Ils tâtonnent. Ils trébuchent. Ils formulent des phrases toutes faites, sans queue ni tête. Ils annoncent des réformes, si réformes il y a, à son de trompe.
Peu éloquents, mauvais rhéteurs — et c’est un euphémisme — ils ne sont jamais convaincants et se discréditent souvent.
La pandémie fauche des vies à la fleur de l’âge. L’odeur de la mort est omniprésente. L’économie est en berne. La corruption bat son plein. Les dérives de la magistrature tunisienne n’ont d’égales que la gestion calamiteuse des affaires de la cité.
Les psychiatres ne cessent de tirer la sonnette d’alarme, faisant état d’une nette augmentation des cris de détresse psychique. Le taux de violence faite aux femmes et aux enfants depuis le début de la flambée du Covid-19 s’est aggravé au cours du confinement. Une chape de plomb fond, du reste, sur la société
Pourtant, le spectacle que continuent à nous offrir nos actuels gouvernants ressemble à celui que livrent de petites bêtes se disputant une prune.
Dans un pays pris à la gorge, de l’Assemblée des représentants du peuple à la présidence de la République en passant par la présidence du gouvernement, on assiste encore à une politique-spectacle qui ressemble à un camaïeu de gris. On a affaire à des politiciens qui veulent tout traiter en cachette des citoyens et qui veulent qu’à partir de là, ces mêmes citoyens ne portent pas de jugements «faux» et n’interprètent pas de travers leur rendu clownesque.
Ce n’est là que le comble de la stupidité, peut-on déduire selon Spinoza.
Nos gouvernants et politiciens actuels veulent aborder des thèmes aussi graves et complexes comme ceux de la santé, de l’économie et de l’éducation avec le mélo de la téléréalité et non avec la rigueur des économistes et la pertinence des sociologues. Ils cherchent souvent à tisser les nœuds avec des médias prêts à rapporter, sans un abattement de cil ni le moindre commentaire, des propos creux. Or, c’est là qu’affleurent le plus clairement leurs fêlures.
Crise de la culture, dites-vous selon Hannah Arendt ? Probablement, c’est oui. La plupart de nos gouvernants et politiciens n’auraient pas lu nos grands sociologues, notamment Abdelwahab Bouhdiba, Moncef Ouannes et Sophie Ferchiou, entre autres.
Car s’ils avaient lu nos penseurs précités, ils auraient compris sans détour aucun qu’il est impératif de comprendre de l’intérieur les ajustements en cours de la société tunisienne, « qu’ils frisent le désespoir ou qu’ils s’ouvrent sur de réelles promesses ». Ils auraient su adapter comme il se doit leurs discours et modes d’agir aux dialectiques en marche d’une nation en ébullition. Ils auraient pu comprendre les dessous des ruptures et continuités d’un pays maghrébin très ancré dans son environnement culturel.