Des interrogations, bien sûr, au sujet des élections américaines. A propos de l’incorrigible Trump, à l’évidence. A propos du trumpisme et du populisme, surtout.
Les phénomènes se rejoignent, aucun doute à présent. Jusqu’il y a dix, quinze années, le populisme était «imputé» aux seuls et rares exemples de pays asiatiques et africains «en devenir». Tout spécialement à la Libye de Gueddafi, théoriquement gouvernée par le «Livre vert» et les «bases populaires», échue en vérité au pouvoir unique du «guide suprême».
La «contagion» a gagné l’Europe et l’Amérique, depuis.
Montée des extrêmes droites en Italie, en Hollande, en Hongrie, au Brésil, mouvement des gilets jaunes en France, élection surprise de Donald Trump en 2016 aux Etats-Unis. Le plus instable, le plus rebelle et le plus anti-système des républicains chapeautait déjà la première démocratie du monde. La contestation du dernier scrutin, l’attaque récente du Capitole, la tendance à l’insurrection, le déni des institutions, ont eu le temps de mûrir. Pourquoi s’en montrer choqué ?
Non, le pire est sans doute ailleurs. Le populisme croît en nombre aujourd’hui. Des partis d’extrême droite gouvernent pratiquement sans partage en Europe. Et c’est le trumpisme dont hérite l’Amérique après l’éviction même de Trump qui ne rassure en rien. La moitié presque de l’Amérique croit encore en Trump, en ses condamnations du système, en ses allégations et ses mises en doute à l’encontre de la démocratie. La nation démocratique par excellence, l’Etat symbole des libertés doit désormais craindre pour ses valeurs, pour ses lois, pour ses institutions. Doit «compter» avec une importante et massive opposition populaire. Ce qui attend Joe Biden désormais.
Ce qui attend les démocraties qui se maintiennent encore de par le monde. Ce qui nous attend probablement, nous autres, aussi, en Tunisie avec le conflit qui se précise entre une présidence clairement populiste et forte d’une majorité de population, et un gouvernement et un Parlement (relativement minoritaires) attachés encore au régime institutionnel classique. Terrible affrontement en vue.
Les politologues et les sociologues expliquent le populisme (et le trumpisme) croissant par un insistant déséquilibre du système libéral. Déséquilibre entre des métropoles toujours plus riches, mieux instruites, plus cultivées, et des pays profonds en manque de moyens, de culture et d’instruction. Entendre : nul génie qui vaille là. Le gaddafisme, hier, comme le populisme plus tard et le trumpisme de nos jours n’ont eu qu’à cueillir ce qui s’offre, en simple conséquence, à eux.