Par Neila Gharbi
Il existe 350 festivals ou peut-être plus en Tunisie. Leurs fonctions sont-elles culturelles ou de simples divertissements ? Tout d’abord, il faut souligner que la plupart des festivals d’été sont des festivals de musique. Sous-couvert de vouloir cultiver le peuple, les festivals sont des ressources financières non négligeables pour les artistes et autres professionnels de la culture. Mais de quelle culture s’agit-il ? La culture, loin d’être liée à la question de l’identité du pays, est entendue par les organisateurs de festivals et le public comme un moyen de distraction et d’évasion, d’oublier les soucis du quotidien et de partager du plaisir dans certaines conditions d’organisation et de convivialité. L’objectif est d’amuser la galerie et de la déstresser avec des contenus au ras des pâquerettes.
A ce titre, certains festivals ont lieu dans des espaces ouverts, places publiques, où les conditions ne sont pas appropriées : représentations devant tenir compte des bruits et autres interventions imprévisibles pouvant gêner les artistes et de l’inconfort pour le public contraint de rester debout dans la mesure où ces représentations sont gratuites. D’autres spectacles se tiennent dans des lieux fermés où l’organisation est plus structurée avec des techniques de son et lumière évoluées. Ce sont des représentations où le spectateur paie son billet pour une place assise. En principe, tout le monde a accès à la culture. Mais souvent, la sélection se fait par l’argent. Ainsi des festivals tels que Carthage ou Hammamet organisés par le ministère de la Culture avec l’argent du contribuable sont réservés à une élite, compte tenu du prix élevé du billet pouvant parfois dépasser les cent dinars.
Dans un souci d’égalité entre tous les citoyens, une culture alternative s’impose. Tout le monde peut avoir accès à la culture sous n’importe quelle forme. A titre d’exemple: la fête des Bergers au mont Semmama qui a donné naissance au Centre culturel des arts et métiers de Jbel Semmama à Sbeitla (gouvernorat de Kasserine). Un projet inclusif de désenclavement progressif de la région, qui a abrité le 22 juin dernier, à l’occasion de la célébration de la Fête internationale de la musique, une manifestation intitulée «SemmaMusic». Le public était nombreux à cet événement sous haute protection de la Garde nationale et des militaires. Au-delà du programme musical présenté qui s’est caractérisé par une certaine spontanéité, la manifestation est un défi contre les actes de terrorisme qui règnent aux alentours. Le symbole d’une résistance contre les obscurantistes qui considèrent que la culture est un péché.
L’existence d’un centre culturel concerne particulièrement une partie de la population des montagnes dite en marge de la société. Pour ce milieu rural, une telle offre culturelle est une réponse à la désertification qui continue à s’étendre. Ce Centre apporte au public des spectacles culturels auxquels ils n’ont pas toujours accès. En tant qu’acteur culturel et porteur du projet, Adnen Helali ne se soucie pas actuellement des retombées économiques, mais de faire de ce Centre un territoire où les jeunes peuvent s’exprimer à leur aise dans les domaines sportifs et culturels. L’initiative d’une exposition en plein air d’ « épouvantails » réalisés par une jeune de la région est l’expression de l’adhésion des jeunes à ce projet. La quête d’une programmation qui s’adapte davantage au milieu rural ainsi que la recherche d’une ligne directrice innovante qui s’est traduite par la musique des montagnards puis vers d’autres disciplines actuelles comme le rap ou le Hip-hop sont autant d’opportunités pour désenclaver la région et implanter une culture spécifique différente de ce qui se fait ailleurs.
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