De notre envoyée spéciale Neila Gharbi
Une prouesse formelle pour une première œuvre enthousiasmante dont la première impression est la maîtrise cinématographique de l’image et du son.
Le film égyptien «Le printemps arrive en souriant» (Dakhala Rabiaa Yadhak) de Noha Adel, projeté dans le cadre de la compétition internationale de la 45e édition du Festival international du film du Caire, est une satire douce-amère sur l’univers féminin avec ses joies et ses déboires. Pour son premier long métrage, Noha Adel s’est offert un casting composé presque exclusivement d’actrices dont la plupart apparaissent pour la première fois à l’écran. «Le printemps arrive en souriant» est une immersion dans l’intimité des femmes.
Le film est original et pertinent dans son approche. Il est composé de scénettes, quatre au total, qui n’ont de lien entre elles que les saisons, en l’occurrence ici le printemps jusqu’à l’arrivée de l’automne. La première longue séquence, une femme âgée et sa fille invitent un voisin et son fils pour un thé. Tout se passe tranquillement jusqu’à ce que le fils fasse une proposition inattendue. Il veut faire marier son père à cette voisine. A ce moment précis, éclate une dispute entre les deux enfants et la jeune femme refuse la proposition et se met à insulter le fils.
Le plan séquence de la deuxième scène se déroule dans un lounge. Une femme invite ses copines pour fêter son anniversaire. Entre un morceau de gâteau et une boisson, la discussion porte sur les relations maritales. Cette réunion amicale tourne au drame lorsque l’une des présentes, qui n’était pas invitée à cet anniversaire, évoque une histoire d’infidélité. Se sentant visée, la principale protagoniste se querelle avec cette dernière et la renvoie.
La troisième se passe dans un salon de coiffure, une cliente s’aperçoit qu’elle a perdu sa bague et décide de fermer le salon à clé jusqu’à ce qu’on lui retrouve le précieux bijou dont elle soupçonne qu’il lui a été volé. La quatrième scène a lieu dans la chambre d’une jeune fille qui se prépare à son mariage. Entourée de sa famille et de ses copines, elle se maquille et s’amuse en chantant et dansant. C’est alors que l’une des copines se sent visée par une remarque et éclate une querelle entre elle et la mère qu’elle soupçonne de chercher à bousiller le mariage de sa fille. Le film se termine comme il a commencé, les deux vieux voisins se rencontrent dans le jardin de la résidence et, sur les airs d’un refrain de Arabiâa de Ferid Latrech, se termine le film. «Le printemps arrive en souriant» est une prouesse formelle. Une première œuvre enthousiasmante dont la première impression est la maîtrise cinématographique de l’image et du son. Une immersion dans le monde féminin écrit avec un sens proche du romanesque. Filmé au plus près des actrices, le film propose une palette d’émotions que les protagonistes traversent dans leur vécu. Femmes filmées par une femme en plans rapprochés, le film suit une évolution en crescendo qui débute par le rire et se termine par les larmes. Une tragi-comédie bien rythmée et orchestrée par une réalisatrice qui a le sens de la mesure.