Trois élèves d’un même lycée du gouvernorat de Mahdia se sont adressées au commissariat régional de l’éducation pour vérification des notes obtenues à la session principale du Bac. Des erreurs graves ont été décelées dues à des défaillances au niveau du traitement des données.
Une fois les formalités administratives faites, il s’est avéré que deux d’entre elles avaient réussi et avec une bonne moyenne, tandis que la troisième était, effectivement, ajournée.
La partie émergée de l’iceberg
Cette affaire est à lier avec une autre. Mais, cette fois, il s’agit d’une opération de falsification des notes. C’est une élève d’un lycée de Siliana qui a voulu faire croire à tout le monde qu’elle avait réussi, contrairement aux résultats publiés dans le lycée. Selon elle, les notes reçues par SMS (qu’elle avait falsifiées) ne correspondent pas à celles de son établissement. Les vérifications entreprises au niveau du commissariat régional à l’éducation de la région ont démenti les allégations de la lycéenne. Ces deux faits largement médiatisés ne sont que la partie émergée de l’iceberg. De tels cas se comptent par centaines pour ne pas dire plus. Des erreurs pareilles ont lieu chaque année. Dans de nombreux cas, elles ne sont pas découvertes ou pas signalées par les élèves concernés. Ces derniers, pour la plupart, ne recourent pas à la procédure de vérification ou ne voient pas l’utilité d’un tel recours. Quant à l’affaire des trois élèves de Mahdia, la question qui se pose est la suivante : sur les 140.000 lycéens qui ont passé le Bac, il n’y aurait que trois élèves sur le compte desquelles on s’est trompé ? Impossible ! Généralement, les candidats acceptent le verdict sans faire appel. L’exception est la règle. Cet épisode malheureux montre à quel point on peut arriver à cause d’une négligence ou un manque de vigilance. Les agents chargés de ce travail n’ont pas commis ces actes de façon délibérée. Ce qui n’empêche pas la nécessité de confier ces opérations à des gens plus compétents. On mesure à juste titre le préjudice moral causé à ces jeunes lycéennes quand on voit la marge d’erreur constatée entre les notes obtenues et celles déclarées. A titre d’exemple, des candidats s’étant aperçu d’anomalies ont bénéficié d’une vérification. Ainsi, au lieu du 9.25/20 en sciences, la note attribuée était 18.25/20. Du coup, la moyenne est montée à 18.40/20. Un autre exemple permet de constater l’augmentation de la moyenne de 12.79/20 à 13.55/20 grâce à la rectification de la note de sciences (de 9/20 à 15/20).
Justifications officielles
Du côté des autorités, un responsable des examens a assuré que le système informatique utilisé est hautement sécurisé et qu’il est quasiment impossible qu’une erreur survienne. Dans une déclaration à la radio nationale, ce responsable a fait montre d’une assurance à toute épreuve. Le dispositif en place, selon lui, ne laisserait aucune brèche ouverte. Or, on aimerait que de telles assurances ne cachent pas des insuffisances réelles.
Il ne faut pas faire confiance aveugle à la machine. Elle peut faire des siennes comme on dit. Les algorithmes ne sont pas infaillibles. Le côté humain est aussi à prendre en compte. Lors de la saisie manuelle des notes, un manque de vigilance peut coûter cher à un ou plusieurs candidats. C’est ce qui a motivé le limogeage de la commissaire régionale à l’éducation de Sousse, dont dépend le centre de collecte, ainsi que le responsable de ce centre, le responsable du centre des examens et les responsables du secrétariat ayant procédé au classement des copies d’examen. Quant à la machine proprement dite, il est, toujours, bon de faire attention à sa bonne marche. Pour preuve, nous avons eu recours au relevé de notes d’un bachelier de la session principale du bac 2023. Comment expliquer qu’un prof d’arabe puisse donner une note de 9.87/20 ! Plus bizarre encore, ce même élève — qui a réussi, soit dit en passant avec une bonne moyenne — a constaté qu’on lui avait donné une note de 18.87/20 en informatique, un 17.43/20 en éducation physique, etc. Ces notes sont plus que bizarres dans la mesure où elles pourraient se comprendre pour des matières scientifiques comme les maths, les sciences physiques ou chimiques, mais pas pour des matières comme l’arabe ou la philo. Une note contenant 87 ou 43 après la virgule pour des matières non scientifiques ne peut être que suspecte. D’où la nécessité pour la direction des examens de faire plus d’efforts pour améliorer ses algorithmes, de manière à détecter automatiquement ces anomalies, de les signaler et, éventuellement, de les rectifier avant de les prendre pour argent comptant. Rien n’est parfait. C’est pourquoi il faut être modeste, lorsqu’on veut défendre un dysfonctionnement préjudiciable à de très nombreux élèves.
Une révision globale s’impose
Le lycée de la ville de Karker (Mahdia), dont il est question, a fourni des preuves irréfutables sur les dysfonctionnements possibles qu’on ne peut ni nier ni exagérer ni, non plus, minimiser. On peut affirmer que des incidents similaires sont possibles partout. Mais, qu’au lieu de vouloir se disculper à tout prix, il est plus logique de reconnaître les faiblesses constatées. Une révision totale du dispositif et de la logistique dans les examens est à opérer. La saisie manuelle des notes est cruciale. C’est peut-être à ce stade qu’il faut être vigilant. Une vérification des saisies s’impose. Et pourquoi pas une révision globale des notes de tous les candidats qui ont échoué ou ont été ajournés avant d’officialiser les résultats et de les publier. En tout cas, on ne peut pas tourner la page d’une affaire de cette ampleur par le limogeage de quelques agents administratifs.