Impossible d’organiser des législatives, alors que le pays baigne dans une si catastrophique situation! Le bateau Tunisie est, en effet, en détresse sur une mer démontée et risque, d’un moment à l’autre, de couler. Une crise économique et sociale sans précédent, résultat d’une situation politique devenue infecte, depuis 2016 et kafkaïenne, depuis 2020, risque de provoquer un nouveau soulèvement.
Alors que de larges pans de la population sont en train de s’enliser dans la pauvreté, et de vivre un cauchemar quotidien, et que l’appareil de production des compétences et celui des richesses sont en train de péricliter, le pouvoir de fait, devenu de plus en plus isolé et paralysé, continue de vouloir à tout prix concrétiser ses rêves simplistes et utopiques.
Visiblement dépassé par les événements, aussi bien au niveau interne qu’externe, le pouvoir de fait essaye de s’accrocher au FMI et est allé jusqu’à engager le pays, en maintenant une opacité jamais vue, sur une voie qui pourrait avoir une issue tragique.
Oui, le pouvoir de fait, qui a transformé l’Etat en une administration archaïque pour ne pas dire en ranch, est dépassé sur tous les plans. La situation catastrophique de notre école publique, de nos hôpitaux, de notre transport collectif et autres secteurs, en témoigne. La loi de finances pour 2023, qui sortira bientôt des tiroirs de l’administration directement pour le Jort, sera là aussi pour témoigner.
Certains diront que la situation actuelle est le lourd héritage d’une décennie qualifiée de noire, oui mais depuis octobre 2019, les pouvoirs en place ont tout fait pour l’aggraver et celui de fait du 25 juillet 2021, pour la rendre catastrophique. Pouvoirs issus des urnes, certes, mais de la main d’un peuple qui n’arrivait pas à comprendre ce qui se passait et qui voulait à tout prix rompre avec la médiocrité, la nouvelle mafia et l’imposture.
Nous avons ici même mis en garde, dès avril 2019, soit six mois avant les législatives et la présidentielle, contre le danger que constituent ces rendez-vous pour le pays tant que le peuple est désorienté et désespéré. Danger aggravé par le décès du chef de l’Etat en juillet 2019.
Impossible, donc, d’organiser des législatives, alors que le peuple est dérouté, se sentant encore une fois trahi, drapé comme il l’est dans son ignorance politique et économique. Oui, le peuple en a assez de ces rendez-vous avec les urnes, qui sont hors programme, bâclés et de façade ( celui de fin 2019, le pseudo-référendum du 25 juillet dernier, puis après six mois des législatives anticipées).
Avec un nouveau texte sans fondement légal, qui sape la démocratie et qui va gérer des élections illégales, convoquées par un pouvoir illégal, qu’espérons-nous ? La stabilité? La sécurité publique? Le progrès? La disparition de la corruption qui a quadruplé?…. Jamais le pays n’est descendu moralement si bas. Jamais il n’a été hors la loi comme il l’est depuis le 25 juillet 2021.
Résultat, l’abstentionnisme étant devenu la règle, un pseudo-Parlement verra le jour avec, pour seule mission, celle de cautionner un pouvoir de fait qui s’est arrogé le droit absolu de tracer la politique du pays, traduire l’avenir de nos enfants et de nos petits-enfants. Un pouvoir qui n’a pas la compétence technique pour le faire, encore moins la compétence politique pour faire faire le projet de ladite politique.
Le locataire de Carthage doit, donc, comprendre que l’on ne gère pas un pays à coups de décrets, mal ficelés de surcroît ou de derrière un bureau si luxueux soit-il. Il doit réaliser qu’il est en train de mener le pays à sa perte et l’Etat à son implosion. Il doit laisser son ego de côté et se conduire comme un président non comme un chef de guerre.
Comme nous l’avons déjà dit depuis un bon moment, les élections prévues pour le 17 décembre prochain devront être retardées, et un dialogue national devra être organisé sans plus tarder. Des rencontres qui devront réunir les représentants de toutes les formations élues (partis, organisations nationales, conseils municipaux et universitaires, ordres professionnels, etc.). Ne pourront participer que les formations dont le congrès électif a été tenu dans les délais et dans le respect de la légalité.
Ledit dialogue doit impérativement avoir pour priorité vitale et, extrêmement urgente, le devoir de tracer une feuille de route, avec, pour première tâche, le sauvetage du pays, son économie en premier. Il s’attèlera à la préparation urgente, mais non bâclée, du projet de budget de l’Etat et de la loi de finances pour 2023. Il doit ensuite procéder à l’amendement du code électoral de façon à le rendre capable de donner naissance à une Assemblée digne de ce nom.
Il sera chargé de tout expliquer au peuple de façon à ce que ce dernier puisse mieux décider, et des élections législatives et présidentielle doivent être organisées le 20 mars prochain par exemple. Le pouvoir de fait, du 25 juillet 2021 devant partir lui aussi, car il a été un élément fondamental de la crise politique, économique, sociale et morale qui s’est aggravée depuis début 2020, et avec lui sa «Constitution».
Les deux nouveaux pouvoirs procèderont alors à l’amendement de la Constitution de 2014, à la lumière des recommandations du dialogue, déjà cité avec l’instauration d’un nouveau pouvoir, celui de la planification. Un congrès national qui réunira les représentants de la présidence, de l’Assemblée et des autres structures ayant participé au dialogue déjà cité.
Ainsi, il n’y aura plus de place pour les tâtonnements et les pseudo-politiques publiques parachutées, le Congrès national, à la fois Chambre basse, Chambre haute et Conseil économique et social en ce qui concerne la conception des politiques publiques du pays. Celles-ci seront traduites sous forme de plans et de programmes par les deux pouvoirs qui gèrent le pays.