On peut mourir d’une attaque cardiaque, d’une balle dans la tête ou suite à un accident de la route. Mais à Gaza, on meurt non seulement sous les bombes mais aussi de faim. Quand le paroxysme des atrocités s’allie à la lâcheté humaine, c’est Gaza qui brûle. Question : comment faire le Ramadan alors qu’on meurt déjà de faim ?
Alors que les musulmans du monde entier échangeaient, dimanche, les vœux à la veille de l’avènement du mois de Ramadan, les habitants de Gaza, eux les larmes aux yeux et le ventre vide, échangeaient les condoléances. On dit que désormais aucune famille n’est épargnée.
La vague quotidienne des frappes de l’aviation israélienne massacre tout un peuple désarmé, désemparé. Les Palestiniens comptent leurs morts. Ce jour-là, on a déploré quelque 112 victimes et 85 blessés.
De quoi alourdir le très corsé bilan de plus de 31 mille tués et de 80 mille blessés recensés depuis le 7 octobre dernier. Pour ce peuple palestinien, incontestablement champion du monde de l’héroïsme et adepte de la résistance léguée d’une génération à une autre, on a fini, avec le temps, par s’habituer à tout, aux fracas des bombes, aux scènes apocalyptiques et aux ravages causés par les destructions des habitations et toutes les infrastructures. Et vraisemblablement, tout cela ne lui fait pas peur, ne le terrorise plus.
Par contre, le Gazaoui, on le sait, faiblit dès lors que ses enfants ont faim et qu’il n’est plus en mesure de leur assurer le minimum pour survire. Et, justement, Israël, compte venir à bout de la résistance palestinienne en affamant la population.
Pour ce faire, une seule tactique prévaut : la destruction systématique des infrastructures, du réseau de l’eau potable, des réseaux d’assainissement, du système alimentaire (terres agricoles, vergers, flottes de pêche..) la coupure des vivres et des médicaments, la fermeture des postes frontaliers ou leur ouverture provisoire en limitant l’arrivée des aides humanitaires.
Comble de cynisme, les soldats de Tsahal n’hésitent pas à tirer à bout portant sur la foule qui attend de s’approvisionner pour au moins faire taire la faim. Cela sans compter le refus à répétition de Tel Aviv de la levée du siège impitoyablement imposé au territoire palestinien ni accepter un quelconque compromis sur un cessez-le-feu. Bref, lorsque Hitler, pardon Netanyahu, passe de la parole à l’acte, bonjour l’enfer !
Un pain qui vaut son pesant d’or
Enfer, le mot est lâché pour dire que Gaza est en train de subir ce qui s’apparente à un génocide historiquement sans égal. Une tyrannie qu’une humanité passive constate et condamne du bout des lèvres, quand elle ne regarde pas ailleurs.
Résultat, un peuple désarmé à Gaza est voué à une mort lente. Une tentative d’extermination qu’organismes et experts internationaux donnent pour imminente. «Gaza est en proie à une crise humanitaire majeure et menacée de famine» martèle à son tour l’ONU qui multiplie avec plusieurs pays les appels à l’adresse d’une entité sioniste aveugle et muette pour permettre l’accès des aides humanitaires et sauver ce qui peut l’être encore des 2,4 millions d’habitants dont la majorité est composée d’enfants, donc de sujets vulnérables. Effectivement, ce sont ces petits Gazaouis, devenus la cible de la malnutrition, des maladies et des épidémies, qui torturent la conscience universelle, ou ce qui en reste.
Filmés par les caméras des télés, des radios et des réseaux sociaux, ces gosses aux corps frêles et amaigris promènent leurs silhouettes squelettiques dans les rues en ruine, qui en tapant dans un ballon, qui en fouillant sous les décombres pour espérer déterrer un cadavre, qui en train de faire la queue en quête d’un morceau de pain ou de quelques gouttes d’eau potable. Et c’est au petit bonheur la chance. Deux denrées de base qui valent aujourd’hui leur pesant d’or et dont l’acquisition exige qu’on fasse parfois des kilomètres, soit à dos d’âne, soit sur une charrette, soit carrément à pied !
Et si chez les peuples musulmans épargnés par les guerres, on peut, comme le veulent les traditions du mois saint, s’offrir un Iftar savoureux, manger sucreries et délices dans la soirée, regarder la télé, sortir, jouer aux cartes ou aux dominos, il n’en est pas de même pour les infortunés Gazaouis réduits à un seul plat par jour.
«J’ai faim, pouvez-vous me donner à manger ?»
Une bien triste illustration nous est venue récemment d’une vidéo postée sur Facebook par une adolescente de Gaza et dont voici le contenu en anglais : I’m hungry, can you give me food? (traduisez «j’ai faim, pouvez-vous me donner à manger ?»).
Insupportable est cette souffrance étalée devant le monde. Et alors que des ONG et des experts occidentaux ont eu le courage de révéler, il y a une semaine, que «80% des personnes les plus affamées sur terre à l’heure actuelle vivent à Gaza» et que « la famine qui les menace de mort est quasiment inévitable face aux graves manques de nourriture, d’eau et de médicaments», des pays sont subitement montés au créneau pour se fendre de cette trouvaille : procéder à des largages aériens d’aides sur la bande assiégée et ouvrir ensuite un corridor maritime entre Chypre et Gaza par la construction d’un quai flottant pour accélérer l’acheminement des aides. Or, deux jours seulement après son lancement spectaculaire, cette opération a déjà fait cinq tués et dix blessés dans la zone côtière d’Al Chati, et cela suite au non-fonctionnement de parachutes qui a entraîné la chute brutale des colis sur la tête de nombreux gazaouis qui se rassemblent tous les jours par centaines au sol et parfois sur les toits des maisons, dans l’espoir de voir tomber un miracle du ciel. Fatalité !
Pour conclure, nous voudrions bien lancer à l’adresse de nos accrocs des réseaux sociaux ce message de compassion, de sagesse et de solidarité : SVP, arrêtez de faire circuler, durant ramadan, des vidéos illustrant les saveurs et délices des plats présentés au moment de la rupture du jeûne et pendant les veillées ramadanesques.
Tout simplement parce que c’est une honte que de déployer cette profusion face à une population assiégée et affamée dans le vil dessein de l’exterminer.