
Les relations tuniso-chinoises ont connu, ces dernières années, une montée en puissance discrète mais significative. D’autant que Pékin multiplie ses partenariats en Afrique dans le cadre de l’initiative «Belt and Road» (Ceinture et Route), tandis que Tunis cherche à diversifier ses alliances économiques au-delà de ses partenaires traditionnels européens et maghrébins. Mais pour transformer cette proximité en véritable levier stratégique, la Tunisie doit définir des priorités claires.
La Presse -— Ports, routes, zones industrielles : Pékin investit massivement dans les infrastructures du continent africain. La Tunisie, à la croisée de la Méditerranée et du Maghreb, peut tirer profit de cette dynamique. Mais pour éviter l’éparpillement et la dépendance, il lui faut définir clairement ses priorités.
Premier axe : les infrastructures. La modernisation du port de Radès, l’essor du hub aéroportuaire d’Enfidha ou encore le développement de corridors logistiques pourraient bénéficier d’une expertise et de financements chinois. À condition que ces projets s’inscrivent dans une vision nationale de compétitivité et de connectivité régionale.
Deuxième axe : l’énergie. Avec un ensoleillement qui s’étale sur 12 mois ou presque, la Tunisie a le potentiel de devenir un champion solaire. La Chine, leader mondial des technologies photovoltaïques et éoliennes, peut y jouer un rôle stratégique. Investir ensemble dans la transition verte permettrait d’allier sécurité énergétique et attractivité économique.
Troisième axe : le tourisme et les échanges humains. Attirer une partie de la clientèle chinoise aisée suppose des efforts ciblés : vols directs, guides sinophones, moyens de paiement adaptés et campagnes digitales sur WeChat (réseau social chinois le plus en vogue) ou Douyin. Au-delà du tourisme, les échanges universitaires et culturels renforceraient l’image de la Tunisie comme partenaire fiable et ouvert.
Quatrième axe : l’industrie et le numérique. La Tunisie peut devenir une plateforme de coproduction entre l’Europe, l’Afrique et la Chine, notamment dans l’assemblage automobile, l’électronique ou l’outsourcing IT. Pékin, qui cherche à internationaliser ses champions technologiques, pourrait trouver à Tunis une base compétitive et dotée de compétences solides.
La coopération tuniso-chinoise ne doit cependant pas se limiter à la recherche d’investissements. Elle doit reposer sur des partenariats équilibrés, générateurs d’emplois locaux et de transferts de savoir-faire. La Chine privilégie les pays qui savent fixer leurs priorités, de l’avis de plusieurs géostratèges.
En clarifiant sa feuille de route, infrastructures, énergie verte, tourisme et numérique, la Tunisie peut transformer sa relation avec Pékin en levier de croissance durable. Encore faut-il que ce partenariat s’inscrive dans une logique de souveraineté et non de dépendance.