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L’autre son de cloche

On se trompe complètement si on interprète uniquement les émeutes nocturnes de ces derniers jours d’un point de vue sécuritaire. On se trompe aussi si on poursuit cette diabolisation excessive du cri de désespoir de ces jeunes qui, malheureusement, ont vu des hors-la-loi s’immiscer et ternir l’image d’un ras-le-bol. En condamnant sur toute la ligne le grabuge et les dégâts causés aux biens publics et privés, on doit admettre par-delà tout que quelque chose ne tourne plus dans notre pays, et que cette colère juvénile et apolitique (contrairement à ce que prétendent certains politicards) vient de le rappeler. 

Ce qui s’est passé est lourd en messages codés, lourd en conséquences et en symbolique. Cela rappelle ce qui s’est passé il y a dix ans quand tout un système s’est effondré en quelques semaines sous le coup de revendications sociales issues de la classe juvénile en premier lieu et de ceux qui vivaient en marge de la société. Cela ressemble beaucoup au contexte actuel : des jeunes écartés, vivant dans la misère et l’exclusion, ont exprimé leur colère à leur manière. Ce ne sont pas des criminels, ni de jeunes manipulables en bonne partie. C’est des jeunes qui appliquent un modèle propre à eux. Leur façon de se révolter ne se fait pas le jour, mais la nuit, comme c’est le cas dans toutes les cités des banlieues dans le monde entier. La galère exprimée à travers cette violence et cette insistance devraient être bien saisies par les décideurs politiques. C’est un signal d’alarme significatif sur l’effondrement du système politico-économique post-14-Janvier. C’est la vérité que les profiteurs veulent cacher. Allez voir comment cette jeunesse partout en Tunisie (dans les quartiers populaires) vit en marge de la société sans travail, sans couverture sociale, sans hôpitaux, sans éducation, sans accompagnement, sans dignité et sans espoir et confrontée aux tentations de la délinquance. Les dirigeants politiques de notre pays, aussi nombreux qu’ils sont (avec la divergence des intérêts et les ratages que l’on connaît), n’ont pas saisi le message à temps. Les choses ont empiré à tous les niveaux, y compris pour la classe moyenne et les cadres et compétences poussés à l’émigration. Ce qui s’est passé ne doit pas être pris uniquement comme des faits criminels (la loi s’en occupe), mais aussi comme une forme aiguë d’exaspération et de ras-le-bol collectif d’une partie de la société écrasée et oubliée. Ce système politique doit être revu le plus tôt possible pour éviter que les choses empirent. Comprendre d’abord ces « rebelles », savoir communiquer avec eux et présenter une offre consistante est la seule solution pour panser la plaie saignante encore. On le dit encore une fois, si on n’a pas saisi le message, c’est très grave pour la période à venir. Agissons vite dans le cadre d’une approche participative et sérieuse. Mieux vaut tard que jamais !

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