Doucement, mais sûrement, la Tunisie avance dans son plan ambitieux visant à s’assurer une autosuffisance en produits alimentaires stratégiques. Aujourd’hui, il est légitimement plausible de voir l’agriculture tunisienne, grâce à un programme multiforme et des investissements adéquats, parvenir, à court et moyen termes, à l’autosuffisance dans différents produits, notamment dans les céréales stratégiques, les produits laitiers…
La Presse — Mettre la Tunisie à l’abri, c’est, entre autres, la prémunir d’une dépendance alimentaire qui pourrait être fâcheuse, compte tenu des fluctuations des marchés mondiaux, de l’incertitude indue par les conflits régionaux ainsi que des sécheresses provoquées par le réchauffement climatique.
Affecté par une sécheresse sans précédent depuis plus de cinq ans, le pays voit ses chaînes de production de céréales, de viandes rouges et de lait sévèrement compromises. Aujourd’hui, la Tunisie importe plus de 70% de ses besoins en céréales et la totalité de ses besoins en huile végétale, sucre, café…
Balance commerciale
alimentaire excédentaire
La balance commerciale alimentaire du pays est demeurée excédentaire en 2024, une performance principalement attribuable à l’augmentation des exportations d’huile d’olive. La stratégie de sécurité alimentaire de la Tunisie continue de s’appuyer sur la théorie des avantages comparatifs, privilégiant les exportations de produits tels que les dattes, les agrumes, l’huile d’olive et les produits de la pêche.
Cependant, face aux difficultés d’approvisionnement et aux changements de politiques agricoles à l’échelle mondiale, il devient impératif de repenser notre politique de sécurité alimentaire. Il est essentiel de constituer des stocks stratégiques de produits de base comme les céréales, le fourrage, le sucre et l’huile végétale. Cette approche proactive pourrait bien être la clé pour sécuriser l’avenir alimentaire de la Tunisie. Cela permettrait aussi de gérer les urgences et d’éviter des crises dues aux fluctuations des marchés internationaux.
200.000 hectares supplémentaires réservés au blé
En Tunisie, le blé est la principale céréale consommée. Alors que le pays dépend à hauteur de 80 % des importations pour ses besoins, l’ambition des acteurs de la filière est d’augmenter le niveau de la production locale. En effet, la culture du blé devrait être réalisée sur une superficie de 1,17 million d’hectares au cours de la campagne agricole 2024-2025, selon les projections de la direction générale de la production agricole (Dgpa) du ministère de l’Agriculture.
Pour soutenir l’appareil productif au cours de la campagne 2024-2025, le gouvernement a fourni aux agriculteurs environ 30.000 tonnes de semences de céréales sélectionnées et 370.000 tonnes d’engrais.
La consommation totale de blé tunisien est d’environ 3 millions de tonnes par an. Une stratégie a été préconisée pour atteindre 2,7 millions de tonnes de production céréalière au cours des trois prochaines années en Tunisie. Il est vrai que la récolte de cette saison est meilleure que la saison dernière, mais elle ne va pas dépasser les 10 millions de quintaux, ce qui équivaut à 30 % des besoins du pays en céréales.
Pour une stratégie nationale efficace et durable
Les professionnels du secteur agricole pensent qu’il est indispensable de travailler sur une stratégie nationale efficace et durable où il est nécessaire d’adopter un plan d’urgence pour réorganiser une cartographie agricole qui donne la priorité aux cultures stratégiques et particulièrement aux céréales, aux cultures fourragères et aux cultures maraîchères.
Par ailleurs, l’exécutif est appelé plus que jamais à repenser le modèle économique agricole afin d’assurer la sécurité alimentaire du pays, car, sans elle, il sera confronté aux problèmes de l’approvisionnement des matières de première nécessité vu la situation géopolitique internationale et les difficultés actuelles de transport maritime. La sécurité alimentaire est une condition indispensable à la paix sociale. Au cours de l’année 2024, le ministère a annoncé une série de mesures, notamment en matière d’approvisionnement en facteurs de production végétale (semences et engrais) et animale (alimentation), de développement des filières agricoles, de gestion de l’eau d’irrigation, d’assurance agricole, de financement et d’accompagnement des agriculteurs.
L’huile d’olive est l’une des principales productions agricoles de la Tunisie et constitue un produit d’exportation stratégique pour le pays. Selon l’Observatoire national de l’agriculture (Onagri), les revenus des exportations d’huile d’olive ont augmenté d’environ 90 % au cours des sept premiers mois de la campagne agricole 2023-2024 par rapport à la même période de 2022-2023. Les exportations tunisiennes d’huile d’olive peuvent atteindre les 195.000 tonnes et peuvent rapporter 5.200 millions de dinars en devises.