le ministère a mis à la disposition des pèlerins deux médecins et un infirmier à bord de chaque vol à destination des Lieux saints, et ce, compte tenu de l’état de santé de certains pèlerins.
Une source accompagnant la délégation officielle a par ailleurs confirmé à notre journal que le ministère n’a pas lésiné sur les moyens pour assurer l’accomplissement des rites du pèlerinage dans les meilleures conditions.
Commentant les informations relatives au décès de certains pèlerins à la suite de « la nafra », c’est-à-dire au moment où des foules immenses de pèlerins quittent en même temps le mont Arafat, elle a souligné que c’est le moment le plus fort et le plus risqué du Hadj et qu’il faut donc faire très attention et ne pas s’aventurer à quitter les bus mis à la disposition des pèlerins pour aller à Mouzdalifa pour accomplir d’autres rites. Notre source a regretté le décès de ces pèlerins et a expliqué qu’ils ne font pas partie du quota accordé à notre pays par les autorités saoudiennes. Ils sont sous la responsabilité des tour-opérateurs et agences de voyages spécialisés dans l’organisation du Hadj et qui, malheureusement, ne prêtent pas une grande attention à la sécurité des pèlerins.
Notre source explique encore que les bus sont bloqués pendant plusieurs heures au moment de quitter le mont Arafat, en raison de la forte concentration de véhicules tous contraints de suivre le même parcours. Il arrive que des pèlerins, manquant de patience, descendent des bus pour rejoindre Mouzdalifa à pied, et c’est là qu’ils encourent plus de danger, attraper une insolation et se perdre. Et pour cause, la grande chaleur ainsi que le risque de s’égarer dans l’immense foule qui se chiffre à des millions. « En coordination avec les autorités saoudiennes, on fait tout pour les retrouver », rassure notre source. Elle conclut que jusqu’à preuve du contraire, on ne déplore aucune perte parmi les pèlerins tunisiens inscrits sur la liste du ministère des Affaires religieuses.
Le ministère des Affaires religieuses rassure
A ce titre, le ministère des Affaires religieuses a publié le 17 juin un communiqué dans lequel il fait mention de la visite effectuée par le ministre Brahim Chebbi aux camps des pèlerins à Arafat, samedi 15 juin, où il s’est entretenu avec les pèlerins et s’est informé des conditions de leur séjour et du déroulement des rites du hajj. En ajoutant que tous les membres du bureau de la délégation étaient à leur service à Arafat et à Mina, en passant par Mouzdalifah, afin qu’ils puissent accomplir leurs rites dans les meilleures conditions. Le ministre a également inspecté les centres de santé de la mission dans les camps et a rencontré le chef adjoint de la mission qui lui a assuré que la situation sanitaire était globalement stable. « Dieu soit loué, nos pèlerins ont accompli le pilier majeur du Hadj (celui de Wakfet Arafat) avec grand succès, grâce à l’étroite coopération entre les guides, compagnons, médecins et autres membres de la délégation du bureau tunisien des affaires des pèlerins », souligne le communiqué.
Sur les réseaux sociaux, des informations non vérifiées et non commentées officiellement par le ministère des Affaires religieuses font état de la mort de 34 pèlerins et la disparition d’un nombre indéfini, mettant en cause des agences de voyages privées qui ont manqué à leurs devoirs et qui sont peu soucieuses de l’obligation d’assistance à leurs clients pèlerins. Ces informations ont été relayées par des radios privées, sans toutefois qu’un démenti officiel ne vienne mettre un terme à ces rumeurs. Les causes évoquées sont en majorité relatives aux pics de chaleur. Cependant, la seule explication officieuse a été dévoilée sur les ondes d’une radio privée à la suite de la déclaration faite par le coordinateur général de la délégation sanitaire des pèlerins tunisiens, Hamadi Souissi, hier, mardi 18 juin. Ce dernier a en effet confirmé que des décès de pèlerins tunisiens et des disparus ont été enregistrés. Toutefois, il a tenu à ajouter que le nombre exact de personnes décédées ne pourra être déterminé qu’après la visite dans les hôpitaux.
Le coût du pèlerinage toujours en hausse, le nombre de candidats aussi
En dépit du coût élevé du Hadj pour la saison 2024 (1445 de l’hégire) qui a été fixé à 19 970 dt (19 400 en 2023 et 16 400 en 2022), le nombre de candidats au pèlerinage n’a jamais baissé. Ils étaient 211 mille en 2024 pour 10.982 retenus, et 207 mille en 2023 pour le même nombre de personnes retenues, alors qu’en 2022, le nombre de candidats était de l’ordre de 220 mille pour seulement 4.792 retenus en raison du Covid.
Le montant fixé pour la saison actuelle est réparti entre les coûts des services fournis par la Société des services nationaux et des résidences qui est estimé à 16.400 dinars et au billet d’avion de la compagnie nationale Tunisair équivalent à 3.570 dinars. Cette augmentation relative pourrait être attribuée à divers facteurs dont notamment l’explosion des coûts de transport aérien, les coûts d’infrastructure et de maintenance, les réglementations de sécurité renforcées par la partie saoudienne.
Aucune mention n’est faite autour du coût supplémentaire supporté par le pèlerin dans le communiqué du ministère des Affaires religieuses ou par une autre partie interférant dans les opérations du grand pèlerinage. Pas d’explications non plus sur l’augmentation des coûts d’une année à l’autre. La Cour des comptes mentionne toutefois, dans un rapport consacré à l’organisation du grand pèlerinage au cours de la période 2015-2019, que le pèlerin supporte un coût supplémentaire variant entre 90,282 dt et 190,435 dt à cause de la non-facturation des services des missions d’accompagnement.
Les croyants qui disposent des moyens autant physiques que financiers ne peuvent ni ne doivent s’en priver
La Cour des comptes avait alors recommandé dans son rapport « la mise en place d’un cadre juridique pour assurer une meilleure coordination entre les parties intervenantes et pour définir les responsabilités en cas de défaillances, afin de réviser les dispositions contractuelles d’hébergement à La Mecque, d’étudier la possibilité de diversifier les offres aux pèlerins, selon le niveau du confort et de recourir aux contrats-cadres de logement s’étalant sur plus d’une saison ».
De ce fait, comment expliquer alors cet attachement (passionnel) à effectuer le pèlerinage, malgré la hausse continue du coût ? La réponse nous parvient de l’imam khatib (autorité religieuse) dans une mosquée de la banlieue nord Sofien Ben Salah. Le Hadj est l’un des cinq piliers de l’Islam que tout musulman est dans l’obligation d’accomplir une fois dans sa vie, explique-t-il, s’il en est physiquement et financièrement capable. On ne peut donc contracter un crédit pour l’accomplir, insiste-t-il. Il constitue l’apothéose de la vie du croyant. C’est le grand voyage de la vie.
Il rappelle à cet effet les trois villes saintes que le musulman doit visiter, à savoir en premier lieu La Mecque, le centre du monde musulman, ce pôle spirituel vers lequel s’orientent les prières et où convergent des milliers de croyants chaque année pour le pèlerinage, en second lieu Médine, ou encore al-Madina al-munawra où s’est réfugié, mourut et fut enterré notre Prophète. Enfin al-Qods, troisième lieu saint d’où partit le Prophète pour son voyage nocturne « El-Israa et El- Miiraaj ».
Faire le pèlerinage, c’est accomplir un acte traduisant la quintessence de l’adoration du fidèle envers Dieu.
C’est pourquoi les croyants qui disposent des moyens autant physiques que financiers ne peuvent s’en priver, voire sont dans l’obligation de l’accomplir. C’est une occasion pour se tourner vers Dieu et se détourner de son péché conformément au Hadith de notre prophète « Quiconque accomplit le pèlerinage et s’abstient de toute obscénité et de tout libertinage, en revient pur de ses péchés, comme le jour où sa mère l’a mis au monde», conclut-il.