
Voilà 11 ans ou presque que la Tunisie est en train de procéder à la destruction de son appareil productif, celui des ressources naturelles, celui des biens et des services et celui des compétences et des connaissances. Sois une destruction de son économie, facteur par facteur, secteur par secteur, marché par marché.
Une destruction systématique, sans relâche et l’on serait tenté de dire, non sans un brin de cynisme elle le fait consciencieusement, avec application et professionnalisme.
Résultat, et comme chacun le sait, le pays est au bord de la faillite. Et pas n’importe laquelle, une faillite totale, politique, économique, financière, sociale, culturelle et, chose encore plus grave, morale. Un pays qui a presque perdu tout ce qu’il a pu acquérir comme souveraineté politique depuis 1956 et qui n’a jamais pu acquérir sa souveraineté économique technologique et académique tout en ayant perdu, hélas, sa souveraineté culturelle.
Un pays qui souffre des conséquences d’une mentalité et de pratiques qui ont engendré un mal-développement inquiétant et chronique et du fait de n’avoir jamais réussi à construire le vrai citoyen. Le pays a, en effet, réussi à produire un monstre au sens de la biologie de la reproduction, que nous avons appelé «anti-citoyen ».
Près de onze ans de tâtonnement, d’hésitation, de tergiversation, de rafistolage, de bricolage, de perte de temps, d’argent et d’efforts, d’usure de toutes les ressources y compris de l’image du pays dans le cadre d’un système rafistolé à la Frankenstein, bâti sur les ruines d’un précédent système despotique et mafieux.
Décapité un certain 14 janvier 2011, la pieuvre s’est multipliée selon une progression géométrique. Mille et un despotes et mille et une mafias, bien au chaud au sein même des institutions de l’Etat et au milieu d’un peuple livré à lui-même, qui s’appauvrit de jour en jour.
Un peuple manipulé par des politiciens opportunistes, affairistes et véreux, formant des partis à caractère fasciste, répartis en quatre courants ennemis depuis plus d’un demi-siècle grâce à des médias non moins sales et victimes des barons de la contrebande et de la spéculation.
On ne fait pas du neuf avec du vieux, d’accord, mais on ne dirige pas aussi un paquebot comme on le ferait pour un hors bord, même si le gigantesque bâtiment, en question, est rafistolé de toutes parts et pestiféré et que les passagers veulent coûte que coûte le quitter.
Le commandant de bord doit, en effet, s’interdire d’effectuer tout geste non étudié et s’abstenir de prendre toute décision ne se basant pas sur un tracé clair et sûr, à partir d’une carte précise et des données de navigation fiables.
Premier responsable du navire, de son équipage, de ses passagers et des conséquences de la route, le commandant de bord ne doit pas jouer à l’apprenti sorcier, ni se contenter de traquer et de chasser les rats. Il doit impliquer son équipage et bien informer ses passagers. Et surtout ne pas s’amuser à vouloir changer la structure du bâtiment alors qu’il est en pleine mer au milieu d’une bourrasque.
Voilà, d’après notre humble avis ce qui est en train de se passer dans le navire Tunisie, depuis le 25 juillet dernier et voilà ce qui fait que ledit bâtiment est en train d’aller à la dérive, alors que la tempête est à son paroxysme et que les récifs pullulent.
Jusqu’à quand le pays devra-t-il subir les apprentis politiciens et dirigeants ? Jusqu’à quand le peuple devrait-il subir le dilemme cornélien devant les urnes et se retrouver obligé de choisir le moindre mal? Jusqu’à quand le peuple devra-t-il payer les pots cassés ?