Accueil Culture « Des couleurs plein les yeux » à la galerie Saladin : « La peinture parle en silence et il faut un œil pour l’entendre… »

« Des couleurs plein les yeux » à la galerie Saladin : « La peinture parle en silence et il faut un œil pour l’entendre… »

Le travail que présente Moncef Guiga est éclectique avec des paysages et des aménagements extérieurs entre souk, port, terrasse, façades, mais aussi des natures mortes et autres figures humaines (féminines pour la plupart). Le traitement est aussi varié et Guiga semble expérimenter différentes manières de faire entre figuration, touches impressionnistes, expressionnisme, approche abstraitisante et nouvelle figuration. 

Dans la lignée de Léonard de Vinci, de nombreux créateurs ont, eux aussi, cherché à comprendre les mystères du monde et les lois qui le régissent. De même, les scientifiques, biologistes, médecins, ingénieurs, mathématiciens… se sont rapprochés du monde de l’art que ce soit  pour en faire un allié et un support pour leurs recherches scientifiques, pour s’inspirer de leurs travaux pour accoucher d’intéressantes propositions picturales ou pour l’aborder comme un refuge, une sorte de compensation…  

On parle souvent du caractère artistique du chirurgien esthétique, comparant son adresse chirurgicale à la virtuosité que manifeste le peintre ou le sculpteur, maniant habilement son pinceau ou son burin.

Mais à la différence de l’artiste, le chirurgien ne peut se permettre la moindre erreur. Son geste doit être maîtrisé, précis et définitif, même si, dans certaines situations, il peut être amené à effectuer des ajustements en cours d’intervention pour atteindre le résultat le plus abouti possible. L’acte peut donc, à la manière d’un travail artistique, s’allonger, nécessitant parfois de petites retouches, des corrections ou des modifications des tissus. ( Même si le patient d’aujourd’hui, mieux informé et plus exigeant, attend une intervention unique, sans approximations ni besoin de revenir au bloc opératoire sous anesthésie).

Pourtant, à l’image de la création artistique, la chirurgie esthétique comporte une part de spontanéité. Sans être improvisée, l’opération peut intégrer des variations, des ajustements subtils dictés par l’instant, car chaque corps est différent, chaque demande est singulière. Le but n’est pas de suivre une inspiration artistique propre au chirurgien, mais de réaliser avec justesse et sensibilité le souhait du patient. De même que pour la démarche du chirurgien qui reste rigoureuse en s’adaptant à la frontière entre science, technique et écoute de l’humain, l’art est aussi rigoureux et nécessite discipline et grande technicité.

Moncef Guiga, un praticien de grande notoriété, a manié avec minutie le bistouri durant 42 ans de pratique de la chirurgie esthétique et réparatrice, trouvant écho à son geste et sa créativité dans la pratique de l’art. Un monde qui ne lui est pas étranger, lui qui a grandi auprès d’une maman artiste. «J’ai découvert que je pouvais exprimer, par la couleur et les formes, des choses que je ne pouvais pas dire autrement, des choses pour lesquelles je n’avais pas les mots. En fait, la peinture parle en silence et il faut un œil pour l’entendre…», affirme-t-il. La peinture, qu’il côtoyait durant ses heures perdues, lui est aujourd’hui totalement permise depuis sa paisible retraite à Hammamet. Un plaisir auquel l’homme s’adonne en solitaire et dont il se plaît à partager les fruits. Il a commencé à exposer en Tunisie depuis 1994 quasi chaque année jusqu’en 2004 pour reprendre en 2008, 2011, 2019, 2022, 2024 et actuellement avec «Des couleurs plein les yeux», un titre qui suggère clairement la pléthore de couleurs et de lumières que l’on peut y rencontrer.  

Le travail qu’il présente est éclectique avec des paysages et des aménagements extérieurs entre souk, port, terrasse, façades, mais aussi des natures mortes et autres figures humaines (féminines pour la plupart ). Le traitement est aussi varié et Guiga semble expérimenter différentes manières de faire entre figuration, touches impressionnistes, expressionnisme, approche abstraitisante et nouvelle figuration. «Pour moi, les impressionnistes sont les maîtres de la couleur et de la lumière. La vie sans couleur et sans lumière appartient à un autre monde… Et la beauté rend heureux !», souligne-t-il en parlant de ses inspirations. 

« Je me veux, sans prétention, ajoute-t-il, le témoin des différents courants artistiques de notre époque sans renier la tradition, ce qui me donne le sentiment de faire une œuvre en perpétuelle évolution ». Il aspire à faire de ses peintures «à la fois l’expression d’une émotion et le témoignage d’une réalité».

Pour ce qui est de sa manière d’aborder la toile, il dit commencer par une esquisse, un dessin et surtout se concentre sur l’équilibre général. «J’accorde beaucoup d’importance à la relation entre les teintes et les formes. Et après, j’applique la peinture de façon à donner soit du volume (avec la peinture à l’huile), soit des aplats (avec l’acrylique). Une fois le processus de peinture engagé, je relâche le contrôle pour qu’apparaisse l’œuvre». Ce qui compte au final pour lui, c’est de créer un espace dans lequel l’image lui appartient entièrement.

Concernant le rapport entre l’acte chirurgical et la peinture, Guiga note que ses connaissances en anatomie ont conditionné sa manière de voir le corps, les visages, l’harmonie du corps, mais que le véritable dénominateur commun entre les deux est le fait que l’esprit soit sans cesse en alerte.

Et de conclure : «Au final, j’ai eu une chance inouïe, celle de posséder deux passions, ce qui me permet de garder la tête hors de l’eau. Dans le secret du bloc opératoire, et dans le secret de mon atelier, j’ai pu comprendre à quel point la passion est nécessaire. Si j’ai un mérite, c’est de conserver mon désir et de trouver un sens à ce que je fais». 

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