Calendrier électoral : Quel sort Saïed réserve-t-il à l’Isie ?

Dans son discours du 13 décembre 2021, Kaïs Saïed avait annoncé la tenue d’élections législatives anticipées «en vertu d’une nouvelle loi électorale». Un nouveau texte qui pourrait mettre fin à l’Isie que le Président de la République soupçonne de partialité. Qui va donc organiser les prochaines échéance électorales ?

Même si le Président de la République, Kaïs Saïed, avait annoncé clairement un calendrier électoral qui prendra fin en décembre prochain par des élections législatives anticipées, pour certains, l’image reste toujours floue, notamment sur le plan procédural.

En effet, si sur le plan politique la visibilité s’est nettement améliorée par l’annonce d’un calendrier électoral délimité dans le temps, c’est notamment l’organisation de tels rendez-vous d’envergure qui commence à poser de nombreuses questions. Autant dire que le rôle de l’Instance électorale, dans sa version actuelle, a été remis en cause par le Chef de l’Etat qui la soupçonne de partialité. Que va-t-on donc faire ? Qui va commander de telles étapes cruciales dont notamment le référendum et les élections législatives anticipées ? Kaïs Saïed fera-t-il confiance à l’Instance supérieure indépendante pour les élections ou passera-t-il à la mise en place d’une nouvelle instance ?

En tout cas, le processus électoral annoncé en décembre dernier par le Président de la République apporte quelques éléments de réponse à cette problématique. Ce processus démarre mal avec la consultation nationale électronique qui, selon le Président de la République, connaît des problèmes techniques mais aussi des tentatives de sabotage. Sauf qu’il s’agit du point de départ sur lequel est bâtie toute l’approche du locataire de Carthage portant notamment sur des réformes politiques et économiques. Parmi lesquelles figure notamment la réforme de tout le système politique à laquelle ne cesse d’appeler le Président de la République, un tel pas conduira directement à des réformes d’ordre électoral et par déduction la fin, ou du moins la réforme de l’instance électorale dans sa forme actuelle.

Encore faut-il le rappeler, le Président de la République, même avant son élection, a toujours prôné un nouveau système politique en Tunisie qui passe forcément par un nouveau mode d’élection. Alors qu’il jouit de toutes les prérogatives, ou presque, rien ne l’empêche de concrétiser ses visions par le biais d’un simple décret. Au fait, ce qu’a toujours réclamé le Président de la République, c’est l’amendement de la loi électorale et la révision de la Constitution « pour entrer de plain-pied dans la seconde République dans laquelle on doit trouver une organisation administrative et politique répondant aux doléances des Tunisiens ». Ceci dit, l’instance électorale qu’il avait accusée de partialité ne pourra en aucun cas, selon sa vision, conduire de telles échéances électorales et répondre aux réformes politiques qu’il exige.

Grosso modo, le système majoritaire de listes, tel qu’adopté après la Révolution, favorise les grandes formations politiques et pénalise, par conséquent, la représentation régionale. Lui, il veut une meilleure représentativité, voire une représentativité directe des citoyens, notamment dans les régions.

Toutefois le problème ne se pose pas à ce niveau, mais au niveau de l’organisation des prochains scrutins. Qui va organiser le référendum ? Qui va le superviser et comment va-t-on assurer leur bon déroulement ?

L’Isie se dit prête

Alors que les délais pressent, l’Isie s’est dite prête à organiser les différentes étapes électorales mais attend toujours une notification officielle de la part de Kaïs Saïed, d’autant plus que tous les canaux de communication avec Carthage sont coupés.

Selon le membre de l’Instance électorale Belgacem Ayari, l’Isie a déjà mis en place un projet de calendrier pour le référendum conformément à l’annonce présidentielle portant sur un calendrier électoral. Lui qui explique que l’instance attend toujours l’annonce officielle par décret de l’organisation de ce référendum pour officialiser ce calendrier, il estime que cette situation de flou ne peut pas se poursuivre alors que nous sommes à quelques mois de l’organisation du référendum.

Sauf que pour le vice-président de cette instance, Farouk Bouaskar, l’Isie elle-même doit subir des réformes pour pouvoir mener à bien ces échéances. Elles devraient porter sur l’amendement du statut de l’instance qui date de décembre 2012.  Il a souligné que le maintien d’une instance indépendante supervisant les élections « nécessite la continuité et la préservation des facteurs relatifs à l’expertise et l’expérience, outre l’éventuelle révision de certaines questions, dont le nombre de membres, l’évaluation et la révision des compétences du conseil de l’instance… ». Concernant les prochains rendez-vous électoraux, notamment, le référendum prévu le 25 juillet prochain et les élections législatives anticipées le 17 décembre 2022, Bouasker a confirmé la disponibilité de l’Isie, ajoutant que le conseil a envoyé une correspondance au ministère des Finances, concernant les fonds nécessaires vu que le décret de finances de 2022 porte seulement sur les dépenses régulières de gestion de l’instance.

En janvier dernier, l’Isie avait envoyé des correspondances aux présidences de la République et du gouvernement, ainsi qu’au ministère des Finances, demandant un « éclaircissement sur le cadre légal et les ressources financières nécessaires à l’Instance », afin de préparer et mener à terme les rendez-vous électoraux et le référendum, annoncés par le Président de la République.

L’Isie avait, par ailleurs, chargé son président, Nabil Baffoun, des concertations à propos du cadre légal avec Kaïs Saïed, mais depuis la situation est au point mort et l’instance électorale ne connaît toujours pas quel sort lui réserve le Président de la République.

Autant dire que l’Instance électorale n’a pas été consultée en aucun moment par le Président de la République avant l’annonce du calendrier électoral.

Kaïs Saïed a-t-il déjà un plan B ? Pense-t-il à une nouvelle instance provisoire pour organiser le référendum et les élections anticipées ? Personne ne peut répondre à cette question d’autant plus que le Président de la République a toujours opté pour l’effet surprise mettant toute la sphère politique devant le fait accompli.

En tout cas, le succès des différentes échéances électorales nécessite de se focaliser sur l’inscription du reste des électeurs tunisiens, estimés à deux millions, outre l’allocation de fonds financiers pour le recrutement d’agents d’inscription et la réalisation d’une campagne de sensibilisation.

Laisser un commentaire