Les agences de voyages montent au créneau pour demander à ce qu’on enquête pour déterminer les responsabilités.
Les derniers chiffres tournent autour du millier de morts (cela ira au-delà de ce chiffre) et on continue à chercher. Pour ceux qui connaissent les lieux, cela n’a rien d’exceptionnel. Mina et Arafat n’ont rien à voir avec Jeddah, La Mecque ou Médine.
Les choses, certes, se sont énormément améliorées et ces étendues désertiques que nous avons connues dans les années 1978, en mission pour notre journal, ont complètement changé. Nous les avons retrouvées avec des rues correctement tracées, bitumées, éclairées, parsemées de postes fixes de la protection civile, de guides munis de cartes, de portables, des cartes qu’ils sont en mesure de vous transférer sur votre téléphone, etc. etc.
Dans ces conditions, comment expliquer ces victimes et ces centaines de candidats au Hadj perdus et que l’on continue à chercher ?
Cela s’explique en grande partie par la géographie des lieux.
Mina et Arafat sont de gigantesques «villes» de tentes blanches qui se ressemblent et au sein desquelles il est difficile de se fixer sur des points de repères.
Sans ces points de repères, justement, on est complètement perdu et on a besoin d’un guide qui connaît les lieux et qui sait se repérer. D’où l’importance des recommandations strictes que l’on donne à ces candidats au Hadj. Ne jamais se déplacer seul, sans porter les signes distinctifs que l’on adopte et que l’on est obligé de respecter pour ne pas avoir d’ennuis.
Et c’est là que le bât blesse
Ceux qui se laissent tenter, pour ne pas dire embobiner par des intermédiaires, qui proposent l’accomplissement du Hadj en dehors du contingent officiel, s’exposent à des difficultés, voire à des complications qu’il est pratiquement impossible de prévoir.
Les agences de voyages sont montées au créneau pour demander à ce qu’on enquête pour déterminer les responsabilités. Nullement pour supplanter l’organisme qui s’occupe de ce secteur depuis déjà des décennies, mais pour inciter les autorités à les protéger de ces manipulateurs qui ternissent leur réputation, En effet, il est difficile de faire aussi bien, d’autant plus que les mécanismes sont actuellement bien au point. On négocie sur l’ensemble du contingent accordé, les guides sont formés et ont une solide expérience, connaissent les lieux et surtout sont rodés pour ce genre de mission.
La preuve est bien dans ce que font presque toutes les autres nations qui ont adopté cette organisation dont la Tunisie est une pionnière dans ce domaine.
Le problème, qui a été à l’origine de ce drame, réside dans le respect des consignes, dans la discipline du groupe, dans les objectifs initiaux du futur Hadj. Est-il là pour accomplir le rite où s’inquiète t-il des frusques qu’il se propose d’acheter en prenant le risque de quitter seul le campement et d’aller se perdre au milieu des centaines et des centaines de milliers de tentes de même couleur ?
Mina a toujours été considérée comme « la tombe du Hadj». C’est ainsi qu’on l’a dépeinte en raison des risques qu’elle présente. On a beau améliorer, construire, équiper, elle garde tout son mystère. Pour les raisons évoquées plus haut.
Reste à savoir pour quelles raisons certains candidats au Haj tentent le diable en s’exposant à tous ces dangers.
Tout simplement pour aller accomplir le rite et que l’on a été contrarié par le tirage au sort. L’offre de ces manipulateurs sans scrupule est dès lors à l’ordre du jour. Elle se présente sous forme d’avantages financiers (vite remis en question une fois sur place) et ce qui semble une assurance d’accomplir son hadj sans difficultés. Pour les intermédiaires, il suffit d’avoir du bagou et un beau sourire, appuyés par des citations religieuses.
Il faudrait quand même reconnaître que ces entourloupettes ne sont pas propres aux Tunisiens. Trois cent mille Egyptiens ont été refoulés la veille du Hadj. Ils sont venus pour une Omra ou une visite et sont restés sur place cachés quelque part. On a fini par les retrouver et ils ont été reconduits vers les frontières. C’est ce qu’a fait un groupe de Tunisiens pour lesquels l’organisateur a loué un bâtiment pour les loger et pour lesquels il a prévu de faux laissez-passer. Découverts par les autorités saoudiennes, le lieu a été fermé et tout le monde s’est retrouvé dans la rue. Par 50/-55 degrés sinon plus avec plus de 72 degrés sur les surfaces planes, le macadam des rues, par exemple, ce n’est pas du gâteau. Comment ne pas retrouver ces escrocs et les punir pour mettre un terme à ce genre de manigances ?
De toutes les manières, se retrouver à Mina ou Arafat sans tentes, dont une bonne partie est climatisée, est un suicide.
Cela explique ces décès et donne une idée de l’ampleur de ce drame tragique.
Pour conclure, cette tragédie risque de se reproduire si les circonstances qui en sont la cause ne sont pas prises en considération.
Le prix fixé pour le Hadj est à prendre en compte. La valeur de notre dinar, lrenchérissement du transport et des services sur place expliquent ces prix, mais n’excusent en rien les propositions suicidaires de ces intermédiaires sans scrupule. Toute une filière qui organise ce hadj parallèle est à découvrir et à mettre hors d’état de nuire.
C’est là que réside tout le problème.