Accueil Société Entretien avec Dr Tahar Sfar, vice-président du Comité technique de vaccination : Aucun risque d’infertilité avec le vaccin HPV

Entretien avec Dr Tahar Sfar, vice-président du Comité technique de vaccination : Aucun risque d’infertilité avec le vaccin HPV

La Tunisie s’apprête à introduire le vaccin contre le papillomavirus humain (HPV) dans son calendrier de vaccination. Dans le monde, plus de cent trente pays ont eu raison de croire en l’efficacité dudit vaccin en tant qu’outil performant de lutte contre le cancer du col de l’utérus. Ce dernier gagne du terrain chaque jour. En 2022, il a été la cause du décès de pas moins de 310 mille femmes dans le monde. Dans notre pays, nous enregistrons chaque année quatre cents nouveaux cas dont 50% sont à un stade avancé… Négligeant le dépistage précoce, les femmes sont prises au piège par une maladie vilaine car silencieuse, asymptomatique et grave. Le vaccin vient, ainsi, remédier à une prévention manquante pour protéger les femmes de demain contre la maladie. Pour avoir une idée claire sur le vaccin et écarter tout préjugé, Dr Tahar Sfar, vice-président du Comité technique de vaccination, répond favorablement à La Presse.

Pourquoi le Comité technique de vaccination a-t-il choisi ce timing pour introduire le vaccin contre les papillomavirus humains (HPV) dans le calendrier de la vaccination ?

Parce qu’il y a un temps opportun à tout ! Le calendrier de la vaccination ne cesse de subir des modifications en guise d’actualisation et ce, en prenant en considération et les priorités et le budget alloué à cet effet. 

En 2020, par exemple, nous avions introduit un vaccin qui avait coûté à l’Etat vingt millions de dinars. La lutte contre les méningites, lesquelles menaçaient grandement la santé infantile, avait nécessité une enveloppe de près de 50MD pour l’acquisition des vaccins. En 2019 et 2020, des cas notables d’hépatite virale A jugés comme étant sévères ont été enregistrés dans les écoles, ce qui nous avait amenés à recourir à la vaccination. La coqueluche avait repris, quant à elle,  de plus belle, non seulement à l’échelle nationale mais aussi internationale, d’où l’impératif d’introduire le vaccin au profit des écoliers inscrits en première année de l’enseignement de base. C’est dire que les priorités vaccinales s’imposent par les situations épidémiologiques et selon les moyens disponibles. 

Revenons au vaccin contre les HPV. Il s’agit d’un vaccin ayant pour finalité de lutter contre le papillomavirus humain, lequel est responsable du cancer du col de l’utérus dans près de 95% des cas. Ce vaccin a prouvé son efficacité et sa sécurité à l’échelle mondiale. Aussi, avant de l’introduire dans le calendrier de vaccination, avons-nous pris soin de vérifier son efficacité, sa sécurité et son impact positif dans la lutte contre le cancer du col de l’utérus. D’ailleurs, les études et les publications ayant porté sur sa fiabilité et son efficience ont toutes confirmé son impact salutaire dans la réduction du nombre de cas de cancer du col utérin et ce, dans les pays qui l’ont introduit dans leurs calendriers de vaccination. D’autant plus qu’elles ont infirmé tout risque d’effets secondaires graves ou d’éventuelles pathologies pouvant résulter du vaccin, tant à court qu’à long terme.

La lutte contre le cancer du col de l’utérus s’impose-t-elle uniquement via le vaccin ?

Non. Le vaccin a pour finalité de prévenir la maladie et ce, dans 90% des cas. Néanmoins, et à partir de l’âge de trente ans, toute femme est appelée à recourir au dépistage, et ce, en guise de prévention et de traitement à temps en cas de dépistage positif. Or, en Tunisie, nous enregistrons chaque année pas moins de quatre cents nouveaux cas de cancer du col de l’utérus dont 50% sont à un stade avancé. C’est que la maladie est asymptomatique et que les femmes ne s’en rendent compte que tardivement. Aussi, le vaccin aura-t-il pour rôle de prévenir ce cancer et de protéger les jeunes générations de femmes contre une maladie qui s’avère fatale faute de dépistage à temps.

Quelle est la tranche d’âge concernée par le vaccin ?

L’attribution du vaccin contre les HPV est fixée, mondialement, entre 11 et 14 ans. Mais plus l’on se vaccine précocement, mieux c’est. En Tunisie, nous avons choisi d’administrer le vaccin aux fillettes âgées de douze ans, soit celles inscrites en sixième année de l’enseignement de base. Cette population-cible sera vaccinées au sein des écoles début d’avril. Cela dit, pour les filles âgées de douze ans et qui ne sont pas scolarisées, elles sont appelées à se faire vacciner contre les HPV auprès des dispensaires et ce, début mai.

Est-il possible pour les filles âgées de plus de douze ans de bénéficier du vaccin en guise de rattrapage ?

Pour le moment, nous nous contentons de l’âge fixé pour le démarrage de l’introduction du vaccin dans le calendrier de vaccination. Il s’agit d’une priorité visant à administrer le vaccin à un plus grand nombre de fillettes âgées de douze ans. C’est en étant collectif que le vaccin est d’une efficacité redoutable. Et c’est en visant les fillettes âgées de douze ans que nous serons rassurées quant à la prévention de la maladie chez cette génération de futures femmes. Quant à celles qui ont dépassé cet âge, nous leur recommandons de recourir au dépistage précoce du cancer du col utérin et ce à partir de l’âge de trente ans.

Quels sont les moyens de contamination par les HPV ? 

Les moyens de contamination par les HPV sont les relations sexuelles et le toucher des parties génitales avec les mains.

Les causes de la polémique sur le vaccin semblent, pour ainsi dire, subjectives et n’ont rien à avoir avec les craintes d’éventuels risques sur la santé des filles qui seront vaccinées. Comment pourriez-vous corriger cette perception et convaincre les parents de l’impératif de faire vacciner leurs filles ?

Nous savons tous qu’à l’âge de douze ans, les filles n’ont pas de relations sexuelles. L’idée étant, non pas d’encourager les jeunes générations féminines à avoir des relations sexuelles précoces, loin de là ! Nous visons, via le vaccin, à lutter contre le papillomavirus humain, lequel est, non seulement, responsable du cancer du col de l’utérus, mais aussi d’autres problèmes de santé. Le virus peut provoquer, en outre, des inflammations de l’utérus et engendrer, par la suite, des problèmes d’infertilité. 

D’ailleurs, pour ceux qui craignent des risques d’infertilité, je tiens à leur dire que c’est bien le virus qui représente un risque et non le vaccin; ce dernier ayant pour fonction de lutter contre le virus et ses répercussions, dont l’infertilité. Et si bon nombre de couples négligent le certificat prénuptial, ils pourraient au moins, grâce au vaccin contre les HPV, être quasiment sûrs que la femme est prévenue contre le cancer du col de l’utérus et des problèmes de santé sexuelle et reproductive y afférents. 

Charger plus d'articles
Charger plus par Dorra BEN SALEM
Charger plus dans Société

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *