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Défense du consommateur: La chasse aux arnaques!

Disons donc tous non, mille fois non aux trompeurs et fraudeurs, sans pour autant être violents. La majorité silencieuse devrait se réveiller de sa torpeur et ne devrait pas compter sur les seuls efforts insuffisants des contrôleurs.


L’instrument de mesure est, à n’en point douter, le principal garant de la transparence des transactions commerciales. Or, la nature et la qualité de cet outil, ayant damé le pion à notre traditionnelle balance (aux poids poinçonnés chaque année), ne sont guère propres à départager équitablement le client et le commerçant. Ceci, sans compter que ces instruments de fortune sont disposés, à dessein, en dehors du champ de vision du client.

«Là où habite le diable !»

Nous allons, à ce propos, nous régaler ensemble d’une parade à la fois atypique d’un consommateur bien malin et avisé, ayant répandu la hilarité dans le marché. Allons-y donc sans plus tarder. Il semble que consommateur et corps de contrôle confondus ont fini, singulièrement, par normaliser et admettre ces instruments de mesure, généralement bas de gamme et manipulables à loisir par un simple tour de main.

Non seulement ces outils ayant proliféré et fleuri dans nos murs, faussant la transparence de la transaction commerciale aux dépens du consommateur, ils sont casés dans un coin perdu dans le commerce, «là où habite le diable», comme le dit si bien notre adage populaire. Pour les non-patentés, opérant à ciel ouvert, la question ne se pose pas. C’est, hélas, la liberté chérie tous azimuts ! Ils n’ont de compte à rendre ni à Dieu, ni au diable, encore moins au corps de contrôle économique qui n’a aucune patente à leur retirer, ni de P.V. à leur dresser… Les intéressés sont, alors, aux abonnés absents dans «l’annuaire» des commerçants.

Motus et bouche cousue !

Tout ce beau monde se laisse servir dans des conditions suspectes, motus et bouche cousue, sans même s’aviser à vérifier l’exactitude du compte. Et, malheur à celui qui oserait ouvrir le bec et placer un mot de désapprobation devant toute manœuvre déloyale. Il serait en butte à une réaction orageuse de la part du marchand mal intentionné, ayant souvent les propos désobligeants au bout des lèvres… Prenant, prétendument, toute objection pour une atteinte à son honnêteté et un inadmissible lèse-majesté !

Quant aux dames, se disant, pour la plupart, cuites par le feu de l’arrogance et de l’irrespect, en faisant leurs emplettes dans les marchés, elles sont, constate-t-on, de moins en moins nombreuses à y courir le risque d’être prises à partie et intimidées sans raison et parfois pour des futilités. Pourtant, l’élément féminin est entouré d’un égard particulier et un rang privilégié, partout ailleurs dans notre société. Et méritent toute sollicitude et tout respect là où elles mettent les pieds, y compris dans les marchés. Où l’on assiste souvent à l’échange de propos vulgaires et grossiers au sein des membres de la même confrérie, sans se gêner…

Pesées dans la stricte intimité !

Cela dit, revenons-en maintenant à nos fameux instruments de mesure de la démesure, en nous arrêtant sur une scène bien à propos, dont j’ai eu le privilège d’être le témoin oculaire et auriculaire dans l’un des marchés de la banlieue de Tunis et de m’en régaler copieusement en même temps que le public présent, marchands et clients. Respectable, digne d’un vaudeville,  cela en dit long sur l’audace, la finesse d’esprit et le sens aigu de l’autodéfense du protagoniste. Le héros du «show» est un respectable bonhomme ayant bien fait de contribuer à contrecarrer l’arnaque et les manœuvres sordides à sa manière. Une façon atypique, amusante et pacifique sans violence verbale et échange de coups de bec ni exhibition de biceps…

Silence ! Moteur ! On tourne! Le client s’avance vers l’un des marchands de fruits et légumes, un bonhomme rond, les joues pendantes, l’estomac bombé de quelqu’un habitué aux excès de table et aux dîners arrosés. Il lance un bien gentil «Salamalicom !», avant de réciter dans l’ordre sa commande dictée— semble-t-il — rigoureusement par sa douce moitié, apparemment douce à moitié ! Un kilo de ceci, deux kilos de cela, une botte de légumes de ceci et une autre de cela. Et quelle ne fut la surprise du visiteur en voyant le commerçant emballer prestement chaque produit. Ceci, avant de galoper plus vite que la musique, pour effectuer ses pesées dans la stricte intimité, derrière une pile de cageots arrangés bien entendu pour le besoin de son injuste cause !

Devant ce jeu de cache-cache, à la fois singulier et scandalisant, le client, loin d’être un enfant de chœur, semblait prêt à s’exposer à mille morts plutôt que de se taire et se laisser faire. Il se résoud alors to de go, souriant en coin, de prendre astucieusement sa revanche sur son vis-à-vis, loin d’avoir odeur de sainteté.

– «Faites-moi le compte, monsieur SVP», lance le client. «Douze dinars six cent millimes», réplique le marchand, l’air d’être sûr de son calcul mental et de ses pesées unilatérales.

Tirer le tapis sous les pieds de l’arnaqueur

L’homme devait tôt faire de sortir son porte-monnaie. Il compte soigneusement son argent. Puis, s’avance vers le tiroir de la caisse entrouverte et encastrée dans le comptoir. Et, hop ! il y glisse une poignée de pièces de monnaie. Eberlué et ébahi, le teint rouge comme un coquelicot jusqu’au blanc des yeux, le marchand crie au scandale ! «Mais qu’est-ce que vous faites ?, monsieur», lance le commerçant. «J’ai fait ce que vous avez fait», réplique le client sereinement. Moi, je n’ai rien vu et vous n’avez rien vu. Où est donc le mal ? On est à égalité !».

Et le fou rire n’a pas tardé à parcourir l’ensemble du marché. Ce qui a contraint le commerçant, tourné au ridicule, de ravaler sa colère et de mettre de l’eau dans son vin. Moralité de l’histoire, un fou rire moqueur a été suffisant pour tirer le tapis sous les pieds de l’arnaqueur. La majorité a ainsi dit non à la supercherie, la minorité a tôt fait de jeter du lest et d’obtempérer…Disons donc tous non, mille fois non aux trompeurs et fraudeurs, sans pour autant être violents. La majorité silencieuse devrait se réveiller de sa torpeur et ne devrait pas compter sur les seuls efforts insuffisants des contrôleurs. «Il n’y a que nos ongles, en mesure de nous gratter la peau et nos yeux capables de pleurer nos maux», dit si bien notre sagesse populaire.

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