Sa photo a fait le tour des réseaux sociaux et sa notoriété locale a fini par sauver son commerce. Le jeune Habib El Bey, arrêté par les autorités sécuritaires pour commerce illégal, a pu s’appuyer sur un vaste mouvement de solidarité sur les réseaux sociaux pour faire valoir ses droits. La saisie de son matériel à Bab El-Khadhra a permis néanmoins l’ouverture d’un débat qui mérite d’être tranché, celui de ces commerces de rue.
Dans un emplacement qui ne gênait absolument personne, le concept de street food mis en place par le jeune Habib El Bey a été une manière pour lui de démarrer de rien du tout pour arriver finalement à s’agrandir petit à petit et garantir pour lui et pour sa famille un revenu suffisant.
Alors que l’Etat admet, tous gouvernements confondus, que le chômage en Tunisie est systémique, et qu’il est désormais impossible pour l’Etat de créer des emplois publics, et devant l’incapacité aussi des gouvernements successifs de drainer des investissements, voilà qu’un jeune autodidacte se heurte à une législation confuse et souvent « à la tête du client ».
De tous les observateurs, ce type de comportement des autorités est une véritable entrave à la liberté d’entreprendre et à la liberté d’initiative. Une liberté d’ailleurs qui rend un service à l’Etat en permettant à des milliers de jeunes de créer une source de revenus, sans passer par la case délinquance, extrémisme ou tentative de quitter clandestinement le pays.
Il est désormais temps de réviser des réglementations anachroniques qui ne prennent pas en considération la dynamique de la société dans laquelle nous vivons et la réalité économique marquée par une morosité alarmante.
Par ailleurs, il est faux de penser que tout commerce de rue est forcément illégal ou signe de sous-développement. Dans les pays les plus développés, les commerces de rue et les brouettes existent, mais ne font pas l’objet d’un harcèlement systématique des autorités. Au contraire, dans ces pays, les gouvernants ont créé un cadre légal pour ces gens. D’abord pour éviter l’anarchie, mais aussi pour permettre à celui ou celle qui veut travailler à la sueur de son front de le faire sans risquer de se faire attraper par la police.
Cette affaire est peut-être celle qui permettra de débloquer la situation et de réfléchir à une législation plus souple et mieux organisée. Tous les experts économiques le disent : Il n’est possible de combattre le commerce informel que par la mise en place d’une réglementation permettant de le contenir et l’attirer vers le formel.
Comme des milliers de jeunes, Habib El Bey porte l’espoir de voir son pays encourager cette catégorie, et faire en sorte qu’ils puissent s’épanouir dans leur pays. Généralement, malheureusement, le premier réflexe de toute autorité est souvent l’interdiction. Il est grand temps de changer de paradigme et de commencer à donner des alternatives pour que de plus en plus de jeunes puissent se construire un avenir et vivre sereinement dans leur pays.