C’est à partir d’aujourd’hui que le chef de la diplomatie syrienne, Fayçal Al Mokdad, entame une visite officielle en Tunisie sur invitation de son homologue tunisien, Nabil Ammar. Un pas qui consolide la nouvelle orientation du rétablissement des relations diplomatiques entre les deux pays suite à l’initiative du Président de la République Kaïs Saïed.
Cela fait plusieurs années que cette reprise des relations entre les deux pays est une réclamation populaire au vu des liens de fraternité entre les deux pays et les deux peuples et l’histoire commune des deux nations. Aujourd’hui, les deux pays semblent avoir tourné une page sombre de leurs relations qui prend ses origines dans la Conférence internationale des amis de la Syrie organisée en 2012 en Tunisie puis de la rupture des relations annoncée unilatéralement par l’ancien président provisoire de la République Moncef Marzouki.
Au fait, ce nouveau rebondissement vient dans un contexte régional visant à réintroduire la Syrie dans le giron des pays arabes. En effet, après douze ans d’exclusion en raison de la guerre civile qui ravage ce pays, la Syrie s’apprête à reprendre sa place au sein de la Ligue arabe.
Il faut rappeler que ce processus a été lancé par l’Algérie il y a plusieurs mois, et le retour de la Syrie au sein de la Ligue devait se concrétiser lors du dernier Sommet de l’organisation panarabe le 1er novembre dernier à Alger.
Mais il a été reporté à la demande de Damas qui avait souhaité que la question ne soit pas soulevée lors du Sommet de la Ligue arabe d’Alger. Mais la diplomatie algérienne a déblayé le terrain pour le retour de la Syrie au sein de la Ligue arabe. Un retour qui pourrait être acté lors du prochain Sommet arabe le 19 mai prochain à Riyad.
La Tunisie, par le biais du Président de la République, a en effet adhéré à ce processus en rouvrant son ambassade à Damas et en annonçant le rétablissement des relations entre les deux pays. La réaction de la diplomatie syrienne a été immédiate. Mercredi dernier, la Syrie et la Tunisie ont annoncé, dans un communiqué conjoint, qu’en réponse à l’initiative du Président de la République tunisienne, Kaïs Saïed, de désigner un ambassadeur à Damas, la Syrie a décidé de rouvrir son ambassade en Tunisie.
«Le gouvernement syrien a annoncé son approbation immédiate de l’annonce du Président Kaïs Saïed et a décidé de rouvrir l’ambassade de Syrie en Tunisie, prochainement», lit-on dans un communiqué de l’agence de presse syrienne Sana.
«Les deux parties, soucieuses de rétablir le cours normal des relations bilatérales, les consultations et la coordination entre les ministres des Affaires étrangères des deux pays se poursuivent dans ce sens», souligne le même communiqué.
Quelles conséquences ?
Outre le grand retour à la normale diplomatique qui profite aux deux pays, quelles sont les conséquences d’une telle décision d’envergure ?
La première conséquence n’est autre qu’une meilleure coordination au sujet des terroristes tunisiens embrigadés en Syrie. Ce nouveau rapprochement peut aider les deux pays à rouvrir ce dossier et à poursuivre en justice tous ceux qui sont impliqués, notamment dans les réseaux d’envoi de jeunes Tunisiens dans les foyers de tension.
En effet, aujourd’hui, ouvrir le dossier des opérations d’envoi de jeunes dans ces zones de conflits, en étroite liaison avec des affaires terroristes, relève d’une question de sécurité nationale. La Tunisie, qui s’est engagée dans une longue guerre contre le terrorisme, doit avant tout se pencher sur ce dossier et en trouver les solutions sécuritaires pour prévenir de nouvelles opérations de ce genre qui mettent en péril la sécurité des Tunisiens.
Sur le plan économique, le rétablissement des relations pourrait ouvrir la voie à des échanges commerciaux plus importants entre les deux pays, ainsi qu’à des investissements dans divers secteurs. Cela pourrait potentiellement stimuler les économies des deux pays.
Le rétablissement des relations pourrait aussi donner lieu à un dialogue entre les deux pays sur les questions régionales et internationales, y compris les conflits en Syrie et en Libye.
Cela pourrait également renforcer la position de la Tunisie en tant que médiateur potentiel dans les conflits régionaux.
Retour sur les faits
Les relations diplomatiques entre la Syrie et la Tunisie ont été interrompues depuis 2012, lorsque la Tunisie, sur insistance de Moncef Marzouki, a expulsé l’ambassadeur syrien en signe de protestation contre «la répression du gouvernement syrien contre les manifestants pro-démocratie». Depuis lors, les relations entre les deux pays ont été tendues.
Du temps de Marzouki, la Tunisie avait exprimé à plusieurs reprises son soutien à l’opposition syrienne et a appelé à une transition politique en Syrie.
La Syrie, de son côté, a accusé la Tunisie de soutenir les groupes armés opposés au régime de Bachar al-Assad.
Cependant, en 2015, la Tunisie avait fait un pas vers le rétablissement des relations diplomatiques en désignant un représentant consulaire auprès de Damas pour suivre la situation des Tunisiens en Syrie.