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Ennahdha et l’alternance au pouvoir

Depuis 2011, les élections constituent le mode par excellence d’accession au pouvoir. Il reste cependant d’usage que l’alternance démocratique et le contrôle des gouvernants demeurent le problème central du paysage politique en Tunisie.

Certains partis connaissent, en effet, une crise d’alternance démocratique. Plus de cent membres d’Ennahdha, dont certains font partie du Conseil de la choura et d’autres représentant le mouvement au Parlement, ont signé une lettre dans laquelle ils appellent au respect de l’article 31 du règlement intérieur et exhortent Rached Ghannouchi à annoncer qu’il ne se portera pas candidat à la présidence du parti islamiste pour un nouveau mandat.

Au-delà des interrogations sur les raisons des conflits qui ne cessent d’opposer les différents acteurs et parties prenantes au sein du mouvement, des discours en porte-à faux avec l’ordre établi, c’est la présence et le pouvoir de Rached Ghannouchi qui sont aujourd’hui mis en cause. Le dernier membre à revendiquer haut et fort l’alternance démocratique à la direction du parti n’est autre que Imed Hammami. «Le temps est venu pour Rached Ghannouchi de ne plus être à la tête d’Ennahdha dans le cadre de l’alternance au pouvoir», fait-il savoir, affirmant que depuis un an le mouvement et toutes ses instances sont gelés, et que le pouvoir de décision est uniquement détenu par le Cheikh.

Tous ceux qui revendiquent l’alternance du pouvoir à Ennahdha soutiennent qu’ils ne lui demandent pas de quitter le parti, mais de ne plus assumer sa présidence. D’autres voix s’élèvent dans le sens contraire et prônent déjà une nouvelle candidature de Ghannouchi à la tête du mouvement.

Il n’est pas si simple de séparer le bon grain de l’ivraie, mais il est clair que le président de l’ARP ne fait plus l’unanimité au sein même de son parti. D’ailleurs, Ennahdha est à présent intégré dans la sphère des conflits, des affrontements et des altercations de tous bords. Tous les aléas qui en découlent nous amènent à nous interroger sur les intentions et les motivations qui font ainsi courir les uns et les autres. Leur champ d’action prend au fil du temps une mauvaise tournure, surtout lorsque les attitudes et les arrangements, de plus en plus douteux, désavouent les valeurs et les principes sur lesquels repose le parti.

Ce qu’Ennahdha, Ghannouchi et ses dirigeants ne sont plus en mesure d’accomplir met à nu l’incapacité du mouvement à se réformer, à se moderniser et à ressusciter. Il n’est plus à l’abri des dérives. Il perd de plus en plus de sa crédibilité. De leader surtout. Il n’a plus de fédérateur. Même pas un modèle sur lequel la jeune génération peut vraiment s’identifier. D’une épreuve à l’autre, il se perd dans des circuits presque impossibles à tracer, encore moins à cerner. L’immobilité et le passéisme ont leur limite. Rached Ghannouchi est à la tête du mouvement depuis quarante ans. A travers ce qui a été entrepris et ce qui reste encore à accomplir ici et là, il n’y a pas dans les arguments aussi bien des défenseurs du Cheikh que de ses détracteurs une piste à creuser, une vision et un projet pour l’avenir.

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