À quelques jours de son entrée en vigueur, l’appel au report de l’application de certains articles de la nouvelle loi sur les chèques pour que les banques et les utilisateurs de chèques trouvent une alternative appropriée à la nouvelle situation se fait de plus en plus audible. Au même moment, des parlementaires sont montés au créneau pour soutenir l’application dans le délai spécifié de la nouvelle loi.
La Presse — Une initiative législative déposée par le député Mohamed Boussetta le 20 janvier dernier stipulant la suspension de l’application de la nouvelle loi N°41-2024 relative aux chèques est venue enfler le débat autour de cette loi et, notamment, concernant son impact sur le secteur commercial dans le pays. La nouvelle loi entrera en vigueur le 2 février prochain et les banques ont, d’ores et déjà, pris les mesures nécessaires et ont annoncé la suspension des carnets de chèques dans leur ancienne version, mettant ainsi un terme à toute tentative d’un retour en arrière. Pourquoi alors ces bruits de couloir tendant à donner raison aux dépositaires de l’initiative du moment que les dés sont jetés ?
Quel impact pour la nouvelle initiative parlementaire
Bien évidemment, il est du rôle des parlementaires de jouer pleinement le rôle de « caisse de résonance » de la société et en particulier des chefs de petites et moyennes entreprises qui ont manifesté leur crainte à l’égard de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi en raison du grand nombre de chèques toujours en circulation et pour bien d’autres raisons se rapportant aux transactions financières sur le marché.
À ce propos, l’expert en économie et professeur Ridha Chkoundali a mis en valeur la grande importance de l’initiative en question. Dans une déclaration à La Presse, il a tenu à féliciter la récente démarche de certains députés d’autant que la formule du chèque domine les transactions financières.
Dans ce même contexte, il évoque ce qu’il qualifie d’objectifs contradictoires de la Banque centrale de Tunisie (BCT). D’une part, la BCT veut réduire les prêts pour la consommation à travers la nouvelle loi, mais d’autre part, elle évoque la possibilité de la mise en circulation de cartes bancaires permettant le paiement par facilité comme alternative fiable au chèque. «Il y a comme un manque d’harmonie en matière de politique économique menée par l’État», fait remarquer Ridha Chkoundali. Il indique que la fixation préalable d’un plafond pour les chèques selon la situation financière du client, imposée dans la nouvelle loi, est «peu pratique». Elle risque de compliquer ainsi les opérations des commerçants et de leur clientèle.
De son côté, le député Maher Ktari, signataire lui aussi de l’initiative, a tenté dans une récente déclaration à une radio privée de développer l’esprit de leur proposition. Il s’agit d’un report de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi pour que les banques et les utilisateurs de chèques trouvent une alternative appropriée à cette nouvelle situation. En revanche, cette sortie médiatique du député en question visant à insister davantage sur la nécessité de suspendre, pour une durée bien déterminée, l’application de certains articles de la nouvelle loi sur les chèques et les rumeurs qui ont accompagné le dépôt de cette initiative ont été suivies de vives réactions émanant d’autres députés refusant catégoriquement son report.
Des rumeurs visant à perturber le processus de réforme législative ?
Dans cette optique, la vice-présidente de la Commission du règlement intérieur, des lois électorales, des lois parlementaires et de la fonction électorale, Sonia Ben Mabrouk, a été catégorique et s’est opposée à toute tentative à un retour en arrière.
Dans un post publié sur sa page officielle sur les réseaux sociaux, elle explique que «Les nouvelles qui circulent sur le report de la mise en œuvre de la loi sur les chèques sans provision sont sans fondement».
Et d’ajouter que «La loi sera appliquée dans le délai spécifié, comme annoncé officiellement».
La députée Sonia Ben Mabrouk a indiqué que «Les institutions de l’État sont engagées à mettre en œuvre cette réforme qui est dans l’intérêt de tous, d’autant que la plateforme électronique dédiée à sa mise en œuvre est prête à fonctionner efficacement. Le Parlement soutient cette démarche dans le cadre de l’intérêt national suprême, ce qui confirme l’engagement en faveur de réformes structurelles sans recul».
Les rumeurs qui circulent concernant le report de la mise en œuvre de la loi a tendance à perturber le processus de réforme législative, alors que la loi vise, principalement, le renforcement de la confiance sur le plan des transactions financières, à réguler le marché et à garantir les droits des opérateurs économiques. «L’État est déterminé à avancer sur cette voie pour assurer la stabilité du système économique et protéger l’intérêt public».
Il est à rappeler que le Gouverneur de la BCT, Fethi Zouhaier Nouri, a tenu une réunion de travail le 24 janvier avec les hauts responsables des banques, de l’Office national des postes, et de la Société Tunisie clearing (Dépositaire central des titres et gestionnaire du système de règlement/livraison des titres). En point de mire, le suivi de la mise en œuvre des dispositions de la nouvelle loi relative aux chèques, notamment les préparatifs du secteur bancaire pour le 2 février 2025, date prévue du lancement de la plateforme électronique des chèques et de l’entrée en vigueur des nouvelles formules du chèque. À cette occasion, il a exhorté les banques et l’office national des postes à prendre toutes les mesures nécessaires et les précautions requises pour fournir aux clients les nouvelles formules de chèques dans les délais, tout en proposant des solutions de paiement alternatives pour répondre à leurs attentes.