Le climat, déjà tendu entre les autorités et les syndicats de l’enseignement, risque de se dégrader encore davantage dans les prochains jours. Avec la malheureuse affaire de l’enfant touché à l’œil par l’un de ses camarades dans une école à Sfax, les événements vont se précipiter.
L’émoi suscité par cet accident est d’autant plus grave qu’il a été suivi de l’arrestation de l’enseignante de la classe où a eu lieu l’accident et le directeur de l’école. La réaction des différents syndicats a été immédiate pour soutenir les deux prévenus et dénoncer la mesure jugée disproportionnée et injuste.
24.000 cas de violence / an
La place d’un enseignant n’est pas dans une prison. Certes, une décision de les libérer a été prise suite à la mobilisation des structures syndicales tous corps confondus (Centrale syndicale, Union régionale de Sfax, Fgeb, Fges et d’autres fédérations générales comme les inspecteurs ou les fonctionnaires…). De plus, il faut noter la mobilisation d’une vingtaine d’avocats de la défense dont 12 volontaires.
Tout cela est venu s’ajouter aux nombreux problèmes récurrents et qui ne semblent pas trouver de solutions depuis bien longtemps. A cet effet, il y a lieu de rappeler la teneur de la motion professionnelle publiée au début de ce mois par la commission administrative sectorielle de l’enseignement secondaire. On y dénonce la détérioration des conditions de travail des enseignants, du pouvoir d’achat, l’état déplorable de l’infrastructure, le manque d’encadrement et de personnels (estimé à 7.000 dans les collèges et les lycées et 5.000 dans le primaire).
Ceci sans oublier la sempiternelle question des emplois précaires ou la propagation fort inquiétante de la violence en milieu scolaire. Selon certaines statistiques, il y aurait environ 24.000 cas de violence / an, au point que notre pays serait classé au 3e rang concernant ce phénomène.
D’aucuns n’hésitent pas à pointer le manque d’agents d’encadrement. Mais on met aussi à l’index l’influence de la rue et tous les dangers qui guettent nos enfants. Les médias ne sont pas épargnés, notamment à cause des feuilletons qui passent à la télévision (privée ou publique) ou, encore, l’impact très néfaste des réseaux sociaux. Aujourd’hui, les enfants échappent à leurs parents. L’école, elle-même, deviendrait un espace où l’élève apprend les pratiques violentes et les incivilités.
Mouvement de protestation, fin avril
C’est donc dans ce contexte que la Fédération générale de l’enseignement secondaire (Fges) exige un retour au dialogue avec les autorités pour résoudre les problèmes en suspens, à l’instar de l’application de l’accord du 9 février 2019. Et, particulièrement, en ce qui concerne l’augmentation des primes des directeurs et des censeurs, ainsi que le budget des institutions scolaires. L’autre accord en date du 23 mai 2023 est à remettre sur le tapis.
Dans ce cadre, la motion professionnelle propose plusieurs mesures pour améliorer les conditions matérielles des enseignants. Elle énumère, entre autres, la révision des montants des primes des fournitures scolaires, celles des examens nationaux (correction et surveillance), l’augmentation des montants des promotions professionnelles, la création de nouvelles promotions et la généralisation des bourses universitaires pour tous les enfants des enseignants.
De son côté, la Fédération générale de l’enseignement de base (Fgeb), forte du soutien inconditionnel de toutes les forces syndicales à la suite de l’arrestation de l’enseignante et du directeur d’une école à Sfax, déplore le sort réservé aux deux prévenus et l’humiliation dont ils étaient victimes. De tels faits se produisent dans n’importe quel pays et à tout moment et ne méritent pas d’être traités de la sorte. C’est ce qui a entraîné cette vague de solidarité syndicale qui a abouti à la libération des deux enseignants et à l’annulation de la grève générale dans tous les établissements scolaires qui avait été annoncée pour le 14 de ce mois.
Ceci n’empêchera pas les différents syndicats de l’enseignement (au nombre de 9) de se tenir vigilants et de prendre toutes les mesures nécessaires pour défendre les intérêts de leurs adhérents. En tout cas, d’ores et déjà, un mouvement général de protestation est programmé pour la fin du mois d’avril prochain pour souligner la ferme solidarité syndicale de tous les corps professionnels.