Le sujet est d’une actualité brûlante. Il inquiète la majorité des gens menant une vie paisible, exempte du sens de l’aventure et réglée comme du papier à musique. Pour ces honnêtes citoyens, la prison, avec ses espaces si étroits et si ténébreux, est faite pour les autres qui ne leur ressemblent en rien.
Pour eux aussi, c’est souffrir mille morts que de passer une seule et unique nuit parmi l’imperturbable faune des abonnés des inconfortables doubles lits grinçants. Ce préambule fait place au vif du sujet.
Nul n’en est à l’abri !
Dans nos commentaires du 21 mars 2016, intitulé :’’L’éternelle épée de Damoclès’’ et du 7 avril de la même année
intitulé : ‘’Le ministre de la Justice réagit à l’injustice’’, nous avons eu à administrer la preuve que tout citoyen masculin ou féminin, quel que soit son nom, prénom, son âge, son rang social et sa profession, n’est guère à l’abri de cette diable d’épée de Damoclès, risquant souvent injustement de lui tomber sur la tête. Sans savoir pourquoi, quand et comment.
J’avais alors visé les cas fréquents de ceux qui, pour une raison ou une autre, n’auraient pas eu ‘’le privilège’’ de recevoir à temps la sacro-sainte convocation pour répondre ‘’présent’’ au pontife si imposant, trônant dans son fauteuil de président. Son tort aura été, la plupart du temps, de n’avoir pas réglé, par exemple, une amende afférente à une infraction routière si insignifiante soit-elle : avoir été capté par Mr Radar sans le savoir, en l’absence de patrouille policière ou, victime d’un coup monté par sa non ‘’douce’’ moitié, courroucée suite à un conflit conjugal, généralement passager, etc… Et puis il se peut que les messieurs en uniformes, territorialement compétents, par négligence ou, pris dans le tourbillon des affaires urgentes, n’aient pas eu le temps de transmettre ce courrier aux fâcheuses retombées.
Le changement d’adresse à l’index
Autre raison et non des moindres: lorsque les intéressés changent d’adresse sans le signifier aux autorités à travers le changement de leurs cartes d’identité. Cela, par exemple, en raison du caractère estimé provisoire de leurs nouvelles adresses. Et aussi pour les formalités lourdes, dissuasives et onéreuses, surtout pour les familles nombreuses. Il demeure entendu que tous ces malencontreux contretemps sont propres à aboutir à des ennuis de justice on ne peut plus déstabilisants et des jugements par contumace difficiles à gérer.
Pris au centre de tri !
Tenez, il y a quelque temps, un mien ami a été, lui aussi, pris dans le guet-apens de la maudite convocation. Alors que, par un après-midi dominical, le bonhomme progressait allègrement dans sa voiture en famille vers une station thermale, il s’est vu brusquement, lors d’un contrôle de police routinier, viré vers une station plutôt infernale, le fameux centre de tri de Bouchoucha !
Avant d’être pris par la peau du cou et jeté dans ‘’le panier à salade’’ parmi la faune des recherchés. Il était tombé des nues en apprenant qu’il était condamné par contumace à 33 jours de prison pour défaut de règlement d’une amende de 30D, par suite d’une infraction routière supposée banale. Il n’aurait pas cédé la priorité de passage à un tiers automobiliste. Il eut beau jurer ses grands dieux n’avoir reçu aucune convocation par la justice. Rien à faire.
La police s’est dite rien à voir dans cette galère. C’est au bel ami de prendre son mal en patience, passer une nuit blanche dans les rudes conditions de la détention. Avant d’être obligé de faire opposition le lendemain, devant la justice pour pouvoir enfin respirer à pleins poumons l’air confisqué de la liberté !
Cela dit, nos papiers sus-indiqués n’ont pas d’ailleurs manqué d’attirer l’attention du Garde des sceaux, à l’époque, Mr Amor Mansour. Qui, par le biais de l’avocat général pour les affaires pénales, avait promis de rajouter ce point, jugé de haute importance, à l’ordre du jour de la commission chargée alors de la révision du code de procédure pénale.
Pas de nouvelle… Mauvaise nouvelle !
Et il semble que, après le départ du brave monsieur, aucune nouvelle n’a dû filtrer à ce sujet. Et c’est peut-être le cas de dire, pour une fois: pas de nouvelle, mauvaise nouvelle! L’on a alors cherché à percer le secret de ce black out si intrigant, auprès d’une source proche du Garde des sceaux. Il s’est avéré que le projet si salvateur avait été déposé à la coupole du Bardo. Il a été gelé pendant un certain moment, jusqu’au jour du gel du défunt Parlement.
Sincèrement dit, l’on n’a pas besoin d’être un juriste illuminé pour nous dire qu’il serait insensé de mettre dans de si sales draps et de s’acharner contre un citoyen ayant commis une infraction reconnue si minime et n’ayant reçu aucune convocation, ni signé le moindre accusé de réception. Dans de tels cas, il aurait été plus logique et plus correct de remettre à ces fichés recherchés, ne représentant aucun danger pour notre sécurité, une deuxième convocation contre décharge. Et de le tenir par là même pour responsable, à part entière, de son éventuel forfait le jour ‘J’’.
Aussi, ne dit-on pas si bien que l’état de liberté est la règle. Tandis que celui de la détention est l’exception.