Accueil A la une Trois questions à Matthias Knappe, responsable de programme pour les fibres, les textiles et les vêtements au Centre du commerce international : « La Tunisie a l’occasion d’attirer de nouveaux clients pour le secteur textile »

Trois questions à Matthias Knappe, responsable de programme pour les fibres, les textiles et les vêtements au Centre du commerce international : « La Tunisie a l’occasion d’attirer de nouveaux clients pour le secteur textile »

La crise sanitaire mondiale du Covid-19 a eu sans doute de graves répercussions sur l’économie mondiale et en particulier sur le commerce mondial. En Tunisie, les premiers à en pâtir sont les acteurs de l’industrie textile, qui dépendent largement des commandes des donneurs d’ordre, désormais en chute libre.  Mais cette crise est peut-être aussi une opportunité pour le secteur qui devra s’adapter aux mutations, exploiter les nouvelles niches et explorer de nouveaux marchés. Pour mieux comprendre ces nouveaux enjeux, nous avons interrogé Matthias Knappe, responsable de programme pour les fibres, les textiles et les vêtements au Centre du commerce international basé à Genève (Suisse), qui exécute le programme GTEX/Menatex, actif en Tunisie, et qui travaille à l’amélioration de la compétitivité de la chaîne de valeur.

Le secteur textile vivait un léger mieux depuis quelque temps mais voilà que la crise sanitaire du Covid-19 est passée par là. La conjoncture est difficile, quelle est la situation aujourd’hui du secteur dans le monde ?

Alors que les marchés rouvrent  lentement, la demande pourrait redémarrer quelque peu. Cependant, la demande sera très timide car les consommateurs chercheront à acheter des articles essentiels et durables plutôt que des produits de haute couture.

Du côté de l’offre, de nombreux pays, en particulier en Asie, recommencent à fonctionner. En Chine, les usines ouvrent progressivement, mais les usines de textile fonctionnent encore à capacité réduite. Le Vietnam est censé fonctionner à environ 70% de sa capacité, car le pays a été moins touché par la pandémie de Covid-19 . Toutefois, le Bangladesh et l’Inde sont fortement touchés. Les exportations du Bangladesh ont chuté de 85 % en avril. L’Inde fonctionne à environ 30 % tandis que l’Indonésie fonctionne à 50 %

Plus proche de la Tunisie, le Maroc est également fortement touché avec 80-90% de toutes les usines fermées et il en va de même pour le Madagascar, un autre pays qui dessert les marchés traditionnels tunisiens.

Cependant, cette crise conjoncturelle peut-elle être fatale pour le secteur ou au contraire porteuse de nouveaux espoirs ? 

Personne ne sait vraiment comment évolue la pandémie. Les deux principaux marchés de la Tunisie sont fortement touchés, à savoir la France et l’Italie. Ces marchés ne feront que se redresser lentement et on ne s’attend pas à ce que la demande des consommateurs revienne au niveau d’avant Covid-19 dans un avenir proche. Cela peut causer des problèmes pour les fabricants en Tunisie et ailleurs. Peut-être que toutes les entreprises n’y arriveront pas d’ici là.

Plusieurs usines de textile en Tunisie sont fermées, plusieurs autres résistent encore, sommes-nous en train de gagner ou de perdre la bataille stratégique ? 

Tout le monde est perdant et personne ne gagne pour l’instant. La question serait de savoir à quelle vitesse les entreprises et les secteurs pourront s’adapter à l’évolution des besoins des marchés et trouver des solutions de rechange en termes de diversification des marchés et de  la base d’approvisionnement. La Tunisie doit trouver d’autres marchés pour remplacer ceux de l’Italie et la France. Que ce soit en Europe, dans le monde arabe ou en Afrique dans son ensemble, ces marchés doivent être explorés

Du côté de l’approvisionnement, la grande majorité des tissus proviennent d’Europe et de Turquie, ce qui pose actuellement de gros problèmes. La diversification de la base d’approvisionnement devient une priorité pour le secteur. Il est peu probable que les usines veuillent investir en Tunisie, compte tenu de la taille relativement petite du secteur à l’échelle mondiale. Cependant, attirer des usines (ainsi que des bureaux d’achat) pour investir en Afrique du Nord, desservant tous les pays de la région Mena, pourrait devenir une alternative. Cela exige toutefois une coopération entre les quatre pays, ce qui n’est pas le cas actuellement. Mais une crise est toujours une occasion de changer, à mon avis le changement est nécessaire!

Par ailleurs, les marques et les détaillants apprennent également de la crise et tendront à diversifier leur base d’approvisionnement. En ce sens, la délocalisation deviendrait intéressante pour eux. Ainsi, la Tunisie, comme le Maroc, ont ici l’occasion à ne pas manquer d’attirer de nouveaux clients.

Enfin, il ne faut pas oublier le marché local. Comme d’autres ne peuvent pas livrer, les consommateurs tunisiens doivent aussi être servis. En outre, la production de vêtements médicaux, à commencer par les masques, est une grande opportunité pour satisfaire les besoins du marché local, mais aussi les marchés traditionnels de la Tunisie qui ont besoin d’avoir un approvisionnement régulier de ces articles et ne disposent pas des capacités nécessaires pour les produire de manière efficace et rentable. Le projet GTEX/Menatex financé par le Secrétariat Suisse à l’Economie et le souvernement suédois et exécuté par le Centre du commerce international aide déjà les entreprises tunisiennes à le faire.

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Un commentaire

  1. Liberte

    15 mai 2020 à 11:10

    Comment voulez vous attirer des nouveaux clients pour le textiles en Tunisie, tâchez plutôt de garder les clients acquis, avec le coronavirus c’est dure

    Répondre

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