La chute fracassante du «gouvernement Jemli» mérite évidemment retour. L’ idée, même, est que l’on n’arrêtera pas d’en parler avant longtemps.
Pourquoi ?
Pour une raison simple, d’abord. Récusée, certes, par Ennahdha et les proches d’Ennahdha, mais claire, à vrai dire, au regard de tout un chacun. Ce ne sont pas, en fait, M.Jemli et ses ministres qui accusent ce coup-là, c’est l’islam politique et plus généralement l’islamisme en Tunisie qui entrevoient, peut-être ainsi, leur fin.
L’islam politique a pratiquement régné en «solitaire» depuis 2011. Depuis la Constituante et le premier gouvernement de la révolution. Presqu’une décennie maintenant, pendant laquelle le parti de Rached El Ghannouchi à entretenu sa suprématie en usant de tous les moyens, légaux comme de ruse politicienne. Les adversaires «laics» l’y ont aussi aidé, à force d’inexpérience et de naïveté.
La mauvaise gouvernance a persisté, néanmoins. Trop c’est trop. La masse électorale nahdhaouie a fini par fondre ; et avec elle, petit à petit, les «argumentaires» religieux. Le refus essuyé par Jemli et son gouvernement vendredi 10 janvier à l’ARP en résultait droit.
Et il semble bien que ni Ennahdha ni son candidat président du gouvernement n’en ont évalué la facture. Laquelle s’affichait pourtant. Nette, sans bavure.
Avec effet immédiat : la mathématique du vote et la mise à l’écart d’un «premier parti» subitement devenu minoritaire.
Avec des conséquences à craindre dès demain. L’échec du «gouvernement du président» par exemple, et le renvoi à de nouvelles élections. La pression de la dette extérieure et l’incapacité, imminente, d’un Etat sans ressources, retardé par ses interminables «luttes de clans».
Avec, surtout, l’éventualité, d’une crise constitutionnelle et l’appel au peuple à choisir, de nouveau, entre parlement et président.
Incontestablement le 10 janvier 2020 fera date dans l’histoire de notre pays.
Incontestablement, le renvoi du «gouvernement Jemli» à l’ARP aura constitué un tournant. Certains en ont souri. A tort, croyons-nous. Les «protagonistes » n’avaient sans doute pas la carrure, mais l’enjeu pesait, et pèsera encore de tout un poids. La jeune démocratie tunisienne rectifiait ainsi le tir, corrigeait les dérives d’une décennie, s’engageait enfin sur la bonne voie.
Sûr : on n’arrêtera pas d’en parler avant longtemps.
10 janvier 2020 : Une date, un tournant
Tunisia's Prime Minister-designate Habib Jemli (R - below) and parliamentarians stand during the national anthem at the start of a plenary session in the capital Tunis, on January 10, 2020, for a confidence vote on his proposed cabinet line-up. - Jemli unveiled on January 2, a proposed government composed of independent figures, after months of negotiations between political parties to fill positions failed. The cabinet of 28 ministers, most of whom are unknown to the general public, including four women, needs to receive parliamentary assent. (Photo by FETHI BELAID / AFP)