Le parti Ennahdha est ouvert à tous les scénarios. Divergences et absence d’entente politique en son sein, le mouvement de Rached Ghannouchi ne connaît pas ses meilleurs jours avec la poursuite de la vague de démissions de ses leaders. Dans ce contexte tendu, le parti a élu, dernièrement, son nouveau bureau exécutif après la dissolution de l’ancien, suite à une décision unilatérale et inattendue de la part de Rached Ghannouchi. Que faut-il attendre de ce nouveau bureau ? Comment peut-on interpréter les résultats de ces élections, notamment à la lumière du paysage politique embrouillé à Ennahdha ?
Même si les prérogatives du bureau exécutif ne sont pas très importantes face à celles du Conseil de la Choura, qui centralise la prise de décision politique au sein d’Ennahdha, cette élection acquiert une importance particulière et constitue un enjeu de taille à Montplaisir au vu des divergences qui ne cessent de traverser le mouvement de Rached Ghannouchi, faisant émerger clairement deux clans : ceux qui soutiennent le «Guide suprême» du parti et ceux qui ne le font pas.
La première lecture de ces résultats fait observer que c’est finalement le clan Ghannouchi qui encaisse les premiers dégâts politiques en perdant certaines figures importantes très proches du chef du parti islamiste, dont notamment Anouar Maârouf, Fathi Ayadi et Rafik Abdessalem. En effet, les membres n’ayant pas réussi à obtenir un nombre de voix supérieur à 50, indispensable pour figurer dans le nouveau bureau, sont Anouar Maârouf, Fathi Ayadi, Rafik Abdessalem, Abderraouf Badoui, Sayida Lounissi, Ridha Saidi, Mohsen Nouichi, Ridha Driss, Mohamed Goumani, Mohamed Mahjoub, Hédi Ben Khelifa et Mohamed Mohsen Soudani.
Cependant, des figures de premier rang, dont notamment Ali Laârayedh, Noureddine Bhiri et Abdellatif Mekki ont pu intégrer le nouveau bureau exécutif, dont la principale mission sera d’organiser le 11e congrès du mouvement qui devait avoir lieu en 2020 mais qui a été retardé, un enjeu majeur pour Rached Ghannouchi qui visait à assurer un nouveau mandat avant de s’être engagé à respecter le règlement intérieur du parti et à ne pas présenter sa candidature à la tête du parti.
Ainsi, le nouveau bureau exécutif devra regrouper 28 membres, 4 conseillers, 4 chargés de mission et un rapporteur. Des postes importants ont été confiés à Abdellatif Mekki qui devient vice-président chargé des relations avec les organisations nationales, Ali Laârayedh, vice-président chargé de la politique interne, Noureddine Bhiri vice-président chargé de la politique extérieure, Ajmi Lourimi, vice-président chargé de la stratégie et Wassila Zoghlami en tant que vice-présidente chargée de la Femme et de la Famille.
Yamina Zoghlami quitte la direction
La dirigeante au parti Ennahdha, Yamina Zoghlami, a annoncé avoir décidé de quitter la direction du parti, mais qu’elle restait membre de ses bases. S’exprimant dans des déclarations médiatiques, elle a expliqué qu’elle a pris cette décision suite à la proclamation de la composition du nouveau bureau exécutif sans donner plus de détails.
Ainsi, on pourra comprendre que le poids du «groupe des cent», un mouvement né au sein d’Ennahdha appelant à mettre fin à l’hégémonie de Ghannouchi, consolide sa position au temple de Montplaisir, au détriment des plans de Rached Ghannouchi, qui conserve tout de même des soutiens de taille au sein de ce bureau comme celui de Noureddine Bhiri.
Rappelons que l’ancien bureau exécutif d’Ennahdha était composé de 28 membres dont des dirigeants connus par le grand public comme notamment Ali Laârayedh et Noureddine Bhiri qui conservent leurs positions, Abdelfattah Mourou, Zied Laâdhari, Maherzia Laâbidi et autres, qui quittent la barque. En décidant, en mai dernier, de le dissoudre, Ghannouchi avait pris tout le monde de court, y compris ses membres. Pour certains observateurs, cette manœuvre politique avait pour objectif de régler certains comptes politiques en interne, mais aussi à rappeler à tout le monde que seul Ghannouchi, le leader historique d’Ennahdha, tient les commandes du parti en dépit de ses engagements au Parlement.
Cependant, son parti se trouve toujours dans une zone de turbulences, notamment après la démission inattendue du dirigeant Larbi Guesmi qui avait annoncé vendredi dernier avoir quitté le parti. Ce dernier affirmait que «le dialogue au sein du mouvement n’a plus de sens car nous dialoguons pendant des heures mais par un trait de plume on revient sur ce qui a été convenu».