Après les menaces qui ont longtemps marqué ses différentes prises de position, le député gelé d’Al-Karama Seïfeddine Makhlouf passe à un nouveau mode et un autre genre de discours, présageant que les « salaires ne seront plus versés, que les produits subventionnés par l’Etat ne seront plus disponibles, que le dinar poursuivra sa chute et que les prix continueront à augmenter… C’est alors qu’on saura quelle est la partie qui constitue un danger imminent, durable et inévitable ». Il rappelle bien sûr à qui veut bien l’entendre « que la suspension des travaux du Parlement et la dissolution du gouvernement conduiront, inéluctablement à l’absence de ressources financières pour l’Etat, étant donné que, conformément au principe du consentement du peuple, ces ressources dépendent de l’approbation du Parlement».
Peut-on dire qu’il s’agit là de propos d’un mauvais perdant ? Au peuple de juger. Il n’en demeure pas moins que certains acteurs politiques et certains députés continuent encore à livrer une guerre sans merci et usent de tout, croyant encore que la souveraineté parlementaire est un luxe, voire un caprice. C’est tout simplement regrettable que des gens censés bien raisonner se laissent entraîner dans des considérations dont il n’est pas difficile de deviner les motivations. Et comme tout le monde a ses raisons, son avis « pertinent » sur la chose politique, les lignes rouges sont à chaque fois dépassées.
Dans tout regroupement humain, il y a des moments de tension dus aux divergences et à l’incompréhension. Mais l’ampleur des conflits typiquement tunisiens est plus qu’une incompréhension. Ils étalent au grand jour un malaise de plus en plus refoulé. Les dérapages des acteurs politiques, accumulés pendant plus d’une décennie, font encore froid dans le dos, même après le 25 juillet lorsque le Président de la République avait pris les choses en main. Ils véhiculent toujours tous les travers, malheureusement non contenus dans les valeurs et les idéaux.
Pourquoi s’affronte-t-on quand tout peut se régler sans surenchère ? Si les élus qui ont perdu la parole, mais aussi le pouvoir adoptent aujourd’hui un autre discours, une autre attitude, si les règles vont dans le sens du respect et de la volonté du peuple, la classe politique aura fait un grand pas, surtout quand on verra les différentes parties concernées assumer réellement le rôle qui leur incombe.
L’embrasement du paysage politique est fort préjudiciable. Certains acteurs ne cessent de s’illustrer par l’incapacité à gérer les problèmes de fond, notamment ceux liés aux besoins des Tunisiens. Les considérations partisanes et personnelles sont la principale motivation d’un dérapage qui n’a que trop duré.
Dans un contexte difficile à gérer et marqué notamment par une crise à la fois économique, sociale et sanitaire, la Tunisie n’a plus besoin aujourd’hui de nouveaux foyers de tension supplémentaires. L’intérêt national devrait calmer l’ardeur des uns et des autres, si l’enjeu n’est autre que la recherche de la sérénité et du progrès du pays.
Le comportement et les déclarations de certains députés, dirigeants de partis et de groupements politiques est un aperçu type de la plus flagrante dérive, de l’expression la plus antagoniste et la plus ambiguë, du culte partisan et de l’intérêt personnel.
Quoi qu’on en dise et quoi qu’on en pense, la grande famille politique tunisienne est condamnée aujourd’hui à travailler dans l’intérêt du pays. Si on ne met pas fin aux polémiques, la situation risque d’empirer à cause de multiples interférences aux dessins inavoués, et la confusion et l’imbroglio, synonymes de rechute dans les méandres du marasme, ne disparaîtront pas de sitôt.
En tout cas, le spectacle n’a que trop duré !…