A l’heure où la région se crispe sous l’effet inquiétant de la crise du carburant, engendrée par le conflit russo-ukrainien et où l’Europe, prise au dépourvu, s’apprête à infliger la taxe carbone à ses clients tout en misant davantage sur les énergies alternatives car renouvelables, la Tunisie n’a toujours pas accédé au niveau requis en matière de transition énergétique.
Notre pays n’a pas dépassé le seuil d’un septième en terme de réalisation des objectifs tracés dans ce sens ; un résultat qui ne l’habilite point à passer, rapidement, la vitesse supérieure et faire face aux défis plus que jamais costauds. En fait, l’organisation de la première édition du Salon international de la transition énergétique SITE 2022, tenue du 19 au 21 octobre au siège de l’Utica, s’inscrit dans le cadre de la dynamisation d’un secteur qui s’impose en raison et des défis énergétiques mondiaux et des perspectives fortement prometteuses notamment du secteur photovoltaïque dans un pays généreusement ensoleillé comme le nôtre.
En effet, selon la Chambre syndicale du photovoltaïque et l’Association allemande de l’énergie solaire, lesquelles conjuguent les efforts pour déterminer les normes relatives à la qualité des installations PV, la Tunisie dispose d’un potentiel photovoltaïque important, soit une irradiation solaire d’environ 2,000 kwh/mètre carré ainsi qu’un nombre d’heures d’ensoleillement élevé, ce qui lui ouvre la voie à une exploitation optimale du photovoltaïque comme source d’électricité. Le secteur résidentiel et celui professionnel tireront profit du remboursement Imminent des frais d’installation PV, et ce, au bout d’ici huit ans. Notant que le prix de l’énergie PV ne grimpe pas comme c’est le cas pour l’électricité subventionnée. Le salon comprend deux principaux volets : conférences et exposition.
Failles juridiques à combler
Lors du panel axé sur le financement du programme national des énergies renouvelables, M. Ouael Chouchane (Berd) a rappelé les principaux axes d’appui aux projets d’ER, à savoir le financement, l’accompagnement et le développement du cadre juridique. Il a souligné l’impératif de déployer le mécanisme de financement en point de mire depuis 2018 et qui, pourtant, apporte un coup de pouce considérable aux institutions pour les inciter à financer des projets. Ce mécanisme subventionne 10% du coût de financement du projet tout en y apportant l’assistance technique nécessaire. L’orateur a rappelé que le financement des projets d’énergies renouvelables s’effectue aussi bien en dinars qu’en devises avec un taux d’intérêt de 2%. Volet juridique, une consultation publique, indique-t-il, a été lancée dans le but de cerner les failles y liées. Une commission se réunira en novembre prochain pour définir les dix points fondamentaux, évoqués par ladite consultation.
Place aux obligations vertes !
Mme Fatma Ben Abda, chargée principale des énergies renouvelables à la BAD, a mis le doigt sur les défaillances entravant, jusque-là, la réalisation par la Tunisie de ses objectifs dans ce secteur. Seuls 4% des énergies renouvelables sont exploités jusqu’à nos jours, soit seulement le un septième des objectifs acquis. Le financement local demeure limité et ne dépasse pas les 35%. Mme Ben Abda a parlé des obstacles à dépasser dont la difficulté d’accéder aux crédits bancaires et marché local surtout pour les petits projets. Le financement climatique s’avère être, également, très faible. Pour se rattraper, la Tunisie disposera de 20 000 milliards de dollars pour la décennie 2021/ 2030 à condition de se munir de deux instruments-clés : les obligations vertes et les obligations durables. Il lui est recommandé, aussi, de développer des banques vertes ainsi qu’un fonds vert surtout que les opportunités en matière d’énergies renouvelables ne manquent pas, sous nos cieux. La BAD, pour sa part, propose des produits de financement, des solutions de financement mixtes, des fonds spécifiques ainsi que des initiatives spécialement conçues pour la transition énergétique. Le projet Chams sera le fruit d’une collaboration entre la BAD et l’Anme. Il vise à apporter aux PME une assistance technique, une plateforme digitale et un partage des connaissances.
4500 MW à l’horizon 2030
Prenant la parole à son tour, Mme Amira Klibi, spécialiste en énergie à la Banque mondiale, a indiqué que la BM soutient le gouvernement tunisien pour une accélération que l’on veut massive des ER. Pour ce, la création d’un environnement favorable à cette transition et l’amélioration de la viabilité du secteur à travers, entre autres, la modernisation de la Steg s’affichent en premières lignes directives. L’exportation des ER vers la rive nord de la Méditerranée fait l’objet d’un projet auquel une enveloppe de 150 millions de dollars a été réservée. La BM affirme son appui aux concessions solaires aux tarifs compétitifs. Les axes d’intervention dénotent d’une approche globale, comptant une stratégie sur l’exportation de l’hydrogène, l’appui aux banques locales, l’appui au transport des ER et l’élaboration d’un manuel des procédures pour le régime des autorisations. Du reste, exploiter le potentiel tunisien en énergies renouvelables dont l’énergie verte et celle, climatique, fait quasiment l’unanimité des intervenants. La Tunisie se doit de passer la vitesse supérieure en comptant sur le secteur privé pour contribuer à relever le défi, rattraper le flagrant retard en matière de réalisation des objectifs énergétiques en garantissant 80% des objectifs à l’horizon 2030, soit le déploiement de 4500 MW d’ER dans les sept années à venir.