Accueil A la une Fonction publique : Le lourd fardeau de l’Etat…

Fonction publique : Le lourd fardeau de l’Etat…

 

Le secteur public est devenu un véritable gîte de présentéisme stérile dont le coût pèse lourd sur l’Etat. Ainsi, les fonctionnaires marquent leur présence par habitude, par obligation.

Au moment où les pays arabes tentent de se délester de la charge immensurable de la bureaucratie, en misant davantage sur la qualité des prestations et en réduisant, parallèlement, la masse salariale, la Tunisie, elle, se trouve piégée par une fonction publique qui engloutit pas moins de 60% du PIB ! Un lourd fardeau que traîne l’Etat surtout après 2010, période durant laquelle il y a eu un véritable boom démographique au sein du secteur public, et ce, au nom de la compensation d’un «militantisme» dont la rémunération avait, semble-t-il, tardé à venir… Il faut dire que les normes mondiales en la matière sont bien claires. La fonction publique consomme 20% du PIB dans les pays riches et 30% du PIB dans les pays pauvres. C’est du moins la règle établie par le FMI. Néanmoins, dans les pays arabes, la charge salariale du secteur public s’élève à 40% du PIB, en ce qui est déjà dramatique. En Tunisie, ce taux atteint les 60%, ce qui dit long sur un problème d’ordre stratégique, structurel et de rendement.

Présentéisme, le revers de la médaille !

En effet, l’administration publique supporte au-delà de ses capacités, dont l’effectif dépasse 660 mille fonctionnaires au total. Soit un recrutement massif dont elle n’a pas vraiment besoin. Sans pour autant oublier les milliers d’agents arbitrairement affectés, après les événements du 14 janvier 2011 sur la base de diplômes falsifiés pour servir des intérêts étriqués. L’on peut, ainsi, en déduire les conséquences sur le rendement et la qualité des services. Le secteur public est devenu un véritable gîte de présentéisme stérile dont le coût pèse lourd sur l’Etat.

Les fonctionnaires marquent leur présence par habitude, par obligation. Leur rituel de travail obéit non pas à la volonté de hisser le niveau du rendement et de la productivité, mais plutôt à une routine infligée par un horaire administratif un peu trop contraignant.  D’ailleurs, d’après une enquête intitulée : Prévalence de la valeur du travail et le contrôle de la présence, réalisée en 2016 dans le cadre d’une campagne de contrôle de la présence des employés de la fonction publique, l’on constate que le taux du retard des agents de l’Etat, notamment pour la première heure du travail, frôle les 40% dans certaines administrations. Certes, le taux du retard est de 13%. Néanmoins, dans les entreprises publiques, il oscille entre 18% et 36%. Le prétexte majeur n’étant autre que les conditions de transport (dans 58%), il traduit, cependant, cette incapacité à être ponctuel pour entamer sa mission sous de bons auspices.

Horaire administratif : accablant et stérile !

Là encore, il convient de réfléchir sur l’horaire administratif et ce qui en résulte aussi bien sur le plan sociologique, familial, psychologique que sur le plan productif. Nul besoin de prouver qu’il n’est point évident de faire preuve de motivation et de productivité au moment où le travail revêt un aspect d’«incarcération» quotidienne, perpétuellement renouvelée presqu’à vie !

Du coup, travailler devient, pour les plus sérieux et les moins rebelles, synonyme de présentéisme. Ils sont au boulot, physiquement, conformément aux instructions. Toutefois, leurs esprits sont ailleurs.

Le travail devient ainsi machinal et au ralenti. Pour les moins disciplinés, l’absentéisme dévoile nettement leur appréciation de la valeur du travail. Selon les résultats de la même enquête, le taux d’absentéisme dans l’administration tunisienne est de 14% avec des disparités flagrantes, allant de 1% dans certaines administrations de la fonction publique à 47%, soit près de 50% ! Encore faut-il rappeler que ladite enquête a été menée via des visites effectuées dans 47 organismes publics, touchant un échantillon représentatif des fonctionnaires de l’ordre de 5.500 agents.

Place à la réforme

Pour récapituler, il faudrait imaginer une balance à dominante déséquilibrée. Cette balance penche vers un budget colossal, déversé par l’Etat pour subvenir à une masse salariale des plus élevées à travers le monde, quitte à s’endetter de mois en mois pour honorer ses engagements éthiques. En contrepartie, le rendement s’avère être des moindres, avec une compétence qui fait souvent défaut, en raison d’une série d’embauches sur fond de népotisme et de complaisance postrévolutionnaire. Et quoique la Tunisie ait mis en stand-by les recrutements de la fonction publique pendant un certain temps, réussissant tout de même à faire chuter la masse salariale de la fonction publique à seulement 15% du PIB en 2017, la courbe a, depuis, repris la hausse pour atteindre 18% en 2020 et, probablement, 20% actuellement.

Ce cercle vicieux ne serait interrompu qu’en réformant l’administration tunisienne sur des bases solides et des choix judicieux. Autant dire, trouver le juste équilibre entre le coût—qu’il convient de réduire afin de s’aligner conformément aux standards internationaux en vigueur et d’éviter l’endettement de l’Etat auprès des banques— et la valeur du travail, soit la valeur ajoutée, le rendement, la productivité et l’efficacité des prestations.

Pour cela, la réforme doit reposer sur des critères innovants, prenant en considération les moyens de l’administration, la nécessité de la moderniser et de répondre favorablement et efficacement aux attentes du citoyen.

Une réforme qui accordera une place de choix aux attentes des fonctionnaires surtout concernant les conditions de travail, l’accès à la formation continue, ainsi que les moyens à même de les motiver dont la révision de l’horaire administratif, car, finalement, autant travailler quatre ou cinq heures par jour que de faire semblant de travailler durant les huit heures-supplices !

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