A l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse célébrée chaque année le 3 mai, notre confrère Nour El Houda Ben Mrad a sondé les chiffres qui tracent les contours de la profession de journaliste en Tunisie. Ci-après les principales constatations du dépouillement des chiffres et données.
Selon les données recueillies auprès de la commission indépendante d’octroi de la carte de journaliste professionnel, le nombre de titulaires de cette carte de presse ne cesse d’augmenter dans notre pays passant de 1.578 en 2020 à 1.861 en 2022. (A titre d’exemple ce nombre est de 2.459 journalistes au Maroc et plus que 4.000 en Algérie).
Une profession à dominance féminine
Selon l’enquête menée par notre confrère, le métier confirme sa tendance féminine. En effet, à part les 12 cartes honorifiques attribuées aux journalistes en retraite, sur les 1.871 de cartes attribuées aux journalistes en exercice :
– 997 ont été accordés à des femmes soit 53,6% du nombre total de journalistes tunisiens. (Mais malgré cette dominance féminine dans le secteur, l’accès des femmes journalistes aux postes de décision dans les médias tunisiens ne dépasse pas les 15%).
– 864 des cartes de journalistes professionnels ont été attribuées à des hommes, soit quelque 46,4%.
– L’Etablissement de la Radio nationale tunisienne demeure le plus grand employeur de journalistes dans le pays avec 335 employés dans les dix chaînes de radio publiques.
* 174 journalistes dont 119 femmes et 55 hommes travaillent à la radio tunisienne à Tunis (Radio nationale, Radio jeunes, RTCI, Radio culturelle et Radio Zitouna).
* 161 journalistes travaillent dans les radios régionales de Monastir, Sfax, Gafsa, Tataouine et Le Kef dont 103 femmes et 58 hommes.
-225 journalistes travaillent à l’Etablissement de la Télévision tunisienne dont 100 hommes et 125 femmes.
– 138 journalistes travaillent à l’agence Tunis Afrique Presse (87 femmes et 51 hommes).
– 181 journalistes travaillent dans les radios privées (107 femmes et 74 hommes).
– 143 journalistes travaillent dans les télévisions privées (78 hommes et 65 femmes).
– 224 journalistes travaillent dans les journaux en papier (118 hommes et 106 femmes). Ce chiffre confirme la baisse de l’employabilité dans les journaux en papier qui faisaient travailler, en 2020, 255 journalistes.
Ce constat est dû à la disparition entre-temps de nombreux titres dont Al Bayane, Les Annonces, Akhbar el Joumhouria, Al Moussawar et Tunivisions…
– 195 journalistes travaillent dans la presse électronique (103 femmes et 92 hommes).
Les freelances envahissent le métier
Comme dans tous les secteurs, les façons de travailler sont en train d’évoluer très rapidement dans le domaine du journalisme en Tunisie, et le freelancing est en plein essor. C’est ce qui explique l’augmentation exponentielle du nombre de journalistes freelances (indépendants dans l’exercice du métier, qui n’ont pas de contrat de longue durée avec un employeur particulier et qui sont rémunérés pour chaque article qu’ils rédigent ou chaque reportage qu’ils produisent.
Leur nombre est ainsi passé de 146 journalistes freelances en 2020 à 420 en 2022 (207 femmes et 213 hommes).
Cette évolution du nombre des freelances peut aussi s’expliquer par le fait que la commission indépendante d’octroi de la carte de journaliste professionnel et le Syndicat national des journalistes tunisiens ont permis à des journalistes professionnellement vulnérables ou en chômage (à cause de la fermeture de leur support) d’obtenir le renouvellement de leur carte de presse en tant qu’indépendant et de disposer ainsi de meilleures chances de reprendre une activité régulière.
La presse sportive toujours à très grande dominance masculine
Contrairement à la tendance générale du secteur du journalisme en Tunisie, la presse sportive demeure toujours à dominance masculine. 456 personnes y travaillent dont 420 hommes et seulement 36 femmes) :
*153 journalistes professionnels.
*135 journalistes sportifs professionnels
*77 photographes
*67 correspondants
*24 techniciens
De nombreux journalistes non déclarés
Malgré leur importance pour l’étude du secteur de la presse en Tunisie, les données de la commission indépendante d’octroi de la carte de journaliste professionnel ne reflètent pas la réalité du nombreux de travailleurs dans le secteur, car de nombreuses entreprises de presse continuent à employer des jeunes journalistes pigistes sans aucune déclaration, ni au fisc ni aux organismes de protection sociale et sans leur demander de leur octroyer une carte professionnelle qui garantirait leur droit à un salaire convenant à la convention collective qui régit ce secteur.
Nour El Houda Ben Mrad