
Le Salon Petro Africa, tenu du 8 au 11 avril au Kram, s’est imposé comme un rendez-vous stratégique pour les acteurs du secteur énergétique africain. L’événement a rassemblé entreprises, investisseurs, experts et décideurs publics autour des défis et opportunités liés à la transition énergétique du continent.
Pendant quatre jours, les visiteurs ont assisté à des présentations couvrant divers secteurs de l’énergie (pétrole, gaz, énergies renouvelables) et découvert des technologies et services innovants. Ezzedine Khalfallah, consultant international en énergie, a souligné l’urgence d’accélérer la transition énergétique en Tunisie. Malgré des objectifs ambitieux — 35 % d’énergies renouvelables dans le mix énergétique d’ici 2030, 50 % en 2035 et 80 % en 2050 —, la contribution actuelle ne dépasse pas 5 %. Plusieurs obstacles freinent cette transition, notamment des difficultés techniques liées au raccordement des centrales, l’absence d’un régulateur indépendant du secteur de l’électricité, des incertitudes réglementaires et des problèmes d’accès au financement.
Le gouvernement tente de lever ces freins par des réformes et des restructurations des régimes énergétiques instaurés par la loi de 2015. L’objectif est de rattraper le retard accumulé et d’accélérer le développement des énergies renouvelables, levier essentiel pour surmonter les défis du secteur. En effet, la Tunisie est confrontée à un déclin de ses ressources en hydrocarbures et à une demande énergétique croissante, creusant un déficit énergétique qui a atteint 5,4 Mtep en 2024.
La dépendance aux importations est forte : 78 % des besoins en produits pétroliers et 70 % de ceux en gaz naturel sont couverts par l’étranger, principalement l’Algérie. La pointe de consommation électrique estivale a battu un record avec 4.888 MW en 2024, tandis que les subventions énergétiques dépassent les 7.000 MDT, représentant 62,5 % de la compensation budgétaire nationale et 6,5 % du PIB.
Les énergies renouvelables, une réponse aux défis énergétiques
L’intégration des énergies renouvelables dans le mix énergétique peut contribuer à réduire ces déficits, à alléger la facture énergétique et à améliorer la sécurité d’approvisionnement. Si les objectifs de 2030 sont atteints, les énergies renouvelables pourraient couvrir 11 % du déficit énergétique national. Elles permettraient également de diversifier les sources d’énergie, de diminuer les subventions publiques et de favoriser l’investissement et la création d’emplois, tout en répondant aux enjeux climatiques et aux engagements de la Tunisie en matière de développement durable.
Pour stimuler l’investissement privé, Ezzedine Khalfallah insiste sur la nécessité d’un cadre réglementaire clair et stable, d’incitations fiscales et financières (crédits d’impôt, subventions, tarifs de rachat garantis) et d’un environnement propice aux partenariats public-privé (PPP). L’accès aux financements verts, la simplification des démarches administratives et l’intégration des critères ESG dans les projets énergétiques constituent également des leviers essentiels.
Les réformes nécessaires pour relancer le secteur
Ali Gaaya, consultant en exploration et production pétrolières, propose plusieurs réformes pour faire du secteur de l’énergie un levier de croissance. Il insiste sur la nécessité de relancer l’exploration pétrolière en révisant le Code des hydrocarbures, devenu obsolète, et en améliorant la fiscalité pour exploiter des découvertes complexes. L’accélération du développement des énergies renouvelables est essentielle, notamment en simplifiant les procédures administratives et en renforçant la gouvernance du secteur. Il préconise également la modernisation du réseau électrique et le recours aux partenariats public-privé pour développer de nouvelles infrastructures.
Le développement du pétrole et du gaz de schiste nécessite un cadre réglementaire adapté afin d’assurer une exploitation responsable. Par ailleurs, la mise en place de capacités de stockage stratégique permettrait de mieux gérer les fluctuations des prix et de sécuriser l’approvisionnement du pays. Gaaya regrette que ces recommandations, formulées depuis des années, n’aient pas encore été appliquées.
Il appelle les autorités à engager des réformes ambitieuses et assure que les experts du secteur sont prêts à collaborer avec le gouvernement pour bâtir une politique énergétique plus efficace et durable. Ali Gaaya regrette que ces recommandations, formulées depuis plusieurs années, n’aient pas encore été prises en compte par les décideurs politiques. Il appelle les nouvelles autorités à accorder une attention prioritaire à ce secteur stratégique et assure que les experts de l’Association tunisienne du pétrole et du gaz (Atpg) restent disponibles pour échanger sur ces réformes avec le Parlement et le ministère de l’Industrie et de l’Énergie.
Le Salon Petro Africa a mis en lumière les défis majeurs du secteur énergétique tunisien et africain, ainsi que les solutions envisageables pour assurer une transition énergétique réussie. L’accélération des réformes et l’engagement des acteurs publics et privés seront déterminants pour garantir un avenir énergétique durable et sécurisé.