Entre pas de vision, ou une vision trop étroite, la plupart des clubs, y compris les grands, se perdent et se trompent d’opportunité. Le modèle préconisé dans la formation des footballeurs — leur accompagnement et leur épanouissement — navigue à contre-courant. Les horizons manquent pour la plupart des directeurs techniques. On a toujours pensé qu’ils étaient capables de s’imposer et de convaincre, mais c’est sans compter le fait qu’ils sont toujours menacés par la révélation d’un possible démon intérieur chez leurs employeurs, qui n’est autre que la contrainte liée aux résultats et à l’obsession de ne pas perdre.
A l’opposé du travail accompli par la Direction technique au sein de la fédération, notamment depuis l’arrivée de l’actuel directeur technique, Sghaïer Zouita, et le nouveau souffle apporté aux centres sectoriels, la formation des jeunes dans les clubs est devenue une source d’inquiétude, une crainte avérée. En l’absence de stratégies et de travail de fond, le risque de l’assèchement de tout le football tunisien est réel, tout comme la menace de s’égarer sur un terrain glissant.
Face à une population footballistique en mutation constante, les clubs ne donnent pas vraiment l’impression de pouvoir entretenir les jeunes joueurs, encore moins développer les structures de formation les plus conséquentes. Si on concède que l’avenir du football tunisien devrait être mieux pris en compte, on regrette que ces clubs ne favorisent plus, sinon très peu, la plénitude et l’éclosion souhaitées des jeunes. De tout temps, l’on ne cessait de parler de reconstruction. De réédification. De rétablissement de valeur. Mais l’on n’arrive pas toujours à faire face aux exigences du quotidien. Donc pas de changement, et encore moins de progrès. Tant que l’on ne valorise pas le rôle et la vocation du premier responsable du travail au niveau des jeunes, et qui n’est autre que le directeur technique. Tant qu’on l’empêche encore à se fondre dans un cadre défini et à en façonner les règles.
Il est facile aujourd’hui de spéculer sur la valeur éducative et l’exemplarité du sport tunisien et de ses acteurs. Nous sommes en effet dans l’obligation de constater, et par conséquent d’affirmer, que le fossé qui sépare la pratique de la réalité est évident. L’authenticité et la conformité du football n’ont jamais été aussi compromises, pour ne pas dire bafouées.
Cette situation nous amène à constater que les insignifiances et les dérives ne sont plus une affaire marginale au sein des petits clubs, qui concerne des techniciens qui n’arrivent pas à se rendre utiles, et dont le mode de comportement et de travail fait ainsi système.
Tenir aujourd’hui une «comptabilité» sur les dérives engendrées par l’indisposition à donner aux directeurs techniques le temps et les meilleures conditions de réussite, les manquements et les erreurs avérées, ce qui aurait pu être accompli, ce qui risque encore de compromettre les parcours, relève d’un exercice de haute voltige. Il faut dire qu’il y a matière à discussion sur tout ce qui est entrepris aujourd’hui dans la formation des jeunes au sein des clubs. De façon générale, la plupart des clubs baignent, transpirent, dégagent et produisent un environnement qui est loin de répondre aux véritables exigences footballistiques. On a l’impression qu’ils évoluent dans une atmosphère instable où on ne voit pas comment on peut progresser sans se tromper. Le sens et la contrainte de la construction oubliés, l’on ne cesse de miser sur une conjonction immédiate de facteurs peu favorables pour obtenir des résultats et espérer durer un peu.
Si le football de haut niveau fait rêver et ne laisse personne indifférent, il implique souvent plusieurs élus. Indispensables pour certains, déterminants pour d’autres. La pluralité des activités sportives laisse entrevoir la possibilité pour chacun de prendre place, et aussi du plaisir dans chaque registre. Il est dur cependant de voir aujourd’hui des clubs renoncer à leurs acquis. Les valeurs sportives ont plus que jamais perdu leur sens, leur vocation. Elles font appel à des considérations qui n’avaient nullement leur place dans un temps désormais révolu. A la place des programmes et des projets, l’on a désormais droit à des agissements et des prises de position qui ne voient pas loin, qui ne prennent pas en considération les exigences du long terme.
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