ESQUISSE – Aziza Othmana: La Dame au grand cœur (II)

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L’été c’est l’été. Même lorsqu’il vient interrompre pour cause de relâche estivale le cours d’un récit qui restera suspendu le temps de récupérer sur les fatigues de l’année et de restaurer ses forces pour un nouveau tour de onze mois.

Heureusement, la «coupe» a été faite proprement et la reprise peut ainsi s’effectuer sans bavures, c’est-à-dire sans hiatus. De quoi s’agit-il ? De l’esquisse du portrait de la grande Aziza Othmana dont nous avons initié les «préliminaires» lors de notre dernier rendez-vous, début août dernier. Aujourd’hui, sur le seuil de son mausolée qui est en même temps celui de l’illustre Sidi Ahmed Ben Arous, à Tunis, nous allons achever la besogne.

Aziza Othmana est née à Tunis vers l’an 1606 dans un pays profondément marqué par les traumatismes et déchirures occasionnés par une occupation espagnole de près d’un demi-siècle et qui avait pris fin en 1573 avec le débarquement sur notre sol de troupes ottomanes venues sous la conduite de Sinane Pacha chasser l’envahisseur chrétien. Le successeur du général turc, Othmane Dey, s’est attaché à panser les blessures du pays et à restaurer une atmosphère de confiance et de labeur. De même, il s’employa avec le concours de son fils Ahmed, père de la princesse Aziza, à installer et intégrer dans le pays les dernières vagues de réfugiés andalous.

Elevée selon les règles strictes du dogme musulman, nous apprend son biographe, le général Sadok Zmerli, dans un opuscule paru aux éditions Ben Slama au milieu du siècle dernier, mais entourée de la sollicitude d’un père qui la considérait à juste titre, tant à  cause de son éclatante beauté que pour ses facultés précoces, comme «l’ornement» de sa maison, la princesse Aziza montra dès son plus jeune âge des aptitudes exceptionnelles pour l’étude des lettres aussi bien que pour les sciences religieuses.

Mariée assez jeune à un brillant officier de l’entourage de son père, Mourad Bey, elle mena à ses côtés une existence exemplaire de maîtresse de maison, mais aussi de fidèle dévote. De retour d’un pèlerinage à la Mecque, elle s’empressa d’émanciper sa nombreuse suite composée d’esclaves blancs et noirs et se consacra entièrement à la bienfaisance et à la charité, se dépouillant volontairement et par testament de sa fortune, immense pour l’époque, au profit d’œuvres humanitaires à l’intention des humbles et des déshérités.

Morte en l’an 1669, Aziza Othmana n’a pas été inhumée dans le mausolée de son maître spirituel, Sidi Ahmed Ben Arous, dont elle était une fervente adepte, mais dans un local qui lui était contigu, séparée de sa sépulture par une simple cloison en maçonnerie. Dans les années 90 du siècle dernier, cette séparation a été supprimée, mettant les deux tombes au voisinage immédiat l’une de l’autre.     

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