Accueil Culture Exposition collective « Murmures d’un jardin ancestral : Les jardins de Kairouan » à la Galerie Alain Nadaud : « Nous nous sommes réunis autour d’une nostalgie créatrice commune et de volonté de retour aux sources »

Exposition collective « Murmures d’un jardin ancestral : Les jardins de Kairouan » à la Galerie Alain Nadaud : « Nous nous sommes réunis autour d’une nostalgie créatrice commune et de volonté de retour aux sources »

Autant d’impressions fantasmées de ces jardins savamment organisés, qu’on imagine avec des figuiers offrant leurs larges feuilles d’ombre, des rosiers embaument l’air de leurs senteurs suaves, de  petits canaux d’eau limpide courant doucement, dessinant des arabesques entre les plantations et une fontaine de marbre blanc trônant au centre pour récolter tous ces murmures…

La Galerie Alain Nadaud, de l’espace Sadika Keskes, présente jusqu’au 20 avril l’exposition collective «Murmures d’un jardin ancestral : Les jardins de Kairouan», une immersion dans l’atmosphère mystique et historique des jardins des Aghlabides de Kairouan.

« Le mot ‘‘murmures’’ évoque une voix douce et discrète, presque imperceptible. Comme si les jardins eux-mêmes racontaient leur histoire à travers le temps. Il s’agit d’un dialogue intime entre le visiteur et la nature, où les arbres, les fleurs et les fontaines semblent chuchoter des souvenirs du passé », lit-on dans un texte présentateur de l’exposition.

Les œuvres exposées entre sculptures et peintures signées Taoufik Behi, Rabaa Skik, Emna Kahouaji et Abdellatif Behi, font écho à ces murmures, remontant à un temps révolu où trônaient majestueux les jardins de Kairouan. Avec la symbolique de leurs oasis et leur rôle dans l’histoire de la région, ces jardins sont restitués dans cette exposition comme des lieux physiques, mais aussi comme témoins silencieux d’un riche passé culturel et architectural.

Fondée au VIIe siècle, Kairouan est l’une des plus anciennes et des plus importantes villes de l’Islam. Ses jardins, véritables joyaux cachés, ont longtemps été des lieux d’échanges intellectuels et spirituels, abritant poètes, penseurs et savants. L’exposition met en lumière la splendeur de ces jardins où la rigueur géométrique se marie à la luxuriance des plantes, symbolisant l’harmonie entre ordre divin et profusion terrestre. Les jardins au temps des Aghlabides (800-909 ap. J.-C.) étaient un véritable reflet de l’ingéniosité arabe et de la richesse culturelle de cette dynastie. Ils témoignaient d’un savoir-faire avancé en matière d’hydraulique, d’urbanisme et d’esthétique islamique.

La prospérité de Kairouan à cette époque se traduisait aussi dans les aménagements urbains, dont ces jardins faisaient partie. La maîtrise de l’eau, un défi brillamment relevé par les Aghlabides face à l’aridité du climat en Ifriqiya, s’est manifestée par l’installation de bassins (encore visibles aujourd’hui) qui servaient à stocker l’eau de pluie et à l’acheminer vers la ville et les zones agricoles et des systèmes de norias (roues hydrauliques) et de canaux qui permettaient une irrigation régulière. Ces innovations ont donné lieu  à des jardins irrigués, rares dans des régions semi-arides : de véritables bouts de paradis.

Des paysages uniques dont les artistes tentent de restituer l’essence en traduisant leurs couleurs,  lumières, atmosphères, et autres sons paisibles, conférant des nuances et des formes aux bruissements des feuilles, au souffle du vent et aux vibrations de l’eau… Autant d’impressions fantasmées de ces jardins savamment organisés qu’on imagine avec des figuiers offrant leurs larges feuilles d’ombre, des rosiers embaument l’air de leurs senteurs suaves, de  petits canaux d’eau limpide courant doucement, dessinant des arabesques entre les plantations et une fontaine de marbre blanc trônant au centre pour récolter tous ces murmures…

« À travers cette exposition, nous vous invitons à un voyage hors du temps, dans l’âme d’un jardin qui porte en lui des siècles d’histoire, de culture et de spiritualité. Les jardins de Kairouan, cœur verdoyant de cette ville millénaire, sont bien plus que de simples espaces de repos et de contemplation : ils sont le reflet d’une civilisation, d’une quête de beauté et de perfection, où l’homme dialogue avec la nature », notent les organisateurs.

L’exposition rend également hommage à deux illustres artistes de Kairouan :  le peintre Hammadi Skik, père de Rabaa Skik, ainsi que le poète Hassine Kahouagi, père de Emna Kahouagi. « L’idée de l’exposition a germé dans la tête du grand chef décorateur de cinéma, également peintre et sculpteur, Taoufik Behi. Etant tous les 4 originaires de Kairouan, nous nous sommes réunis autour d’un sentiment commun de nostalgie créatrice et de volonté de retour aux sources », nous dit Rabaa Skik qui est artiste visuelle, graveuse de formation et d’ajouter : « Emna et moi-même nourrissions aussi l’envie de travailler sur Kairouan d’autant plus que nos deux pères lui ont, de leur vivant, sans cesse, rendu hommage à travers leurs œuvres ».

Rabaa s’est intéressée à l’olivier, un arbre emblématique de Kairouan qu’elle articule dans différentes dimensions/états. Elle expose aussi une série représentant les 4 saisons à travers des figures de nymphes arborant chacune d’autres emblèmes de la ville. On reconnaît là la signature de l’artiste qui a souvent travaillé autour du féminin. « Je me suis aussi inspirée de l’œuvre de mon père en citant ici et là certaines de ses figures et autres éléments représentatifs de son travail », ajoute encore l’artiste. 

Emna Kahouaji s’éloigne un peu du thème des jardins ancestraux et s’intéresse à d’autres éléments du patrimoine de Kairouan, à l’instar du Coran bleu dont elle s’inspire pour rendre hommage et à son père et à sa ville natale. « Je suis partie d’un texte de mon père Hassine Kahouaji où il honore Kairouan, que j’ai calligraphié à l’encre dorée sur un tissu en lin bleu, à la manière du «manuscrit bleu», dont une partie se trouve au musée de Raqqada », note l’artiste qui expose également des peintures sur toile.

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