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Vacances d’hiver : Tranches de vie…

Alors que les agriculteurs étaient bien contents de ce que le ciel leur a offert ces dernières semaines, une pluie bénéfique qui relance tout et remplit nos barrages, nos gamins et leurs parents faisaient la tête.

La Presse — Pas tous bien sûr, puisqu’en dépit de ce mauvais temps qui a sévi, avec un soleil matinal qui joue à cache-cache pour céder la place à cette manne céleste, la population scolaire en a quand même profité.

Le Centre culturel et sportif d’El Menzah a revêtu ses plus beaux atours et ses différents ateliers ont tourné à plein rendement.

Une gamine tenait son petit tableau à la main. Elle le protégeait de la bousculade qui s’était formée au passage de ceux qui étaient considérés comme des « peintres » à part entière.

«C’est mon premier dessin heu… tableau, nous dit-elle avec une touchante timidité. Je vais continuer.  Ma mère m’a promis qu’elle trouvera le temps pour m’accompagner et j’ai trouvé que c’est très intéressant. La maîtresse est gentille et très patiente».

Du fond du couloir, des karatékas ont terminé leur séance. Ils se précipitent vers la baie vitrée pour voir le temps qu’il fait. Il pleuvait. D’ailleurs, un des parents tend à son fils un imperméable. «N’oublie pas de mettre ton cache-col», recommande t-il avec insistance.

« Franchement,  je ne pensais pas qu’il allait s’accrocher. Il n’a jamais voulu faire un choix pour en faire un objectif. Cette fois-ci c’est la bonne. Je pense que c’est une question de prise en main et d’ambiance. Cela lui a plu. L’abonnement n’est pas cher et je vais essayer de le pousser. C’est enfin une solution pour résoudre ces balades en groupe dans la rue  ».

Sur le chemin de la bibliothèque de l’Ariana, pour s’enquérir de l’ambiance qui règne, nous avons remarqué une foule énorme dans une pharmacie.

Le pharmacien nous explique « qu’un virus qui rôde a fait beaucoup de dégâts. Enfants comme adultes ont passé de mauvaises vacances ».

C’est la vie, mais tant que ce n’est pas grave, passons

Disons, pour être le plus proche possible de la vérité, qu’on pourrait prétendre à plus d’ambiance dans cette bibliothèque. Hélas, nos enfants ne lisent pas beaucoup.

 Au fond, une dame attend sa fille. On l’a faite entrer parce qu’il pleuvait.

«Les contes pour enfants coûtent de plus en plus cher. C’est le seul moyen d’aider ma fille à lire. A l’école, il n’y a pas de bibliothèque. Je me souviens que chaque élève amenait un livre en début d’année et on constituait un lot dont on se passait les titres toutes les semaines. A la fin de l’année, nous laissons tout pour la bibliothèque de l’école.  De nos jours, cette bonne tradition s’est perdue», nous souffla-t-elle avec une pointe de regret.

Un coup de fil de l’aéroport nous apprend que «dans une heure, il y aura l’arrivée d’un avion en provenance de… Turquie».

Nous avons tout de suite compris que certains y sont allés pour des vacances d’hiver.

Effectivement, les bonnets bariolés nous guident vers toute une famille.

« Non, nous n’étions pas là où il y a eu cet incendie. C’était bien et le dépaysement en valait la peine. Ce n’est pas aussi cher qu’en France, mais ils se font payer. L’essentiel c’est que nos enfants ont bien profité ».

Au retour, il y avait un beau soleil. Sur le trottoir, filles et garçons jouaient à la marelle.

Chacun ses possibilités, mais l’essentiel est dans ces sourires et ces éclats de rire.

«Hier, le musée était gratuit. Nous y sommes allés. Il y a de quoi regretter que nous n’ayons pas vécu à  cette époque. Les tableaux, les mosaïques,  les costumes. C’est merveilleux. Mon père m’a promis d’y retourner lors des prochaines vacances.  En tous les cas, nous irons demain à la Cité des sciences. Pour le moment, nous jouons à la marelle».

Deux extrêmes : les uns voyagent et vont à l’étranger pour passer leurs vacances et les autres qui se suffisent des richesses de leur pays.

Un enseignant en retraite nous résume la situation et ne manque pas de souligner un certain nombre de réalités.

«Le pouvoir d’achat n’est pas le même.  Les uns ont la possibilité d’engager des frais conséquents  pour que leurs enfants bénéficient d’une bonne semaine de vacances, d’autres se dirigent automatiquement vers ce qu’on leur offre.

C’est la raison pour laquelle nous devons mettre à leur disposition un troisième milieu sérieux, formatif et intéressant. Le Chef de l’État a dernièrement soulevé cette question et a recommandé d’équiper les maisons des jeunes ou de la culture, pour que les jeunes y aillent. Dans le cas contraire, des centaines de milliers de jeunes et de moins jeunes se résignent à rester dans la rue ou garder la maison.

Dans les deux cas, c’est nocif. Dans la rue, nous savons tous ce qui les attend. Il y a  à peine une semaine, une fille qui sortait de l’école a failli être enlevée. C’est peut-être son père ou un étranger, la caméra de surveillance était malheureusement en panne. C’est le surveillant qui l’a sauvée.  Là c’est le danger de la rue.

A la maison, les enfants s’ennuient et les parents ne savent que faire. Indépendamment de cette promiscuité qui tend l’ambiance familiale, il y a le complexe de l’abandon et l’impossibilité de faire comme «les autres».

Un complexe qui divise et mine la société.  D’où la nécessité de préparer les lieux où les occupations qui rassemblent et qui resserrent les liens se trouvent à portée de main».

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