Ramadan arrive à grands pas. Ce mois sacré est le signe d’une consommation «électrique» et une aubaine pour les commerçants. Le gros des dépenses et des achats s’effectue lors de ce mois. Les familles tunisiennes vivent ces jours-ci au rythme d’une dynamique assez particulière, qu’elles respectent avec minutie.
Ramadan 2022 ne déroge pas à la règle dans la mesure où, au début du mois sacré et même bien avant, nos marchés des produits alimentaires (grandes surfaces, supérettes ou épiceries) deviennent des points d’attraction. La demande des ménages pour certains produits alimentaires croît remarquablement durant ce mois. Un petit tour nous a permis de constater l’affluence accrue et la population dense déterminée à s’investir davantage. Une population conviée à toutes les ruses commerciales. Un mois, durant lequel, la frénésie d’achat s’accapare des consommateurs. Une frange importante de la population franchit sciemment le seuil de ce que sa bourse peut habituellement tolérer.
L’Etat, lui, se prépare activement afin de garantir les meilleures conditions d’un jeûne «serein» et d’assurer un approvisionnement régulier, et en grande quantité, dans tous les points de vente.
Une virée dans les marchés de la capitale et les grandes surfaces, le tableau offert est le suivant : des clients dépités incapables d’anticiper sur les premiers jours de Ramadan avec ces prix de folie, prohibitifs. D’autres sont ravis de découvrir l’abondance des étals, bien approvisionnés en différentes marchandises indispensables durant ce mois sacré. «On trouve tout ce qu’on veut ici sauf les produits qui sont toujours en pénurie comme la farine, la semoule ou l’huile subventionnée. Les prix aussi sont accessibles et tout le monde y trouve son compte», témoigne une mère de famille.
Néanmoins, la majorité écrasante de la population (de la classe moyenne et défavorisée) affirment que le mois de Ramadan est signe de cherté et de spéculation : un duo infernal qui impose sa loi aux ménages. «Cette année encore, les prix des viandes, légumes et fruits ont pris l’ascenseur», se désole un père de famille.
Nous avons échangé avec quelques clients sur la flambée des prix des produits de consommation, ils ont tous, à l’unanimité, affirmé que Ramadan est malheureusement le mois de toutes les spéculations qui enflamment les marchés. «Chaque année c’est la même rengaine. Les commerçants s’adonnent à la spéculation sous le regard indifférent des pouvoirs publics», se désole un père de famille. «La paupérisation du peuple est en marche dans un pays qui devrait garantir l’autosuffisance alimentaire avec des prix abordables pour toute la population», poursuit-il.
Une situation devenue récurrente, à l’approche de chaque mois de Ramadan, les prix des produits alimentaires de base s’envolent sur le marché, les achats impulsifs se font plus par tradition que par nécessité.
Du côté du ministère de l’Agriculture, les préparatifs du mois de Ramadan vont bon train. Huit points de vente du producteur au consommateur ont été ouverts depuis hier et jusqu’au 3 avril prochain à Bizerte, Tunis, Manouba, Sousse, Sidi Bouzid, Kasserine, Médenine et Sfax pour accueillir les clients avides de faire les emplettes du Ramadan avec des produits frais, à des prix raisonnables. C’est l’Utap qui organise cette initiative pour contribuer à faire face à la hausse des prix et rapprocher les produits agricoles des consommateurs.
Cet avant- goût du mois de Ramadan laisse entrevoir que la participation des collectivités locales à ces préparatifs a fait qu’ils soient accomplis avec beaucoup plus de sérieux qu’auparavant.
Consommer à flot ou acheter
à profusion
Les consommateurs sont de plus en plus nombreux, dans les marchés ou les points de vente, à faire le ravitaillement pour Ramadan, un mois sacré devenu synonyme de fièvre acheteuse. Certains commerçants remarquent ces achats impulsifs, des achats souvent faits par tradition même si les prix de certains aliments ne sont pas nécessairement à la portée de tous. Ces excès sont dus à l’absence d’une culture de la consommation. «Certains citoyens font de ce mois un mois de consommation irresponsable, irrationnelle. Le stockage des aliments est une mauvaise habitude qui peut créer des dysfonctionnements sur les marchés». Ce problème est certes récurrent, mais tant qu’on n’a pas organisé nos marchés de façon transparente et claire, ce phénomène va aggraver la situation tout au long du mois de Ramadan, essentiellement durant les premières semaines où l’offre d’un certain nombre de produits augmente et où certains lobbies en profitent pour pouvoir, par effet d’aubaine, réaliser des surprofits induits durant cette période. Pour y remédier, il faut que les circuits de distribution soient transparents et mieux organisés. Le mode de consommation durant le mois sacré influe énormément sur le marché, il peut même être à l’origine du gaspillage.
Approvisionnement normal
L’approvisionnement du marché en produits alimentaires se fera en quantités suffisantes durant le mois de Ramadan 2022. D’après le ministère de l’Agriculture, le volume de la production des viandes rouges a atteint, au cours du mois saint 2021, le seuil de 12,3 mille tonnes, de même pour le lait et dérivés dont les quantités sont estimées à 80 millions de litres collectés, outre un stock de 27 millions de litres de lait stérilisés. La production de viande blanche s’élève à 12 mille tonnes et celle de poulets de chair réfrigérés à 656 tonnes.Par ailleurs, les stocks des œufs de consommation s’élèvent à 20 millions d’unités, avec une prévision de 46 millions d’œufs supplémentaires qui seront produits au mois d’avril. Le département de tutelle a évalué la production d’escalope de dinde pour le mois de mars 2022 à 6,7 mille tonnes, soit une hausse de 7% par rapport à la même période de l’année dernière, sans compter le stock congelé estimé à 974 tonnes. Pour ce qui est des légumes, le stock disponible de pommes de terre s’élève à 56 mille tonnes, ceux des piments à 27 mille tonnes, 23 mille tonnes pour les tomates, 15 mille tonnes pour les oignons et d’autres quantités de légumes à feuille (production hivernale).Pour les fruits, la production nationale sera disponible en quantités suffisantes, dont les dattes (entre 40 et 50 mille tonnes), en plus des cinq mille tonnes de pommes automnales, 9,5 tonnes d’oranges maltaises, 9,2 tonnes de fraises…