Séminaire – Politiques Publiques : Vers une gouvernance basée sur les données

 

Le point d’orgue du séminaire a été l’annonce de la mise en ligne d’une plateforme ouverte pour la collecte, l’analyse et la diffusion de données sur les projets publics en Tunisie, tout en favorisant une redevabilité responsable et des pratiques basées sur des données empiriques. «Cette plateforme est un outil essentiel pour passer d’une perception des politiques publiques souvent fondée sur des impressions subjectives à une vision globale appuyée par des données empiriques», explique une consultante du projet

L’Observatoire tunisien des politiques publiques (Otpp), qui travaille déjà depuis deux ans, a été officiellement lancé hier avec le concours du think tank tunisien Solidar. Organisé dans le cadre du plan de travail gouvernemental pour une gouvernance ouverte, le séminaire, qui s’est tenu à cette occasion, a rassemblé divers acteurs, notamment des représentants des ministères, des organisations internationales, de la société civile ainsi que des chercheurs et experts en politique publique. Le point d’orgue du séminaire a été surtout l’annonce de la mise en ligne d’une plateforme ouverte pour la collecte, l’analyse et la diffusion de données sur les projets publics en Tunisie, tout en favorisant une redevabilité responsable et des pratiques basées sur des données empiriques.

Le projet de l’Otpp s’inscrit dans une dynamique plus large de réforme des institutions tunisiennes, visant à améliorer l’efficacité des politiques publiques à travers une gestion plus transparente et une meilleure utilisation des données. En ce sens, cette initiative a été saluée par les participants comme une avancée importante dans le processus de démocratisation de l’accès à l’information.

Un think tank stratégique

Le rôle de l’Otpp dépasse la simple collecte de données : il se veut un think tank stratégique, ouvert à toutes les autres initiatives et capable de s’allier dans des coopérations fructueuses du même type.

Dans son discours d’ouverture, Iheb Ben Salem, expert en développement durable et membre clé de l’Observatoire (Otpp), a souligné que cet observatoire a pour mission de «produire des connaissances exploitables à partir de la masse de données disponibles afin de guider l’élaboration de politiques publiques plus efficaces et transparentes».

En d’autres termes, l’observatoire ne se limite pas à compiler des chiffres : il ambitionne d’interpréter ces données pour offrir des perspectives analytiques et des recommandations qui, selon les promoteurs de l’initiative, «peuvent transformer la gestion des affaires publiques».

Lors de la conférence, Iheb Ben Salem a insisté sur l’importance de faciliter l’accès aux données et de promouvoir une «réutilisation créatrice de valeur» des informations collectées. Ben Salem a ainsi présenté les principaux dispositifs mis en place pour assurer cette gestion des données, notamment la plateforme digitale de l’Otpp. Une plateforme qui regroupe les bases de données existantes sur les projets publics, les études de gouvernance et les données territoriales, et sera consultable par le grand public. «L’idée, explique-t-il, est de garantir un accès libre aux informations, tout en permettant à différents publics, chercheurs, décideurs, citoyens, de les utiliser de manière proactive et créative».

Dans son topo, Ben Salem a souligné que la collecte de données ne doit pas être perçue comme une fin en soi, mais plutôt comme un processus qui doit aboutir à la production de connaissances utiles par les différents acteurs et la mise en place des politiques publiques. Il a ainsi évoqué l’importance de ce qu’il appelle «la redevabilité responsable», un concept qui vise à renforcer l’usage des données pour améliorer la gouvernance, tout en s’éloignant d’une culture d’accusation.

«Le pari que nous faisons c’est que les évaluations et les observations soient basées sur des faits et les solutions fondées sur des preuves empiriques», a-t-il martelé.

La pièce maîtresse de l’Otpp est sans aucun doute sa plateforme digitale, conçue pour centraliser toutes les informations relatives aux projets publics et aux initiatives gouvernementales. La plateforme permet ainsi au public averti non seulement de consulter les données, mais de les exploiter, en lui permettant de les réutiliser à travers le téléchargement des contenus sous divers formats.

Transformer les perceptions en vision plus globale

De son côté, Basma Ghozzi, consultante au sein de l’Observatoire, a expliqué que cette plateforme est conçue pour regrouper et mettre à disposition des données déjà existantes, mais souvent dispersées entre différentes institutions publiques et privées. «Nous ne créons pas une nouvelle base de données, mais nous centralisons les informations pour les rendre accessibles à ceux qui en ont besoin», a-t-elle précisé.

Cette plateforme offre des outils interactifs, tels que des tableaux de bord dynamiques, des infographies et des études analytiques, permettant aux utilisateurs de visualiser facilement les informations et de les utiliser pour mener leurs propres analyses. Selon Ghozzi, la plateforme est «un outil essentiel pour passer d’une perception des politiques publiques souvent fondée sur des impressions subjectives à une vision globale appuyée par des données empiriques». Elle a insisté sur le fait que l’objectif ultime de cette initiative est de «démontrer par l’évidence».

Par ailleurs, l’Otpp indique qu’il s’appuie sur un réseau d’experts, de chercheurs et d’analystes pour assurer la production de connaissances utiles à partir des données collectées. Les thématiques traitées par l’Observatoire sont sélectionnées en fonction de leur importance pour le développement et sont soumises à une analyse approfondie avant d’être publiées sous forme de «Policy Briefs», «Policy Papers», ou encore d’études plus détaillées. Ces productions seront ensuite diffusées à travers des infographies, des vidéos explicatives ou encore des articles pour un usage plus large.

Un des exemples présentés par l’Observatoire lors de la conférence est la récurrence des retards dans la réalisation des projets publics, notamment dans le gouvernorat de Jendouba (objet d’une étude) où des retards significatifs dans l’exécution ont été constatés. Entre 2016 et 2022, l’analyse des 43 projets budgétisés pour cette région révèle que la majorité d’entre eux ont accusé des retards importants, avec un écart moyen de 892 jours par rapport aux délais initialement prévus.

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