
La forte instabilité politique et sociale qui s’est installée en Tunisie, depuis une dizaine d’années, avec des pics de violence, et la guerre civile qui a détruit la Libye voisine ont mis à genoux une économie tunisienne qui était déjà dans l’impasse en 2010.
La pandémie virale coronarienne lui a donné le coup de grâce. Cette dernière a été une véritable catastrophe pour l’économie de notre pays en raison de décisions erronées, elles-mêmes fruit de la forte instabilité déjà évoquée. Notre pays est donc aujourd’hui au bord de la faillite totale.
Une situation, répétons-le, qui est le fruit de l’accumulation de bon nombre de problèmes et de conflits qui durent depuis des décennies dont certains remontent à 1955, date du déclenchement d’un conflit politique majeur qui a failli se transformer en guerre civile.
Guerre civile, c’est le mot. Mais pour décrire plutôt ce qui est en train de se passer aujourd’hui chez nous, «tous contre tous, chacun pour soi et au diable les autres», et ce, sur fond d’une décadence morale galopante, elle-même fruit de mutations profondes de notre société qui ont eu lieu tout au long des dernières décennies et qui ont été toutes très mal gérées.
Il s’agit en fait d’une guerre entre de véritables gangs, dont certains à la solde de puissances étrangères, par acteurs politiques et sociaux interposés, avec beaucoup d’argent sale ou d’origine obscure, ayant occasionné et est en train d’occasionner au pays d’énormes dégâts de tous genres, y compris d’ordre moral et des pertes humaines.
Deux leaders de l’opposition, froidement assassinés, mais aussi d’autres personnes mortes à cause des violences. Celles survenues lors de contestations sociales, d’affrontements à caractère tribal (y compris parmi les supporters de foot), ou entre criminels et forces de sécurité intérieure ou d’actes terroristes, parmi elles des touristes étrangers. Cela sans oublier ceux ayant subi des dommages corporels divers, dont certains sont graves.
Un véritable cercle vicieux s’est installé, où les conflits ont fortement nui à l’économie et continuent de lui nuire ce qui ne fait qu’augmenter les conflits sociaux et donc l’instabilité politique. Conflits qui ne sont hélas pas près de s’estomper. Pire, ils se nourrissent de partout, y compris du bras de fer insensé entre les deux têtes de l’exécutif et qui dure depuis 2016. Résultat : un peuple humilié, dégoûté et déprimé, un Etat en lambeaux et un appareil de production agonisant.
Il faudrait rappeler ici, qu’à la suite de la chute de l’ancien régime, le peuple a été livré à lui-même et une nouvelle classe politique s’est précipitée pour conquérir le pouvoir, sans jamais su ou pu le prendre. Car une grande partie de celui-ci est restée aux mains de la mafia qui dominait le pays et dont les têtes sont restées bien au chaud à l’étranger.
Une classe imprégnée de l’esprit anti-démocratique et dépourvue, pour sa majorité, d’une vision à long terme, fruits des effets néfastes de la dictature, qui a privé le peuple de sont droit d’apprendre à gérer sa vie publique d’une manière civilisée.
Avec les fortes attentes des populations (catégories sociales et régions entières) et les monts et merveilles qui lui ont été promis dès les premiers jours de la «Révolution» ainsi qu’à la veille des élections de 2011 et de 2014, le pays a été atteint d’une grave «revendicationnite». Celle-ci a donné naissance à un populisme ravageur et la dictature a laissé la place à des poussées d’anarchie.
Différents types de peurs ont fait le reste et donné suite à des comportements de repli sur soi et de réflexes de protection qui ont un impact décisif sur les résultats desdites élections. Emotions suscitées par l’explosion d’extrémismes de tous genres, avec des excès inquiétants, ayant visé certaines valeurs fondamentales du peuple (religion, caractère civil de l’Etat, atteinte au caractère sacré de la vie par le suicide, atteintes contre les symboles de la Patrie, statut de la femme, liberté des mœurs, violences policières, criminalité, impunité, etc.)
Constituée de piètres amateurs (certains sont de vrais pitres, d’autres de vrais nigauds), de rêveurs, d’utopistes, d’aventuriers, d’opportunistes de tous bords et autres psychopathes, ladite classe s’est livrée à une âpre lutte pour le pouvoir, avec des slogans comme seuls programmes.
Les conflits autour de l’identité et son corollaire, le modèle social, ont fait que le pays devienne l’otage de plusieurs forces antagonistes ne cherchant qu’à imposer, chacune, ses propres valeurs, fussent-elles contraires à celles adoptées par la majorité du peuple.
Cela s’est traduit par des règlements de compte entre d’anciens clans idéologiques fanatiques et violents (activistes dits islamistes et extrême gauche). Cela sans oublier les conflits entre employeurs et employés, les conflits entre gouvernement et corporations professionnelles, les conflits à caractère régionaliste et tribal. Une situation héritée de plusieurs décennies de désertification intellectuelle et culturelle et d’imposture politique et l’absence d’un vrai projet de société. Et la mafia est devenue encore plus active car sa tête est devenue encore plus libre puisque gardée bien au chaud à l’étranger et ses tentacules se sont multipliés. A cela il faudrait ajouter l’action directe et indirecte de certaines puissances étrangères, devenues omniprésentes et à visage découvert.
Sur l’immense scène qu’est notre pays, bon nombre de comédiens ont, il est vrai, été remplacés par d’autres mais les rôles sont restés les mêmes ou presque et la farce, de mauvais goût, continue d’être jouée avec pour dindon le bon peuple.