Les talents qui portent les germes de champions finissent par se perdre dans le labyrinthe du financement et des lourdes procédures. Tout doit changer.
Les trois médailles raflées par nos athlètes aux derniers JO relèvent de l’exploit. Voire du miracle étant donné le peu de moyens financiers disponibles et la très mauvaise politique de détection et d’accompagnement de l’élite. Cela fait des décennies que l’on accompagne mal ces champions et ces championnes qui éclosent on ne sait comment, pour qu’ils (elles) lèvent le pied tôt ou tard. Et ce nombre de médailles et de consécrations réalisées dans les sports inidividuels en particulier, comment se sont-ils produits? Cela ne peut pas être un accident de l’histoire mais derrière il y a un tas de sacrifices et de talents exceptionnels conjugués à un minimum d’intérêt accordé à ces lauréats par leurs fédérations, la tutelle et aussi (surtout) par leurs parents qui ont financé ou qui ont géré la carrière de leurs enfants. Tout ce palmarès assez respectable n’est pas le fruit d’une politique saine de l’élite qui n’existe même pas. Le ministère des Sports demeure incapable, depuis des années, via sa direction de l’élite et des lourdes et lassantes procédures de financement, de répondre avec célérité aux besoins de plein d’athlètes qui, au stade du très haut niveau, se trouvent presque seuls à se casser la tête pour chercher des financements aux charges d’hébergement, du staff technique, du déplacement et des différents frais. Certains de ces athlètes de haut niveau sont aussi mal suivis et peu aidés par leurs fédérations. Les budgets limités de ces fédérations et les décalages dans le déblocage de ces budgets ainsi que l’immobilisme de ces bureaux fédéraux, qui ne font pas d’efforts pour ramener des sponsors et pour développer leurs ressources, compliquent la donne. Que reste-t-il alors à ces compétiteurs de haut niveau? Pas grand-chose. Ils se lancent dans des courses contre-la-montre pour ramener des factures, des reçus, des demandes pour obtenir les fonds auprès du ministère des Sports. Entretemps, ils ne sont pas à l’aise pour se concentrer sur leurs performances sportives, ils vivent dans un stress continu, dans un désespoir qui se traduit plus tard par des contreperformances fatales. Et tout cela se comprend. Et s’explique aussi. Le modèle de la gestion de l’élite est complètement à revoir, car on a un terrible manque à gagner sportif et des champions qui naissent pour disparaître plus tard sous le coup du délaissement et de la marginalisation.
Le mental…
Il n’y a pas que la prise en charge financière et technique de l’athlète de haut niveau. Cette élite a besoin également de soutien psychologique et mental car, à ce niveau, le mental fait la différence.
Rien qu’à voir les grandes nations sportives qui mettent à la disposition de leurs champions une palette de conseillers et de spécialistes qui les aident à atteindre la forme optimale avec la gestion des émotions et du stress. L’élite, pour qu’elle réussisse à perdurer et à rayonner, a besoin d’être suivie continuellement. Un champion peut être décelé facilement mais pour le conserver et le développer, on a besoin de plusieurs maillons. L’un de ces maillons c’est l’approche d’encadrement et de suivi entre l’éclosion et la performance. Plein de nos talents se perdent à ce stade. Découverts, aidés par leurs entraîneurs et leurs parents pour gagner à l’échelle arabe ou africaine, ils finissent par être délaissés et «victimes» de ce système d’élite mal conçu. Les autres maillons perdus sur le chemin accablant ces athlètes? Le maillon financier et administratif en premier lieu. Résultat : des projets de champions avortés ou qui finissent mal faute de savoir-gérer. Les finances, seul facteur de succès? C’est vrai que les fonds sont déterminants. Les pays les plus riches ont plus de champions, mais en même temps d’autres pays en voie de développement, grâce à un savoir-gérer des moyens et aux traditions confirmées de gérer les champions, ont atteint les sommets avec moins de moyens que d’autres. Et tant qu’on continue de gérer l’élite de la même manière depuis des années, et tant que ces braves et ambitieux champions sont laissés seuls face à leurs destins, on ne peut pas espérer grand-chose. Le cas de Ayoub Hafnaoui est un cas d’école : un champion olympique qui surgit et émerveille tout le monde pour disparaître pratiquement deux ans après sans que l’on comprenne pourquoi et comment cela s’est produit !