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Contrepoint | Autres causes, mêmes effets

«En vingt-trois ans de pouvoir, Ben Ali a bien appauvri le pays et abandonné ses régions, mais les dirigeants actuels font pire déjà, à mi-chemin».

Le propos est d’un doyen sécuritaire à la retraite. Il dit vrai. Il rappelle, surtout, à une étrange contradiction : les méfaits de Ben Ali étaient ceux d’un dictateur, ceux des dirigeants actuels interviennent en temps de démocratie.

Ben Ali disposait des richesses et des gens par l’oppression et la force. Les dirigeants de l’après-révolution font pire alors qu’ils sont sous contrôle de lois, d’une constitution, d’une presse libre, d’un parlement et d’institutions élus.

Le problème ? Nul n’était redevable d’une résistance à la dictature. L’extrême majorité des Tunisiens pliait, se taisait ou «s’accommodait», face aux abus de Ben Ali. Crainte légitime, naturelle, toujours compréhensible. Mais là, aujourd’hui, comment s’expliquer les dépassements, les violations, les compromissions, devenus «règles communes» de bas en haut, à tous les niveaux ? Comment s’expliquer le silence des «ex-sujets» de la dictature désormais libres et citoyens ?

Le doyen sécuritaire n’exagère sans doute pas. Le pire depuis la révolution c’est une mauvaise gouvernance en continu. Ce sont des erreurs à répétition. Les incidents du Kamour, les révélations sur Elyes Fakhfakh, les déclarations intempestives de Kais Saïed n’ajoutent rien à l’usuel. La pauvreté et le chômage perdurent dans nos régions. Les hauts responsables, «trempant» dans des «affaires», existent depuis la Troïka. Et les accusations de Kais Saïed sont les mêmes depuis son investiture l’automne dernier. Economie défaillante, politique trouble, régime en crise, en dix ans rien n’a changé, rien n’a bougé. La sortie, peut-être, est que l’on parvienne, enfin, à en définir les raisons. Les stratégies d’experts, les propositions de constitutionnalistes et de politologues serviront plus tard. Une fois que l’on se sera bien expliqué pourquoi, dictature ou liberté, ce pays tombe dans l’égal travers. Pourquoi dictature et démocratie y conduisent aux mêmes tares.

Quelques réponses fusent tantôt. Nombre d’autres causes. Le régime : présidentiel ou parlementaire. Le système électoral : scrutin de liste ou scrutin nominatif. Le système économique, vieillot. La transition révolutionnaire, mal engagée.

Il y a sûrement des oublis. Volontaires ou pas. L’Education et la Culture en recul. La jeunesse, majoritaire, laissée pour compte. Le passéisme et l’idéologisme qui regagnent les esprits.

La question demeure : pourquoi la révolution produit-elle les mêmes effets que la tyrannie ?

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