«Souk Sidi Abdeslem», marché largement connu à Tunis, figure parmi les marchés les plus prisés, où l’on peut faire des économies et s’approvisionner en fruits et légumes de bonne qualité et à prix plus doux qu’ailleurs.
Une semaine après l’Aïd El Idha, les prix des fruits et légumes ont chuté, un tant soit peu, laissant anticiper une légère baisse tant attendue. C’est que, durant la saison estivale, le couffin de la ménagère s’alourdit en ces produits à la fois frais et pleins de fibres, et ce, au détriment de tant d’autres aliments dont les prix sont devenus inadaptés au budget du Tunisien à moyen revenu.
Les habitudes culinaires durant l’été font pencher la balance en faveur des salades, les fritures, les ratatouilles et les fruits rassasiants et désaltérants. Les étals des marchands donnent un avant-goût de cette transition consommatrice.
«Souk Sidi Abdeslem», marché largement connu à Tunis, figure parmi les marchés les plus prisés, où l’on peut faire des économies et s’approvisionner en fruits et légumes de bonne qualité et à prix plus doux qu’ailleurs. Les marchands accueillent leur clientèle par des étals organisés et bien fournis. Les produits y sont exposés avec soin.
Prix à la baisse
Mokhtar Makhlouf, marchand de légumes, confirme la sensible baisse des prix, et ce, en comparaison avec la période précédant l’aïd. «C’est que la marchandise est disponible en grandes quantités, alors que le nombre des marchands est moindre. Mais, dans tous les cas, nous avons l’habitude d’observer une baisse progressive au niveau des prix durant l’été. La plupart des produits ne tarderont pas à coûter au consommateur moins de deux dinars le kilo», indique-t-il.
En examinant les prix des légumes, l’on constate, en effet, qu’à l’exception des haricots frais proposés à 4d980 le kilo, du poivron doux à 3d980 le kilo, du piment qui se vend à 3d700 le kilo et des gombos à trois dinars les cent grammes, les prix des légumes restants varient, pour la plupart, entre 1d500 et 2d500. Les carottes sont, d’ailleurs, à 1d980, les tomates à 1d380, les pommes de terre à 1d600, l’oignon à 1d980 et le concombre à 2d400, alors qu’il se vendait à quatre dinars avant l’aïd.
Inégalée, la pastèque !
Mais pour ce qui est des fruits et de leurs prix respectifs, c’est une autre paire de manches. Seule la pastèque demeure à la portée du consommateur à revenu moyen, chapeautant ainsi la liste des produits alimentaires à consommer au quotidien. Contre la modique somme de 1d100 le kilo pour une pastèque complète, sinon 1d200 le kilo, pour une portion bien généreuse, le Tunisien a bien droit de se régaler les papilles.
Mohamed Bettaïeb est marchand de pastèques au marché «Sidi Abdeslem». Pour s’approvisionner en marchandise de bonne qualité, il a dû passer deux nuits dans son camion, tout près des producteurs de renom à Chbika, à Kairouan. Là, le kilo est proposé au marchand à une fourchette de prix oscillant entre sept cents millimes et un dinar. «Certains producteurs vendent à des prix impensables et ce sont, généralement, les marchands libyens qui achètent, sans la moindre hésitation. Pour ce qui est de nous-mêmes, nous veillons toujours à choisir la bonne qualité sauf que nous nous heurtons à une loi handicapante : nous n’avons pas le droit de circuler avec une somme supérieure à cinq mille dinars, sinon notre argent est confisqué par les agents de contrôle sur l’autoroute», se plaint-il. Et de poursuivre: «Depuis deux mois environ, il a été procédé à la révision de cette loi pour plafonner, désormais, cette somme à seulement trois mille cinq cents dinars, ce qui est pire pour un marchand qui compte s’approvisionner et mener à bien son commerce».
Mohamed a enfoncé le clou pour mettre le doigt sur un problème auquel plusieurs marchands sont confrontés, tout en répondant favorablement à la demande des clients. Le prix de la pastèque, pourtant abordable, ne tardera pas à chuter davantage au cours de la saison, pour le plus grand plaisir des gourmands.
La bonne qualité se paie..!
En revanche, les autres fruits de la saison demeurent assez élevés : les amandes sont à 3d200 le kilo, les prunes à 4d500, le raisin à 6d980, les fraises à quatre dinars le kilo, les figues à six dinars le kilo, les pêches à 4d800 et les pommes à 4d980. «La bonne qualité se paie», justifie Mohamed Amine Ouerghi, marchand de fruits.
Cette année, les prix des fruits s’avèrent être plus élevés que l’année dernière. Il explique cette hausse par les problèmes qui sont survenus et qui ont nécessité un recours de plus en plus accentué aux pesticides. «C’est que les agriculteurs dépensent des sommes colossales pour avoir une bonne récolte. Cette année, les arbres fruitiers ont été en proie à beaucoup de virus et de maladies qui n’ont épargné ni les agrumes ni les fruits estivaux. Ceux qui ne protègent pas leurs arbres récoltent des fruits infestés de vers. C’est le cas des abricots de moyenne gamme qui sont proposés sur d’autres étals à deux dinars le kilo», explique-t-il. Sans pour autant manquer d’attirer l’attention sur les mauvais tours que joue le climat contre les agriculteurs qui ont, parfois, perdu des mois de labeur et beaucoup d’argent. «Faute de subvention et d’appui, nous allons finir par importer et les semences et les fruits», ajoute-t-il.
Mais, ce qui est certain, c’est que la majorité des consommateurs ne se soucient aucunement des conditions des agriculteurs. Pour eux, seules les pancartes affichant les prix les interpellent, les séduisent ou —bien au contraire— les repoussent… C’est le cas de Raoudha, fonctionnaire, partie à la retraite anticipée. Elle n’a fait que passer devant les étals des fruits sans pour autant succomber à la tentation. «C’est carrément infernal ! Les prix des fruits sont inaccessibles. Pourtant, notre pays figure parmi les grands producteurs de fruits ! Je ne comprends pas pour quelles raisons les pêches se vendent à cinq dinars le kilo, je trouve cela aberrant !», ajoute-t-elle, frustrée. Vivant seule avec son mari, elle a pourtant du mal à arrondir les fins des mois. «Tout est devenu trop cher. D’autant plus que la transparence commerciale fait souvent défaut. J’ai l’impression qu’ils nous prennent pour des dupes. Certains affichent des prix nettement plus gonflés que d’autres, et ce, pour un même produit et pour la même qualité. Croyez-moi, l’autre jour j’ai trouvé la même qualité de pomme de terre à 1d400 et à deux dinars le kilo, soit un écart de six cents millimes, ce qui n’est pas peu», s’exclame-t-elle, exacerbée.
Quant à Mohamed Zied, fonctionnaire et consommateur avisé, il anticipe déjà sur la baisse des prix des légumes durant la saison estivale. Pour les fruits, il a l’habitude d’acheter trois kilos de fruits par semaine.
Photo: © Koutheir Khanchouch