Le gouvernorat de Nabeul, réputé pour sa production de fraises, connaît une diminution inquiétante des surfaces consacrées à cette culture.
Cette année, les superficies ont chuté à 340 hectares contre 380 hectares lors de la saison précédente, alors que, par le passé, elles dépassaient les 600 hectares, selon les données obtenues par l’Agence TAP auprès de la délégation régionale du développement agricole de Nabeul.
Cette réduction des surfaces cultivées s’accompagne d’une baisse significative de la production, surtout dans la région du Cap Bon, qui représente 90 % de la production nationale. En effet, la récolte attendue cette saison ne devrait pas dépasser 13.600 tonnes, contre près de 20.000 tonnes l’année dernière.
Plusieurs facteurs expliquent cette tendance préoccupante, notamment la réduction des surfaces cultivées et un désintérêt croissant des agriculteurs pour cette culture. En cause, l’augmentation des coûts de production, due à la hausse des prix des plants, des intrants agricoles et du manque d’eau, selon les témoignages d’agriculteurs des différentes régions de la délégation de Korba, qui représente 60 % de la production nationale. Avec près de 150 hectares cultivés, cette zone fait face à une situation de plus en plus difficile.
Les agriculteurs ont exprimé la nécessité d’une intervention de l’État pour soutenir le secteur et encourager les producteurs à maintenir leur activité. Selon eux, des solutions urgentes sont nécessaires pour garantir la durabilité du secteur de la fraise et faciliter la commercialisation de leurs produits. Ils réclament une réduction des taxes imposées, notamment celle sur le marché de gros de Bir Kassaa, qui atteint 14 %.
Ghilane Belhaj, agriculteur de la région de Beni Aichoun à Korba, a souligné les difficultés liées à l’augmentation des coûts de production, qui peuvent atteindre 80.000 dinars par hectare, en raison de l’explosion des prix des intrants et des plants, qui se chiffrent à 1500 millimes. Il a également pointé du doigt la réglementation obligeant les agriculteurs à vendre leur production exclusivement aux détaillants disposant d’une carte d’identité fiscale, ainsi que la fixation du prix du kilogramme de fraise à 5 dinars en début de saison. Ce prix, selon lui, est insuffisant pour couvrir les coûts de production et perturbe la commercialisation, poussant de nombreux agriculteurs à abandonner la culture de la fraise.
Wajdi Rabah, un autre agriculteur de la région de Bou Yousef, a évoqué le manque d’eau, l’augmentation des prix de la main-d’œuvre et sa rareté parmi les principales raisons de l’abandon de cette culture, qui a marqué la région depuis des décennies. Il a également dénoncé l’impossibilité pour les agriculteurs de connecter leurs puits au réseau électrique haute tension, malgré de nombreuses demandes, ce qui aggrave la situation en raison du manque d’eau pour l’irrigation.
Ainsi, pour garantir la pérennité de cette culture essentielle à l’économie locale, de nombreux agriculteurs, comme Taher Belhaj, soulignent l’urgence d’un soutien accru. Les coûts de production d’un hectare de fraises varient entre 80.000 et 120.000 dinars, en raison de l’augmentation des prix des intrants agricoles et de la main-d’œuvre. Ils appellent à des mesures de soutien pour garantir une marge bénéficiaire suffisante, permettant de maintenir cette activité vitale pour la région.
La saison de culture et de récolte de la fraise à Nabeul, qui s’étend sur six mois, est cruciale sur les plans économique et social, générant environ 200 000 journées de travail pour la main-d’œuvre locale et extérieure. Une crise dans ce secteur pourrait avoir des conséquences considérables pour de nombreuses familles de la région.