Le charançon rouge constitue un fléau qui a porté atteinte à des centaines de palmiers dans le Grand-Tunis. En effet, cet insecte n’a pas été totalement éradiqué dans les quatre gouvernorats du Grand-Tunis, à savoir Tunis, Ariana, Ben Arous et La Manouba. Il s’est étendu à Bizerte et à Nabeul et dernièrement à Zaghouan. La situation est devenue très grave pour la sécurité alimentaire en Tunisie. Tout cet écosystème risque de disparaître si on ne prend pas les dispositions nécessaires d’urgence.
Dans ce contexte, Emna Charfi, membre de l’association des amis du belvédère, a déclaré que «nous avons participé à une marche des palmiers pour la lutte contre le charançon rouge des palmiers récemment. L’association des amis du belvédère est pour l’initiative de rassembler une coalition citoyenne pour la lutte contre le charançon rouge. En effet, ce fléau ravage notre pays depuis 2011 et malheureusement les autorités font la sourde oreille ». Notre interlocutrice ajoute « qu’à peu près 25% des palmiers d’ornement ont été attaqués. Notre crainte est que si ce fléau arrive au sud, nos palmiers dattiers seront endommagés. Ce serait une grande catastrophe aussi bien économique qu’écologique. Imaginons le sud sans dattes. Ce serait une perte de plus de mille milliards de dinars dans la balance économique, mis à part toutes les répercussions sur les emplois dans l’écosystème oasien. Appel aux autorités pour prendre les choses en main, et prendre attache avec des pays qui ont déjà subi ce fléau, par exemple l’Arabie Saoudite où l’économie est dévastée sur le plan des dattes ».
De son côté, Mohamed Ikbal Souissi, président de la Chambre nationale de l’agriculture biologique et du tourisme vert, chargé du bureau national du Synagri pour ce dossier, a révélé « qu’en 2017, un séminaire international a été réalisé à Tunis en partenariat avec l’ambassade des Etats-Unis sur le thème du charançon rouge et son éradication. Les plus grands chercheurs dans le monde ont confirmé que cet insecte a des préférences pour certaines variétés de palmiers avec comme exemple en Tunisie le canarien 6 mais dans le cas où il ne trouve pas cette variété, l’insecte attaque les wachintoniens (palmiers d’ornement), les dattiers … et d’après certains s’il arrive à détruire tous les palmiers d’une zone, il a la capacité d’attaquer d’autres types d’arbres ».
Et d’ajouter : « Si le charançon rouge arrive au sud, la sécurité alimentaire économique et nationale est en jeu. L’unique région du globe terrestre qui est arrivée à l’éradiquer est la Californie. Elle est arrivée à atteindre cet objectif grâce à la collaboration de la société civile et des habitants. Les responsables de la Californie avec la société civile sont arrivés à établir un plan de communication efficace de guerre d’où cette réussite presque exceptionnelle ». Il est vrai que la Mauritanie a atteint également des résultats extraordinaires mais jusqu’à nouvel ordre elle n’a pas la certification officielle de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
Cet insecte a proliféré en Tunisie et est arrivé à s’acclimater et à se multiplier durant toute l’année. Alors qu’au début de son attaque (2011), il avait deux périodes de multiplication; au printemps et début de l’automne. La situation est très grave si on n’arrive pas à mettre en place un plan de communication exceptionnel pour l’éradiquer et faire de tous les Tunisiens des acteurs de lutte. C’est par une décision politique qu’on peut concrétiser ces recommandations.
Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la situation actuelle en Tunisie consiste un vrai problème. Actuellement, le charançon rouge du palmier sévit dans le Grand-Tunis et les gouvernorats limitrophes et constitue un véritable danger pour les oasis. Si le ravageur n’est pas confiné et éradiqué, très vite, ses impacts économiques, sociaux et environnementaux seront considérables.
Impacts de l’infestation des palmiers d’ornement dans le Grand-Tunis
A ce jour, plus de 7000 palmiers d’ornement (palmiers des Canaries ; Phoenix canariensis) sont infestés, soit pratiquement 20% des palmiers d’ornement recensés dans le Grand-Tunis. Et il n’échappe à personne que la situation est dramatique aussi bien pour le paysage urbain que pour l’image touristique de la Tunisie (grandes avenues et places de Tunis et sa banlieue, les hôtels,…). Sur le plan économique, le coût moyen de traitement, d’assainissement d’un palmier de 10 m infesté par le charançon rouge des palmiers (CRP) et son abattage quand c’est nécessaire, peut être estimé à 5.000DT sans tenir compte de la valeur patrimoniale inestimable. (La perte économique serait d’environ 5.000DT * 7000 palmiers = 35 millions de DT).
Impacts du CRP dans les oasis
Toujours selon la FAO, la filière des dattes occupe la deuxième place au niveau des exportations des produits agricoles, après l’huile d’olive. Elle participe à hauteur de 19% à la valeur totale des exportations agricoles. Pour la seule période allant du 1er octobre 2017 au 26 septembre 2018, la quantité exportée a atteint environ 129.000 tonnes, pour une valeur de 763 millions de dinars. Dix pour cent de la population tunisienne vivant dans les oasis seraient directement impactés par les dégâts en cas de contamination et plus de 50.000 hectares d’écosystèmes oasiens correspondant à 261 oasis (17% sur le littoral; 6% montagnardes et 77% sahariennes) riches en biodiversité seraient menacés de désertification. Nous renouvelons notre appel aux autorités pour une intervention rapide et efficace.