La Tunisie a créé, dans les années soixante, des écoles de sport qui lui ont donné tous les champions et championnes qui ont marqué son histoire. La fameuse équipe qui a émergé en 1978 en Argentine en est le fruit
Le temps que vous lisiez ce papier, un enfant, souvent plus, au Brésil, en Argentine ou en Côte d’Ivoire ou encore en Angola a été repéré et acheminé vers un club structuré qui le prendra en charge et le mettra sur une liste de cession. S’il a des qualités, le club qui a mis en place des recruteurs, le prendra avec toute sa famille en Europe. Ils auront tous la nationalité du pays d’accueil et jouera sous les couleurs de ce pays dont il deviendra citoyen.
Dans quelques années, vous retrouverez son nom sur la liste des titulaires au Réal de Madrid, du PSG ou à Manchester.
L’enfant tunisien passera la nuit à rêver de football, revivra des centaines de fois un geste qui l’a marqué et qu’un enfant de son âge a fait et qui l’a captivé.
Lui, ses parents joignent difficilement les deux bouts et n’ont pas les moyens de payer sept cents dinars pour l’inscrire dans une «académie» pour… apprendre à jouer au football.
Pourtant, il sait taper dans le ballon et compte parmi les meilleurs de son quartier.
Les enfants qui rejoignent les meilleures équipes du monde apprennent à jouer au football, cette école de la vie, sur un terrain vague. Personne ne leur interdit de jouer à n’importe quelle heure après les cours ou lorsqu’ils ont terminé de petits services accomplis contre quelques pièces, parce qu’ils ne vont pas à l’école..
Et lorsqu’ils vont dans un club, ils ne paient rien. Tout est gratuit.
L’enfant tunisien n’a même pas d’argent pour acheter des lacets de chaussures de football. Les terrains vagues ont été envahis par le béton.
Voilà la situation que vit notre «sport roi». Une détresse à deux vitesses.
L’incapacité de former et l’absence de structures d’accueil qui permettent un encadrement sans lequel ce troisième milieu choisi par des centaines de milliers d’enfants est fermé.
Pourtant, la Tunisie a créé dans les années soixante des écoles de sport qui lui ont donné tous les champions et championnes qui ont marqué son histoire. La fameuse équipe qui a émergé en 1978 en Argentine en est le fruit.
L’Etat avait pris en charge ces écoles de sport et, encadrement, équipement et collation à la fin des entraînements étaient fournis par le Ministère de la Jeunesse et des Spots. Comment peut-on expliquer qu’en 2024 nous avons abandonné la formation, à des équipes désargentées qui croulent sous les dettes et qui ont perdu leur mission première qui consiste à encadrer des jeunes ?
Comment reprendre en main une situation qui a fait de notre sport un sport à deux vitesses qui a oublié ses vertus et ses objectifs ?
Assurément, pas par des promesses, mais au moyen d’un plan d’action énergique basé sur la responsabilisation des différentes parties prenantes. Le Président de la République vient de rappeler aux gouverneurs leur devoir d’être en phase directe avec tout ce qui se passe dans leurs gouvernorats. Ces Associations sportives qui gâchent un argent fou pour se payer des chimères, sont les premières responsables de cet abandon et elles devraient intervenir, avec la collaboration du ministère de la Jeunesse et des Sports pour protéger ceux qui en ont besoin.
Parce que, tout simplement, cet extraordinaire potentiel inexploité est un handicap pour une jeunesse qui se sent abandonnée et qui n’a aucun moyen d’avoir des repères vis-à vis de son pays qui a le devoir de développer ses talents, asseoir sa personnalité et stimuler la fibre patriotique qui sommeille en elle.