Depuis des siècles, l’Afrique est confrontée à une crise de la dette exacerbée par des flux financiers illicites et des conditions défavorables pour l’emprunt. Les pays du continent doivent constamment recourir à l’emprunt, engendrant une situation de dette non durable. Et selon Dinah Musindarwezo, féministe rwandaise et militante panafricaine des droits des femmes, le coût de l’emprunt en Afrique est injustement plus élevé que dans d’autres régions, en raison des risques perçus par les agences de notation, malgré des taux de défaut plus bas. Lors de sa participation à la quatrième édition de la Conférence africaine sur la dette et le développement (AfCoDD IV), Mme Musindarwezo a indiqué qu’en 2024, l’Afrique devra payer 163 milliards de dollars pour le service de la dette, une hausse significative par rapport aux 61 milliards de dollars en 2010.
La composition de la dette a évolué, la part de la dette bilatérale ayant chuté à 27 % contre 52 % en 2000, tandis que la dette commerciale représente désormais 43 % de la dette totale, contre 20 % en 2000.
Les conditions imposées par les créanciers, telles que la réduction des dépenses publiques, notamment dans les domaines de la santé et de l’éducation, accentuent les inégalités de genre. Les femmes, majoritaires dans les secteurs des services sociaux, sont particulièrement affectées par les coupes budgétaires. Entre 2014 et 2018, les dépenses publiques pour les services sociaux ont diminué de 15 % en Afrique subsaharienne, avec 25 pays africains dépensant plus pour le remboursement de la dette que pour l’éducation. Les politiques d’austérité du FMI, qui encouragent la réduction des dépenses en santé, éducation et droits reproductifs ont un impact disproportionné sur les femmes, qui prennent souvent en charge les soins non rémunérés.
Pour remédier à cette crise, des alternatives féministes proposent de repenser le système économique en intégrant des principes de justice sociale et de droits humains et de promouvoir une décolonisation financière par l’annulation de la dette et des contributions financières inconditionnelles.
Une révision du rôle de l’État est également nécessaire pour garantir des services publics de qualité, accessibles et sensibles au genre, tout en assurant une participation significative des féministes dans la formulation des politiques.