Encore un jour exceptionnel à l’hémicycle, après une longue période de tractations et de manœuvres politiques marquant un processus de formation du gouvernement entravé et atypique, le vote de confiance au gouvernement Habib Jemli a enfin eu lieu. En effet en présence de 188 députés la séance plénière consacrée au vote du nouveau gouvernement s’est déroulée, hier, sous le dôme de l’ARP. Et même si l’événement est majeur, nous parlons de la mise en place d’un nouveau gouvernement qui devra prendre les commandes dans une conjoncture sécuritaire régionale tendue, ce sont les coulisses et les à-côtés de cette journée qui intéressent le plus.
Même si le démarrage de la plénière était prévue pour 9h du matin, jusqu’à cette heure le mouvement et l’activité dans le hall principal où les projecteurs des médias étaient tous braqués, étaient lents, et ce sont les députés du parti Ennahdha qui ont commencé à affluer en premier.
Progressivement, on commençait à apercevoir les différents ministres et secrétaires d’Etat proposés, qui ont commencé à faire connaissance le jour même du vote. Pour certains c’était aussi le temps des retrouvailles, et c’est notamment le cas du ministre proposé pour le département de la Jeunesse et des Sports Tarak Dhiab qui échangeait de chaleureuses salutations avec certains députés.
Vers 9h30, rendez-vous à l’hémicycle, la séance a commencé par la récitation de versets du Coran, puis par l’hymne national et un discours d’ouverture du président du Parlement Rached Ghannouchi, ensuite place au discours du chef du gouvernement désigné, Habib Jemli.
Qui s’intéresse au discours de Jemli ?
Mais au moment où le chef du gouvernement désigné Habib Jemli prononçait son allocution adressée pourtant aux députés, ces derniers ne s’intéressaient guère à ses propos. Pire encore, alors que Jemli présentait son programme gouvernemental ainsi que ses priorités et les membres de son équipe, les députés, relevant des différents blocs, étaient en pleines concertations et négociations. Alors que certains ont carrément quitté l’hémicycle, d’autres sont restés mais n’ont prêté aucune attention au discours du chef du gouvernement désigné, comme si ses propos n’allaient rien changer concernant leur décision de voter pour ou contre cette composition gouvernementale. Smartphones à la main, d’autres députés, de différents blocs parlementaires, ont préféré naviguer sur internet ou notamment consulter leurs profils sur les réseaux sociaux, au lieu d’essayer d’écouter le discours de Jemli et de le déchiffrer, car, en effet, pour les députés tout était intéressant sauf le discours du chef du gouvernement désigné.
En effet, hier à l’hémicycle les coulisses et notamment les négociations, concertations et tractations de dernière minute semblaient plus importantes que le discours de Habib Jemli et de la présence de la nouvelle équipe gouvernementale. Et c’est dans ce contexte que les concertations et les manœuvres politiques se poursuivaient jusqu’à quelques instants avant le vote. D’ailleurs, le hall principal de l’ARP et ses quatre coins se sont transformés en de véritables salles de réunion. En effet, les coulisses de cette plénière extraordinaire étaient marquées notamment par les discussions officieuses sur le vote au nouveau gouvernement. Des cercles de discussions par-ci par-là, des chuchotements et indiscrétions aux quatre coins du Parlement, des plaisanteries pour briser, de temps en temps, le sérieux, mais aussi un climat tendu et un suspense poussé jusqu’aux derniers instants de cette journée, c’est ainsi qu’on peut décrie l’atmosphère de l’ARP pendant le jour du vote.
Réunion de dernière minute
Et dans ce climat marqué notamment par un suspense inédit une réunion de dernière minute a eu lieu dans le bureau du parlement entre le président du Mouvement Ennahdha Rached Ghannouchi et le président du parti Au Cœur de la Tunisie, Nabil Karoui. Une réunion qui a duré quelques minutes avant de se terminer par la déclaration de Karoui qui a assuré qu’il n’y avait aucun accord conclu avec Ennahdha pour voter en faveur du gouvernement Jemli.
Il a expliqué, dans ce sens, que son parti exige des modifications dans l’équipe gouvernementale proposée, notamment la neutralité des ministères de souveraineté afin de protéger le peuple tunisien. Cette dernière manœuvre politique n’était pas isolée, en fait, pratiquement tous les députés du mouvement Ennahdha étaient mobilisés, dès le début de la journée et jusqu’à sa fin, pour essayer de convaincre le plus grand nombre d’élus de voter en faveur du gouvernement Jemli.