AU service des ambitions politiques depuis 2011, la démocratie se porte mal en Tunisie. Entre progrès et régression, le solde est plus que jamais négatif. Un certain nombre de symptômes confirment cet épuisement démocratique : persistance des violations des droits de l’homme, recours excessif à la violence dans le traitement sécuritaire des mouvements sociaux, déclin, des fois même hémorragie, des partis, paralysie et blocage politiques, faillite du système politique et inadéquation de loi électorale, affaiblissement de l’Etat de droit, stress médiatique épuisant…
Autant de constats qui renvoient à l’incapacité de la plupart des intervenants sur la scène politique à s’identifier aux besoins des citoyens et à l’incompréhension qu’ils ne cessent de manifester face aux revendications sociales.
Retour de manivelle : les Tunisiens portent aujourd’hui un regard désenchanté sur la démocratie. Une exaspération qui s’exprime systématiquement envers les forces politiques. Une grande majorité ne s’identifie plus à un parti politique, comme ça a été le cas en 2011. Le désaveu s’étendrait en quelque sorte par effet de capillarité au système lui-même. Le syndrome de la fatigue démocratique se traduit par une lassitude de tout ce qui a rapport avec la politique. Il risque par conséquent de pousser vers l’abstention ou les votes antisystème.
Alors que l’actualité ne donne pas une belle image de l’action politique, aucun parti ne parvient aujourd’hui à dominer la scène. Est-il encore possible de raviver la verve, l’entrain et la passion de 2011 quand de nouvelles pratiques ont vu le jour et ont contribué à entretenir un malaise auquel on ne semble pas trouver de remède ? Ceux qui n’aiment pas la politique trouvent forcément de quoi conforter leur désintérêt. Et même s’ils ont tort, l’action politique restera en quelque sorte comme la manifestation la plus criante des maladies de l’époque.
La plupart des partis politiques incarnent les genres de dépassements sans frontières, sans règle, sans limites et finalement sans but. Le recours à des méthodes controversées et illicites compromet de plus en plus leur crédibilité. Le problème est que le paysage politique génère tellement d’intérêts qu’il attire les acteurs les plus intrigants et provoque les tentations.
Difficile de ne pas réagir devant le spectacle d’un environnement dans lequel l’excès de zèle domine et semble n’obéir qu’à ses propres règles. Ce n’est pas un blâme, mais c’est un constat qui peut se transformer en règle générale si les bonnes volontés ne réagissent pas. Car dans un contexte aussi défavorable, les hommes politiques ne sont pas toujours prêts à finir avec cette incohérence qui ne cesse de bloquer et de s’opposer à tout ce qui peut sortir le pays du bord du gouffre. L’image du paysage politique telle qu’elle est donnée aujourd’hui dépend beaucoup trop des dérives dans lesquelles il est entraîné et dont beaucoup de partis assument visiblement une grande partie.