«L’un des grands problèmes qui se pose au secteur concerne la vieille loi sur la concurrence économique, qui remonte à 1942 et qu’il va falloir impérativement réviser…A cela s’ajoute le contrôle dans ce domaine qui était et est largement insuffisant et mal fait, ignorant tout un processus de fabrication et des textes réglementant la profession… »

Après avoir annulé la fameuse grève des boulangeries, prévue le 15 novembre et qui a fait couler beaucoup d’encre et fait très mal dans l’esprit des Tunisiens, la tension monte encore une fois entre les professionnels du secteur et le ministère de l’Industrie et du Commerce après avoir annoncé de nouvelles décisions à la date du 13 novembre 2020, qui exigent le changement de la forme des baguettes.

Face à ce nouveau bras de fer, le Groupement professionnel de l’industrie de la boulangerie et de la pâtisserie relevant de la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie (Conect) entame aujourd’hui, jeudi 19 novembre, un sit-in devant le siège du ministère de l’Industrie et du Commerce pour protester contre ces nouvelles mesures et demander au ministère de la tutelle de revoir, voire de renoncer aux décisions jugées «déraisonnables».

Où va-t-on ?

Dans une déclaration accordée à La Presse, le président du Groupement professionnel, Abdelkrim Ben Mehrez, indique que les professionnels du secteur ont été surpris par cette décision qui tombe comme un coup de massue à l’heure où les discussions sont toujours en cours avec le ministère de tutelle sur un certain nombre de points, dont notamment la classification et la situation des boulangeries, la loi sur la concurrence économique, le problème de la subvention de la farine en Tunisie… et bien d’autres revendications.

«Alors que nous sommes en pleine discussion pour réformer ce secteur, le ministère du Commerce a décidé de renverser la table et de faire beaucoup plus, face à une situation qui n’est plus rassurante pour le secteur de la boulangerie moderne. Que signifie le changement de la forme des baguettes pour la réduire à 20cm, à l’heure où tout le monde sait que le matériel actuellement utilisé par les boulangeries modernes ne répond pas à ce critère ? A cela s’ajoute la décision de l’approvisionnement en matière première uniquement auprès des minoteries…Notre groupement refuse catégoriquement ces décisions paralysantes, qui affecteront négativement notre avenir et qui ne sont pas du tout adaptées à la réalité de la situation», précise-t-il.

M. Ben Mehrez ajoute que si le gouvernement maintient sa position et ces décisions, et si elles se concrétisent, elles provoqueront la faillite de pas moins de 1.300 boulangeries modernes, qui devraient fermer leurs portes, et donc, la perte d’environ 130 mille postes d’emploi. «Ce sit-in vise ainsi à exercer une pression sur le gouvernement pour annuler immédiatement ces décisions, car dans le cas contraire, nous aurons recours au tribunal administratif et y déposerons une plainte afin d’annuler ces décisions qui vont nous détruire», souligne-t-il.

Revoir la législation

Sur un autre plan, M. Ben Mehrez affirme que l’appel à ce sit-in émane, également, des boulangeries qui exercent dans le cadre du respect intégral de la loi et qui s’approvisionnent en farine au prix de 52 dinars le quintal sans bénéficier de la compensation alors que d’autres parties s’approvisionnent en farine au prix de 6 dinars seulement le quintal en plus de la compensation dont elles bénéficient. Dans ce même cadre, il indique que le groupement dénonce les déclarations irresponsables du président de la Chambre nationale des boulangeries subventionnées en qualifiant à chaque fois les boulangeries modernes d’anarchiques alors qu’elles travaillent dans un cadre organisé et dans le respect de la loi et des normes de qualité les plus exigeantes sans bénéficier de la compensation. « Si rien n’est fait dans ce domaine, force est de constater que chaque boulanger gère son entreprise comme s’il était sur une corde raide et qu’il ne dispose d’aucune garantie pour son avenir. Pour ce faire, tout le monde doit se réunir autour de la même table de discussion pour la réorganisation du secteur sur la base de la transparence et de la bonne gouvernance », souligne-t-il.

Abdelkrim Ben Mehrez a, également, abordé un autre sujet de désaccord lié aux questions du retard de la législation par rapport à l’évolution rapide de ce secteur, aggravant ainsi l’inquiétude des boulangers. «L’un des grands problèmes qui se pose à ce secteur concerne la vieille loi sur la concurrence économique qui remonte à 1942 et qu’il va falloir impérativement réviser… A cela s’ajoute le contrôle dans ce domaine qui était et est largement insuffisant et mal fait, ignorant tout un processus de fabrication et des textes réglementant la profession… Du coup, il est grand temps de contrôler tout cela et d’y apporter la plus grande transparence possible en légiférant avec la participation active des parties concernées par cette affaire», indique-t-il, ajoutant que les professionnels du secteur ne comptent pas lâcher prise, car c’est leur avenir qui est en jeu.

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