M. RIDHA CHIBA, CONSEILLER INTERNATIONAL EN EXPORTATION à la presse: «Créer la richesse et engendrer des emploi pour les jeunes»

Avec l’avènement de la dixième année de l’anniversaire de la révolution de la dignité et de la liberté en Tunisie et les diverses manifestations sociales, la situation économique ne cesse de se dégrader davantage avec un marasme dans tous les domaines, un accroissement du taux de chômage, un endettement avoisinant le PIB, des grèves dans la plupart des régions du pays, l’injustice  sociale qui règne et déclenche un fossé considérable faisant disparaître la classe moyenne et   émerger une large frange marginalisée de la population dont le mécontentement est exprimé à travers les  manifestations sociales  dans différents domaines professionnels des diverses classes démunies et surtout des hauts diplômés, dépourvus d’emplois, manifestant avec entrain et demeurant  toujours sans aucun espoir malgré les promesses des dirigeants gouvernementaux. A cet effet, pour mieux comprendre la situation économique et sociale dans le pays, nous avons contacté M. Ridha Chiba, conseiller international en exportation, pour nous expliquer davantage la situation difficile par laquelle passe la Tunisie à l’heure actuelle et les véritables problèmes que traversent les citoyens tunisiens en pleine pandémie du Covid-19. Interview.

Comment évalue-t-on la situation économique et sociale actuelle en Tunisie?

La situation économique et sociale en Tunisie demeure extrêmement frêle et embarrassante. Une fragilité due à un effritement politique, une dissension entre les trois pouvoirs, un mécontentement manifesté à travers les mouvements sociaux nocturnes et diurnes qui ont pris de l’étendue et qui affectent véritablement la stabilité et empêtrent les autorités, l’injustice sociale, la fermeture d’un grand nombre de sociétés, principalement industrielles, et la mise en chômage forcé  de leurs employés dont la majorité n’ont pas perçu leurs émoluments jusqu’à ce jour. Tout cela a aggravé davantage la situation et a bouleversé absolument les deux domaines social et économique.

Comment juge-t-on les derniers mouvements sociaux qui ont eu lieu récemment

Evidemment, toutes les manifestations qui se sont déroulées ces derniers temps ont été le résultat d’un cumul des crises politiques, sociales et économiques que connaît notre pays. Toutefois, je suis catégoriquement contre les manifestations nocturnes parce qu’elles se terminent assurément par des débordements finissant souvent  par des agressions et des attaques  aboutissant à des confrontations multiples et occasionnant  des préjudices matériels et moraux appréciables,  nuisant certainement à tout l’ensemble de la société tunisienne sans aucune exception.

En fait, les enfants qui ont participé à ces manifestations sont les victimes des différentes politiques éducationnelle, sociale, professionnelle, sportive, culturelle, etc., menées par les divers gouvernements qui se sont succédé tout au long de plusieurs années en Tunisie, caractérisées par la nonchalance des autorités et leur manque de volonté pour remédier à une situation très critique, principalement  l’absence d’une politique  en amont préconisant des stratégies à court , moyen et long termes en matière professionnelle, sportive et culturelle pour le grand nombre d’enfants qui quittent l’école chaque année  et dont le nombre dépasse à vrai dire le chiffre des 100.000.

Comment peut-on remédier à la situation des enfants et des jeunes Tunisiens marginalisés?

D’emblée, je réponds que seule une politique profonde basée sur des options éducationnelle, professionnelle, culturelle, sportive, des conditions matérielles, des moyens humains et financiers pourrait remédier à cette situation.  A mon avis, il  faut donner plus d’importance  à l’éducation nationale, ses différents programmes qui doivent aller de pair avec les objectifs escomptés et la stratégie de l’Etat préconisée à long terme ainsi que  la gratuité de l’enseignement  pour les différentes catégories démunies de la société.

L’enseignement doit devenir absolument un ascenseur social pour   tous les enfants du peuple tunisien en leur donnant la même chance pour exceller. L’Etat tunisien doit miser sur les jeunes en investissant et en augmentant les budgets des ministères de l’Education nationale, de la Formation, de la Jeunesse et des Sports en créant davantage de maisons de jeunes dans toutes les régions de la Tunisie,  et en les dotant de tous les moyens humains et financiers et stimulant les jeunes créateurs à manifester leurs talents et extérioriser leur capacité et booster leurs initiatives.

Egalement, il faut encourager la création de salles de cinéma, de salles de théâtre, de moyens de divertissement et inciter les enfants et les jeunes à fréquenter les bibliothèques et les musées. Bref, il faut créer un milieu éducationnel, professionnel, culturel et sportif capable de faire éloigner les enfants et les jeunes de tous les maux et leur permettre de forger leur personnalité et leur avenir conformément à leurs désirs et aux besoins du pays.

Egalement, il faut encourager la formation professionnelle  et investir davantage dans les créneaux créateurs de richesses et stratégiques ayant une forte valeur ajoutée tels que les secteurs  industriel, agroalimentaire numérique, l’économie verte, solidaire pour créer la richesse et engendrer des  emplois  pour les jeunes afin de les stabiliser, les motiver  et leur permettre de planifier leurs différentes étapes de carrière. C’est ainsi que  l’Etat peut bannir toutes les mauvaises conditions et toutes les altérations qui ne peuvent se traduire que par des sensations anormales et aberrantes  qui entravent assurément  l’atteinte de la qualité de la vie escomptée à laquelle aspirent tous les Tunisiens.

A cet effet, le célèbre écrivain français Voltaire dit à propos du travail ‘’Le travail éloigne de nous trois grands maux : l’ennui, le vice et le besoin’’.

Quels sont les défis économiques et financiers ?

En fait, plusieurs défis attendent le gouvernement Mechichi entre autres:

A l’échelle économique, le nombre des entreprises fermées avec leurs ouvriers licenciés, le taux de chômage qui s’amplifie davantage, la situation catastrophique de plusieurs secteurs tels que  le tourisme, l’industrie, le pétrole, le phosphate et autres dans une ambiance très délicate caractérisée par la propagation du Covid-19 et ses répercussion très néfastes sur la société tunisienne.

A l’échelle  financière, l’endettement de l’Etat vis-à-vis des instances bancaires nationales et internationales dépassent les 100.000 milliards sans qu’ils aient été exploités rationnellement dans des projets créateurs de richesse et d’emploi. Le déficit budgétaire de l’Etat, le taux d’inflation  qui avoisine les 6%, la recherche de ressources pour financer le nouveau budget 2021 évalué à 51, 8  milliards de dinars , la politique adoptée par l’Etat en matière de fiscalité qui nuit véritablement aux classes démunies tel que le paiement des vignettes qui demeure dépendant aux paiements des obligations fiscales de la dernière année.

A l’échelle sociale, le chômage qui  s’est  accentué considérablement  dans les secteurs touristique, industriel et les professions libérales. Les manifestations fréquentes des docteurs et des hauts diplômés, les différentes conventions signées entre l’Ugtt et les anciens gouvernements demeurant toujours sans application, les mouvements contestataires des régions déshéritées et des classes démunies, l’injustice sociale  qui enregistre des  inégalités dans le pays et qui marginalise une large frange de la population, tout cela rend de plus en plus la tâche du gouvernement plus délicate pour apaiser la tension et répondre aux différentes attentes du peuple tunisien.

Comment peut-on remédier à tous les problèmes en suspens ?

A la lumière de ce qui précède, il demeure impérieux et pressant de procéder aux actions suivantes:

Activer l’élection de la Cour constitutionnelle et  des instances démocratiques, telles que  l’Instance de la communication audiovisuelle, l’Instance de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption.  Imposer le prestige de l’Etat en  appliquant la loi en vigueur pour tous ceux qui nuisent aux biens publics et privés  et arrêtent volontairement certains domaines  importants et stratégiques en utilisant des méthodes aberrantes et déraisonnables, telles que la fermeture des vannes de pétrole, de gaz, d’eaux et freinent la production du phosphate  ou tout autre créneau stratégique.

Alléger le large fossé qui s’amplifie davantage entre la classe aisée et les classes démunies en vue de mieux répartir la richesse du pays d’une manière plus équitable. Créer les  meilleures conditions sécuritaires, financières et fiscales pour booster les opérateurs locaux et étrangers à investir davantage dans des créneaux créateurs de richesses et ayant une forte valeur ajoutée. Combattre inlassablement le commerce parallèle, le dumping et la spéculation qui nuisent véritablement à l’économie nationale. Changer la monnaie pour récupérer la grande masse  qui circule en dehors de la Banque centrale qui  avoisine 10.000 milliards tunisiens.

Réorganiser les entreprises nationales, telles que la Rnta, la Compagnie des phosphates de Gafsa, Tunisair sur des objectifs préalablement préconisés en leur assurant une meilleure planification, une excellente organisation, une direction compétente et un contrôle rigoureux à tous les niveaux tout en  leur assurant toutes les conditions humaines,financières, matérielles et procédurales requises en vue de réaliser les résultats probants escomptés. Revoir toutes les taxes exorbitantes qui affectent les classes démunies et préconiser une politique fiscale souple tendant à encourager les entreprises et les personnes à payer leurs dûs fiscal antérieurs.

Détenir en mains tous les créneaux stratégiques, tels que le bâtiment.

Et entamer dès à présent la construction de nouveaux projets tels que des hôpitaux, des stades, des maisons sociales décentes pour ceux qui n’en possèdent pas, pour entraver l’accaparation de ce domaine par une frange  d’opérateurs parce que, en fait, quand le bâtiment va, toute l’économie va. Résoudre tous les problèmes des régions dans le cadre d’une stratégie globale que le gouvernement doit préconiser dans le cadre d’options économique, sociale, culturelle et sportive et non pas avec de petits groupuscules qui ne représentent que des intérêts particuliers.

Créer les meilleures conditions sociales en établissant des rapports avec l’Ugtt, l’Utica et tous les autres organismes représentatifs des fédérations syndicales sectorielles en vue de sauvegarder l’intérêt général de la Tunisie.

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