En écho aux visites du Chef de l’Etat aux dépôts appartenant à la municipalité de Béja, à la Transtu ou à la Sncft, des travaux de nettoyage et d’aménagement des espaces sont entrepris ces derniers jours.
A travers ces actions, l’objectif est de remettre de l’ordre dans la gestion des matériels, des équipements ou des véhicules non utilisés. Ce phénomène très peu connu du grand public dure depuis des décennies.
Il existe, partout, des cimetières de trains, de bus, d’ordinateurs, de mobiliers divers, etc. appartenant, généralement, à des entreprises publiques. C’est ainsi qu’on trouve des tonnes d’objets abandonnés (tables, chaises, armoires et bien d’autres déchets informatiques…) dans les débarras des établissements scolaires ou des administrations publiques.
Matériels récupérables, mais…
Autant de déchets sans le moindre espoir de les voir, un jour, recyclés ou réparés. Pourtant, il est possible de réaliser des travaux d’entretien n’engageant pas de grands moyens pour les réutiliser ou les remettre en service. Malheureusement, nos décideurs ont d’autres projets en tête. Jeter ces objets aux oubliettes permet de conclure de nouveaux contrats et des achats de nouveaux équipements avec des fournisseurs qui ne respectent pas, toujours, les normes de conformité aux standards. D’ailleurs, sur ce point, justement, il est temps de clarifier les rapports entre ces fournisseurs et les entreprises étatiques. Des révisions des cahiers des charges, notamment en ce qui concerne la qualité des équipements fournis et des garanties. Un recensement des objets stockés, parfois, sans la moindre protection montrerait l’énormité des gaspillages et la dilapidation des deniers publics. A Béja, on a eu l’occasion de voir la grande quantité de voitures, de deux roues et autres engins entreposés sur place et soumis à tous les aléas climatiques. La régularisation de la situation de tous ces objets n’est pas à l’ordre du jour et c’est une perte pour l’économie nationale. Rien n’est tenté pour trouver une sortie et libérer cette marchandise qui ne peut être ni vendue, ni réparée, ni entretenue. Car la loi est ainsi faite. Elle immobilise tout sans la moindre possibilité de trouver la solution pratique.
Tout le monde est, alors, perdant
Quand on revient aux entrepôts de La Charguia et, surtout, de Bab Saâdoun relevant de la Transtu, on ne peut s’empêcher d’exprimer les sentiments de sidération et d’incompréhension devant tant de gâchis. Des centaines de bus en rebut déposés les uns sur les autres depuis des années encombrent l’espace et gênent les mouvements. La situation est la même ou presque dans les différents autres entrepôts de la société, corollaire d’une tradition de laisser-aller et d’indifférence. Les mêmes anomalies ont été relevées à Nabeul au cours d’une autre visite du chef de l’Etat à une voie de garage de la Sncft.
Partenariat avec le Conseil de l’Ordre des ingénieurs
De telles désorganisations sont à étendre à toutes les régions du pays, où il est possible de constater de graves manquements et de déprédations dus à la négligence. Les travaux d’enlèvement de tonnes de déchets et de matériels ont commencé particulièrement au dépôt de Tunis-Marine, de Bab Saâdoun et ailleurs. Le ministre du Transport suit, personnellement, le déroulement de ces opérations. Déjà on annonce que 25 tonnes de déchets ont été collectés dans le dépôt de Bab Saâdoun. Par ailleurs, le ministère a précisé qu’un appel d’offres a été lancé pour céder 21 bus sur 47 en place. Rappelons que, selon la Transtu, il y aurait 450 à déplacer, des différents entrepôts pour dégager de l’espace et faciliter la circulation à l’intérieur de ces locaux. Toutefois, il y a lieu de noter qu’il n’existe aucune coordination entre l’opérateur de transport et les divers organismes capables d’apporter un soutien technique à l’instar du Conseil de l’ordre des ingénieurs ou de la Chambre syndicale des mécaniciens pour voir s’il est possible de conclure des partenariats en vue de réparer ce qui peut l’être des véhicules mis hors service. Où sont nos ingénieurs et techniciens s’ils ne peuvent pas intervenir dans de telles situations ? La Transtu ou les autres sociétés régionales ne peuvent pas s’en sortir toutes seules, s’il n’y a pas cette dimension partenariale. C’est à ce niveau que l’on doit agir. Pourquoi perdre tout ce potentiel et recourir à des achats de bus d’occasion, alors qu’il est possible de compter sur nos propres moyens en recourant à nos compétences dont notamment en génie mécanique. L’Ordre national des ingénieurs devrait se sentir concerné par cette action et montrer qu’il est capable d’agir quand il le faut. Le même travail est à entreprendre au niveau des trains de voyageurs.
Priorité au transport
Il y a des chances certaines de pouvoir sauver un nombre important de matériels immobilisés. Les services d’entretien et de maintenance gagneraient à être renforcés par des compétences en ingénierie mécanique et en d’autres spécialités. Même les pays considérés comme développés techniquement n’hésitent pas à remettre à neuf des trains âgés de plus de 40 ans, alors qu’ils ont la possibilité de fabriquer de nouveaux trains.
Notre pays est appelé à accorder la priorité absolue au transport pour sortir de l’impasse ou, à tout le moins, atténuer l’impact pesant sur les citoyens. Les pertes économiques sont énormes. Elles sont dues aux retards et pannes fréquents sur tous les moyens de transport. Lorsqu’un métro tombe en panne (c’est le lot quotidien), il n’y a jamais de renfort par bus. C’est ce qui occasionne des confrontations employeurs-employés, pouvant conduire à des licenciements et à des pertes de postes d’emploi. Les Tunisiens sont perdants sur toute la ligne, car, chaque jour, ils ont du mal à trouver un moyen de transport pour arriver à leur lieu de travail ou à l’école. Ils dépensent beaucoup d’argent pour les taxis ou les autres moyens de transport privé alors qu’ils ont, déjà, payé des titres de transport à la Sncft ou à la Transtu ou aux autres opérateurs de transport régionaux. A ce rythme, il n’y a pas de moyen pour surmonter toutes ces difficultés en comptant sur le budget accordé, chaque année, au ministère du Transport. Aussi, pouvons-nous suggérer le lancement d’un emprunt national (ou plus) en faveur du développement du transport public comme cela avait été le cas pour les emprunts nationaux lancés par l’Etat tunisien. Et qui lui ont permis de lever plus de 1.200 milliards de nos millimes en peu de temps.